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Firemount: des Bangladais expulsés pour avoir «créé du désordre»

4 octobre 2019, 15:00

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Firemount: des Bangladais expulsés pour avoir «créé du désordre»

42 Bangladais, qui étaient employés à l’usine Firemount, ont été expulsés hier, jeudi 3 octobre. La direction de l’entreprise leur reproche d’avoir saccagé les lieux lors de vives tensions mardi soir. Au Bureau du passeport, l’on parle de «procédure normale», après la résiliation d’un permis de travail…

Il est 11 heures, jeudi 3 octobre. Nous sommes à l’entrée de l’usine Firemount, à St-Félix, où une dizaine d’ouvriers étrangers travaillent. Traits tirés, cernes apparents… Ces derniers n’ont pas l’air bien dans leur peau, après avoir vécu plusieurs jours de perturbations. Quelques heures plus tôt, une quarantaine de leurs amis ont été embarqués par des officiers du Passport and Immigration Office (PIO). Péniblement, ils acceptent de revenir sur le fil des événements, mais insistent sur l’anonymat.

Selon ces étrangers, à environ 7 h 30, alors que débute le travail, ils constatent une forte présence policière sur les lieux. Parmi les différentes unités dépêchées, la Special Supporting Unit ou encore le PIO. Ces ouvriers sont accompagnés par des membres de la direction de l’usine. Devant eux, 42 de leurs collègues sont embarqués, dont 26 femmes.

Si plusieurs avaient déjà pris poste, d’autres ont été arrêtés dans leur dortoir. Cela, après avoir été identifiés par la direction de l’entreprise. Que leur reproche-t-on ? D’avoir mené les manifestations et les actes de vandalisme dans la soirée de mardi. Quant aux «chanceux», qui peuvent toujours continuer à travailler, le message a été clair: ils subiront le même sort s’ils occasionnent des remous.

Il nous revient que les forces de l’ordre ont quitté l’enceinte de l’usine peu après 9 heures. C’est dans la peur que les autres employés ont repris le travail. «Ils sont toujours sous le choc. Ils ne s’attendaient pas à ce que cette affaire prenne une telle ampleur», confient des employés mauriciens à l’express.

Une fois arrêtés, les 42 Bangladais ont été placés dans un retention centre en attendant d’obtenir une place dans l’avion. Il était, dans un premier temps, question de les faire passer en cour pour les tenir pour responsables des dégâts causés à l’usine. Mais finalement, ils seront expulsés illico. Selon Fayzal Ally Beegun, défenseur des travailleurs étrangers, les droits de ces ouvriers ont été lésés. «Si on les accuse d’avoir fauté, ils auraient dû pouvoir se présenter devant un comité disciplinaire comme tout travailleur. Les autres ont été intimidés même s’ils continuent de travailler dans des conditions inhumaines.»

Pour rappel, environ un millier de travailleurs étrangers de l’usine ont déploré leurs conditions de travail, mais surtout le retard autour du paiement de leurs salaires pour le mois de septembre. À hier, moins de la moitié des employés de l’usine Firemount avaient touché leurs soldes. Certains se rendaient encore au guichet automatique à Chemin-Grenier pour vérifier. D’autres rencontrés par l’express, disent avoir baissé les bras. «Nous allons attendre. Sinon, nous allons tout perdre et nous serons aussi expulsés…»

La direction de l’usine Firemount derrière les déportations…

Sollicité, le responsable du PIO, l’assistant surintendant de police Manoj Luchan, indique que les officiers n’ont pas eu «d’autre choix que de résilier leur permis de séjour». Il explique que la direction de l’usine les a informés que les permis de travail de la quarantaine de travailleurs ont été suspendus avec effet immédiat. «Lorsqu’un permis de travail est résilié, nous sommes contraints à mettre fin au droit de séjour. Sans permis de travail, ces étrangers se retrouvent de facto dans l’illégalité. C’est la raison pour laquelle ils sont déportés au plus vite. Tout est fait dans les normes». Hier, une partie des Bangladais a déjà obtenu des places en avion. Étant donné qu’il n’existe pas de vol direct entre Maurice et le Bangladesh, des escales à Singapour, à Dubaï ou encore à Mumbai sont obligatoires. Les billets ont été payés par la direction de l’usine, qui, d’ailleurs, s’est refusée à tout commentaire.