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Mookhesswur Choonee Ministre des Arts et de la Culture : «L’Histoire nous apprend que nous n’apprenons rien de l’Histoire»

30 juillet 2010, 09:51

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D’emblée je m’empresse de signaler que je n’ai ni le temps ni la vocation de polémiquer avec l’historien chevronné qu’est le docteur Asgarally. En tant que ministre de la République, je vais me cantonner aux faits, sans la prétention de re-récrire l’histoire.

Avant d’entrer dans le vif du sujet, je dois faire remarquer, que la commémoration du bicentenaire fut décidée en 2006.

Aviez-vous parlez de mascarade à cette époque-là ?

Le gouvernement prit la décision d’honorer cette page importante de notre histoire en 2010, tout en y ajoutant des desseins économiques, surtout qu’on savait pertinemment bien, qu’il y aurait la Coupe du Monde en Afrique du Sud.

Venons-en maintenant à vos propos :-

? Ref. Votre paragraphe : «célébrations de valeurs martiales»

Selon le bon docteur Asgarally, nous sommes en train de faire des «célébrations d e valeurs martiales».

Nous sommes en 2010, docteur !

L’homme cultivé que vous êtes, regarde-t-il les films ou autres documentaires à la télévision ou au cinéma ? Les informations dans toute la presse et aussi sur la toile étalent au grand jour diverses formes de violence. Est-ce que pour autant ces journaux deviennent des chantres de la violence juste en relayant l’information ? De la même manière, en rappelant des faits historiques, est-ce que le ministère est en train de faire l’apologie de la guerre ? Non docteur, vous êtes en train de nous intenter un faux procès ! A ce rythme-là, avec une vision si étriquée, on va ramener la célébration de la fête Divali, à la glorification de la guerre – encore une, de Ram sur les forces du mal . Est ce que la démonstration de la crucifixion du Christ sur la croix constitue une glorification de la violence !

Même si je l’ai archi-répété, je ne crois pas l’avoir assez répété :

Nous ne sommes pas en train de célébrer la bataille ou la victoire des Français. Nous sommes plutôt en train de commémorer un pan de notre histoire, à travers un événement historique. C’est l’histoire qu’on célèbre. Je vous rappelle ce que j’ai dit à ceux présents à l’inauguration de l’exposition de l’association des artistes- ACA, à la gallerie IBL :

«Mesdames et Messieurs, nous ne devons pas et nous ne pouvons pas effacer d’un trait de plume un pan important de notre histoire, au seul motif qu’à travers cette bataille, nous sommes en train de célébrer le colonialisme !

Je tiens à préciser, sans équivoque, que nous ne sommes pas en train de célébrer la bataille de 1810. Loin de là…, nous sommes en train de mettre en lumière un événement historique, un pan important de notre histoire. Je ne suis pas ici pour re-écrire l’histoire, je me contente juste de le rappeler ! »

Donc, je laisse le soin aux révisionnistes de re-écrire l’histoire a leur guise, en escamotant des faits qui ne sont pas de leurs goûts.

Par ailleurs, cher docteur, j’ai l’honneur de vous envoyer une copie de la carte d’invitation officielle de la cérémonie par la poste. Vous allez noter – c’est en anglais – que vous êtes invité au ‘commemoration of bicentenary’ et non pas « celebration of bicentenary ». J’ose espérer qu’on ne va pas entrer dans un débat sémantique…

? Ref. Votre paragraphe : «Ces célébrations encouragent une culture de la guerre»

Monsieur Asgarally, vous écrivez : «c’est la Roulotte de la culture de la guerre qui s’est rendue dans les écoles pour sensibiliser la nouvelle génération aux joyeusetés de la guerre !» Combien de Mauriciens connaissent cet événement de 1810, qui marque un tournant dans notre histoire ? Un événement, qui comme je disais encore lundi dernier : «Mesdames et Messieurs, “l’Histoire nous apprend, que nous n’apprenons rien de l’Histoire” c’est certainement le cas, lorsque des événements qui ont marqué l’histoire, tombent dans la banalité.»

Ainsi, à mes yeux, la roulotte a fait un bon travail de sensibilisation.

Or, selon votre analyse, elle a servi, au contraire, à enseigner aux jeunes les joyeusetés de la guerre… Quelle vision réductrice, pour ne pas dire réductionniste, de cette initiative de mettre en valeur notre histoire. Vous croyez que les enfants n’attendaient que ça, pour se ‘cultiver’ en matière de guerre… les manuels d’histoire – géographie du primaire évoquent déjà ces faits historique, qui, soit dit en passant, sont sujet à examen en fin de cycle !

A suivre votre logique, cher docteur, on doit commencer par biffer tout cela de nos manuels !

? Ref. Votre paragraphe : «Ces célébrations sont aussi celles du colonialisme et de ses guerres innombrables»

Vous êtes en train d’insinuer que «42 ans après l’Indépendance, nous célébrons la victoir d’une puissance coloniale sur une autre !» Et comme pour mieux enfoncer le clou, vous vous poser la question de savoir «ce que ressentiraient SSR et les frères Bissoondoyal» !

J’ai déjà répondu à votre première insinuation, plus haut. Quant à votre question, je réponds par une autre : «Croyez-vous que ces tribuns étaient des thuriféraires des Anglais, pour avoir maintenu l’île Maurice dans le Commonwealth après l’indépendance?»

Par ailleurs, vous prononcez «ex-cathedra» «c’est choquant de constater, par un simple coup d’œil sur les «billboards», que des pays tels le Mozambique, Madagascar et l’Inde, qui ont tant souffert du colonialisme, s’associent aux célébrations de la bataille de Grand-Port».

Revenons aux faits, encore une fois : Nous savons tous pertinemment bien que la visite des artistes des pays susmentionnés s’inscrit dans le cadre de l’inauguration du Musée de peuplement à Pointe-Canon. Elle n’a rien à voir, absolument rien, avec la bataille de Grand-Port. Au contraire, ces pays amis ont été emballés à l’idée de participer dans les échanges culturels et c’est tant mieux pour notre diplomatie culturelle.

? Ref. Votre paragraphe : «Ces célébrations sont également des célébrations de l’esclavage».

Donc, cher docteur, parce que Napoléon était un esclavagiste, la commémoration de cet événement historique, implique, de facto que nous sommes en train de célébrer l’esclavagisme… Questions : Pourquoi n’avons-nous pas enlevé le statut d’Adrien d’Epinay du jardin de la compagnie ?

Est-ce que nous avons détruit toutes les vestiges de l’esclavagisme ?

Est-ce qu’en marquant l’arrivée des travailleurs Indiens à l’Aapravasi Ghat, nous sommes en train de célébrer le pseudo esclavagisme des Anglais ?

Est-ce qu’en important des articles de la Chine, nous sommes en train de promouvoir le communisme ?

? Ref Votre paragraphe : «Les célébrations se situent dans le cadre d’une véritable frénésie commémorative»

 – Vous citez Paul Ricoeur pour dénoncer, selon vous, une certaine boulimie commémorative. Qu’est ce qui vous dérange dans cette commémoration ? Combien de ce type de commémorations ont été organisées a Maurice ? Tout comme l’historien Guy Rouillard, nous pensons que «notre jeune histoire est un évènement qui mérite d’être célébrée»

– Par rapport à ‘devoir de mémoire’ Vous évoquez aussi le ‘devoir d’oubli.

Est-ce qu’on doit avoir un devoir d’oubli sur Auschwitz, sur les pogroms, les divers génocides, pour ne citer que ceux-ci, juste par ce qu’ils sont abominables ?

Au contraire, si on essaie de faire oublier le passé, il y a le risque de répéter ce qui s’est passé…

? Ref Votre paragraphe : «Ces célébrations seraient une initiative de Maurice, pas de la France».

Oui Monsieur, un pays comme la France, qui a des siècles d’histoires derrière elle, n’a pas que la bataille de 1810 à commémorer! D’ailleurs, cet aspect de l’histoire ne figure même pas dans leurs manuels scolaires. Combien de Français connaissent un pays qui s’appelle Maurice ? Par contre, essayez de compter, sur les doigts d’une seule main, le nombre de Mauriciens qui n’ont jamais entendu parler de la France ! Donc, il va de soi que l’initiative de commémorer cet événement historique doit forcément venir de nous…

N’empêche qu’il y aura aussi une cérémonie le 29 août à l’Arc de Triomphe.

Docteur, aurions-nous été l’objet de votre docte attention, si nous avions appelé cet l’événement, «commémoration de 1810» ou «fêtons l’histoire de 1810» etc. etc.? Le fait même que vous êtes monté au créneau, demeure la preuve que nous avons atteint notre objectif !! Nous avons utilisé un titre accrocheur «bataille de…» pour attirer l’attention de tout le monde et ainsi mieux vulgariser ce pan de notre histoire!

Par ailleurs, vous rendez vous compte de son impact touristique sur les régions avoisinantes mais aussi sur le pays? Nous avons créé pas mal d’emplois, tout en donnant l’occasion à nos artistes de s’exprimer. Que dire aussi de la portée culturelle de cet événement, qui rassemble tous les Mauriciens.

Docteur, j’espère avoir remis les pendules à l’heure…

Monsieur le rédacteur en chef, j’ose espérer que ma réponse aura la même couverture que l’article de Mons. Asgarally. Je sais que je peux compter sur votre sens d’éthique et d’équité. Je vous remercie pour sa publication.