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Quatre-Bornes: la maison de sir Veerasamy Ringadoo sera transformée en bureaux

20 septembre 2020, 17:30

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Quatre-Bornes: la maison de sir Veerasamy Ringadoo sera transformée en bureaux

Plus que des murs. Il est de ces maisons qui ont une histoire. Quand elles ne sont pas tout bonnement associées à l’Histoire. C’est le cas de la demeure située à l’angle des rues Farquhar et Antelme, à Quatre-Bornes. Là où ont vécu sir Veerasamy Ringadoo (SVR), le premier président de la République, et son épouse, lady Lydie Ringadoo. La maison est maintenant à louer… pour des bureaux.

«Ce n’est pas pour être habité», précise Raj Ringadoo, fils de SVR. Il indique que la maison appartient à sa sœur Sharmila. «Mon père a vécu dans cette maison à partir de 1973, jusqu’à son décès.» Occupation ininterrompue, sauf pour une parenthèse, quand il est en fonction au Château du Réduit. D’abord comme gouverneur général de janvier 1986 à mars 1992, puis comme premier président de la République du 12 mars 1992 au 30 juin 1992. Avant que Cassam Uteem ne lui succède.

Sir Veerasamy Ringadoo devint «Queen’s Counsel» en janvier 1985. Il est ici en compagnie de son épouse, lady Lydie Ringadoo.

Est-ce SVR qui a fait construire cette demeure en béton armé ? Raj Ringadoo affirme qu’«elle a été achetée à la famille de Marie Thérèse Humbert». Marie Thérèse Humbert, écrivaine mauricienne, vit et publie en France. Son premier roman – sans doute le plus connu – est «À l’autre bout de moi». Née à QuatreBornes, Marie Thérèse Humbert quitte Maurice en 1957.

Pour sa part, Rohit Beedassy, médecin généraliste et ancien ministre, se souvient avoir rencontré SVR dans cette maison. «C’était en pleine contestation au sein du Parti travailliste.» Nous sommes en 1979. La fronde est menée par Harish Boodhoo, Radha Gangoosingh et Rohit Beedassy. Ces «jeunes» font opposition avec la «vieille garde» du parti.

En face, le Mouvement militant mauricien monte en puissance. «We were on the fence. On avait besoin du vote des contestataires pour faire marcher le gouvernement. Il y allait de la survie de ce gouvernement.» Il est même question d’exclure les contestataires du parti, à la demande des «têtes brûlées», se souvient Rohit Beedassy. Il raconte que bien que les contestataires soient «plus proches de Satcam Boolell, Harish Boodhoo et moi, nous sommes allés voir Ringadoo chez lui, à Quatre-Bornes. Il était un homme posé, calme. Il a écouté nos doléances».

Cette maison a aussi résonné des débats autour de la succession de SSR comme leader du PTr, explique Rohit Beedassy. «Qui de Boolell ou de Ringadoo allait prendre la barre ?»

Après son passage au Réduit, SVR revient dans sa maison. C’est aussi là que décède lady Lydie Ringadoo, en décembre 2018.

Parcours : «Minis ser sintir» et autres réalisations

Sada Reddi, historien, ancien chargé de cours à l’université de Maurice, ancien président de l’université de Technologie, est le biographe de cette personnalité politique. Il est l’auteur de «Sir V. Ringadoo : an opportunity to serve», paru en 2000. Il se souvient avoir rencontré son sujet à son domicile.

Que faut-il retenir de l’action de SVR ? Lui qui a occupé plusieurs fauteuils ministériels avant d’aller au Réduit. «Il a révolutionné les lois du travail», affirme le biographe. «C’est lui qui a introduit la loi qui définit le “termination of contrat” et le “severance allowance”. Comme cela, on ne pouvait plus licencier un employé sans passer par un tribunal.»

L’historien rappelle qu’«en l’espace d’un mandat, c’est-à-dire cinq ans, il a fait construire 54 écoles primaires à travers l’île». SVR a aussi été ministre de l’Éducation. «L’objectif était que chaque village soit doté d’une école primaire, pour faciliter l’accès à l’éducation, notamment pour les filles. Elles ne pouvaient pas faire de longs trajets, traverser les champs de canne.» Sada Reddi souligne également qu’à la création de l’université de Maurice en 1965, le ministre de l’Éducation de l’époque s’appelle Ringadoo.

Plusieurs générations de Mauriciens se souviennent aussi de lui comme du «minis ser sintir». Le biographe précise que Ringadoo a été «le premier ministre des Finances après l’Indépendance. Il a introduit le premier Budget d’austérité. Il était un ministre des Finances très rigoureux dans les dépenses. Il a eu à faire face à pas mal de défis, dont la crise pétrolière des années 1970, la pression des syndicats réclamant la hausse des salaires et une série de calamités naturelles». Sada Reddi insiste : comme ministre, Ringadoo a aussi contribué à maintenir l’État-providence.

Proche de sir Seewoosagur Ramgoolam, «qui était de 20 ans son aîné», Ringadoo faisait partie du groupe «de Harold Walter et Kher Jagatsingh». «Il n’a jamais contesté le leadership de SSR», affirme le biographe.

Né le 9 septembre 1920, Veerasamy Ringadoo est décédé le jour de son 80e anniversaire. Il était diplômé de la «London School of Economics» en 1948. Il entre au conseil législatif en 1953. Sa circonscription, c’est Moka-Flacq. Un buste de SVR se trouve à la Place d’Armes. Une école primaire de Quatre-Bornes porte son nom.