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100 jours après les élections: le coronavirus, un bouc émissaire idéal pour le gouvernement ?

17 février 2020, 19:00

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100 jours après les élections: le coronavirus, un bouc émissaire idéal pour le gouvernement ?

Le samedi 15 février, cela faisait exactement 100 jours depuis les élections générales du 7 novembre et la victoire de l’Alliance Morisien, menée par Pravind Jugnauth. Cette période d’un peu plus de trois mois marque le temps de grâce généralement accordé à tout nouveau gouvernement par ses opposants, laissant à la majorité toute la latitude de s’installer, avant que ne débutent les choses sérieuses. Une de ces préoccupations occupe actuellement la pensée du Premier ministre, qui l’a dit et répété à plusieurs occasions: «L’économie mauricienne sera grandement affectée par le coronavirus, tout comme le monde entier.» Un fait que tout le monde, que ce soit des membres de l’opposition ou encore des économistes indépendants, ne peut nier.

Mais avant l’apparition de cette épidémie de Covid-19, le pays s’est-il déjà embarqué dans son redressement économique, cent jours après l’installation du nouveau gouvernement ? Ou encore, la majorité joue-t-elle la carte de la transparence dans ses nominations qui interviennent chaque semaine ? Autre question : à quand une séance du Parlement un mardi, pour que la population puisse avoir des réponses à ses interrogations, par le biais de ses députés ? Nous avons abordé toutes ces questions avec des députés de l’opposition et avec Dan Maraye, ancien gouverneur de la Banque de Maurice (BoM). Du côté du gouvernement, personne ne souhaite parler à l’express.

Dan Maraye trouve que c’est un bon signe que le Premier ministre ait choisi un ancien de la Banque de Maurice, en la personne de Renganaden Padayachy, pour être ministre des Finances. Toutefois, il estime que c’est encore trop tôt pour analyser la per- formance de l’ex-numéro 2 de la Banque centrale. «Je lui donne jusqu’au prochain Budget avant que je ne puisse porter un meilleur jugement sur lui.»

L’ancien gouverneur de la BoM reconnaît, lui aussi, que le coronavirus affectera l’économie de Maurice, mais il aurait souhaité plus de rigueur dans la gestion des finances. «Les années se suivent et se ressemblent au niveau du gaspillage dans les corps parapublics. Je suis d’accord pour des nominations politiques, mais une fois que ces personnes assument leur poste, elles doivent faire leur travail comme des professionnels. Savez-vous que selon la loi, tous les six mois, chaque institution parapublique doit rendre compte de son bilan, mais que, dans certains cas, les comptes ne se sont jamais rendus public et aucune sanction n’est prise contre les responsables.» Pour lui, il ne faut pas juste faire état de la menace représentée par cette épidémie, mais il faut aussi savoir gérer l’économie selon ces nouveaux paramètres.

Shakeel Mohamed, député du Parti travailliste, trouve lui aussi qu’il «ne faut pas jeter le blâme uniquement sur cette épidémie, pour dire que l’économie sera affectée». Il se demande ce que fait le gouvernement pour réduire l’impact du Covid-19 sur notre pays. «J’attendais qu’il y ait une assise des experts, pour voir de quelle façon aider le pays à minimiser la crise. Tout comme pour le Brexit, il faut un comité d’experts pour voir comment le pays pourrait s’en sortir sans trop de casse. Mais malheureusement, cela semble mal parti après les 100 premiers jours du gouvernement.»

Par contre, du côté du Parlement, Shakeel Mohamed dit apprécier les relations amicales avec le speaker, chose qui faisait défaut auparavant, selon lui. Toutefois, il condamne l’opacité de la majorité au niveau des nominations effectuées à diverses positions de responsabilités. «Ce gouvernement n’a pas appris de ses erreurs du passé.»

Pour Rajesh Bhagwan, député et secrétaire général du Mouvement militant mauricien, pendant ces derniers cent jours, «le gouvernement a chloroformé le peuple avec quelques mesures populaires, mais, au fil des jours, on découvre que le pays est assis sur un volcan économique». Il trouve que tout est politisé à Maurice. «Ce qui se passe à la MBC, à la Banque de Maurice et dans certaines institutions, démontre que le gouvernement est mal parti après ces cent jours de grâce.» Ajoutant que «le pouvoir est déjà monté à la tête de certains…»

Kushal Lobine, du Parti mauricien social-démocrate, estime, lui, que Pravind Jugnauth est mal placé pour demander à l’opposition d’accepter la défaite, après les élections. «Or, nous trouvons que trois ministres, Stephan Toussaint, Anwar Husnoo et Fazeela Jeewah-Daureeawoo, tous les trois des candidats battus de l’Alliance Morisien et repêchés comme Best Losers, ont été nommés ministres. Sans oublier la nomination d’Eddy Boissezon, candidat battu au n°17, comme vice-président de la République, et aussi tous ces candidats battus qui sont nommés à des postes de responsabilité. Est-ce que Pravind Jugnauth accepte, lui. que ces personnes ont été rejetées par le peuple ?»