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Nathalie, une survivante: «Les victimes de violences conjugales ne se voient pas comme des victimes»

14 septembre 2019, 18:19

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Nathalie, une survivante: «Les victimes de violences conjugales ne se voient pas comme des victimes»

Nathalie (prénom modifié) a quitté son mari après 24 ans de mariage. «Je ne sais même pas comment tout cela a commencé! Il y a eu beaucoup de violences verbales et affectives et les coups sont venus après. Je me dis, à présent, que tout a possiblement commencé lorsqu’il a eu des changements au niveau de son travail», relate-t-elle.

Au bout de dix ans de mariage, celui à qui elle avait promis d’être là dans les bons comme dans les mauvais moments a commencé à se défouler sur elle. «Il affichait l’image de l’époux parfait aux yeux des autres. Mais à la maison, il avait des choses en tête et il m’était impossible de les lui enlever. J’ai appris plus tard qu’il avait porté plainte contre moi pour avoir volé son argent… alors que je m’apprêtais à prendre un emprunt pour lui ! Cela n’avait aucun sens», poursuit cette femme aujourd’hui dans la cinquantaine. Au milieu de tout cela, il y avait bien sûr des enfants. «Ils ne comprenaient pas vraiment ce qui se passait.»

L’éclatement

Un jour, il y a eu le déclic. Son mari lui demande de s’asseoir pour discuter. Elle pense qu’il veut enfin trouver une solution. «Mais cette discussion, comme toutes les autres, a pris une autre tournure. Il a fini par prendre mes effets personnels et j’en ai eu assez. Dans le passé, j’avais déjà porté plainte contre lui pour agression mais je n’avais pas eu de Protection Order. On m’avait dit que je devais monter un dossier contre lui pour obtenir un Protection Order. C’est-à-dire rapporter plusieurs cas d’agression», poursuit Nathalie.

Lorsque son époux lui prend ses affaires, Nathalie décide de se rendre à la police. «Là j’ai eu de la chance. Un policier m’a dit que je ne devais pas rester un jour de plus. Des policiers m’ont accompagnée pour prendre quelques affaires et ils ont constaté que mon ex-mari ne voulait pas me laisser rentrer dans la maison. Ils l’y ont obligé. Depuis ce jour, je n’ai pas remis les pieds dans une maison qui est toujours à moi», raconte-t-elle.

Nathalie se retrouve à passer la nuit dans un abri ce soir-là. «Les victimes de violences conjugales ne se voient jamais comme des victimes. Elles se disent que si elles ont surmonté des coups, elles peuvent encore le faire. Il faut comprendre une chose, ce n’est jamais facile de laisser quelque chose qu’on a construit derrière soi.»

La quinquagénaire fait ressortir que les premiers jours suivant la séparation, elle entendait les voix de ses enfants dans la maison alors qu’ils n’étaient pas là. «Il y a eu les premiers Noël sans eux, les premiers anniversaires. La chance que j’avais, c’est que je travaillais. Certaines femmes ne peuvent même pas se prendre un avocat, elles ne tombent pas sur des policiers qui veulent les aider, elles n’ont pas d’amis qui veulent bien les encadrer. Je suis rentrée dans une maison vide. Je n’avais qu’un lit sur lequel je mangeais, je m’asseyais seule… C’est ce que cela implique de tout quitter», enchaîne-t-elle.

Quel est son message à celles qui subissent encore les coups ? «Il y a plusieurs étapes à franchir. Il faut d’abord reconnaître qu’il y a un problème. Personne n’a le droit de vous frapper. Il faut ensuite la force de quitter ses habitudes, ses repères. Après cela, il faut s’appuyer sur tous ceux qui veulent bien vous aider, la police, les avocats, la famille, les amis. Enfin, se relever à chaque fois. Parce que durant ce parcours, il y aura plus de chutes. Il y aura aussi les fois où les enfants ne comprendront pas votre choix. Mais ce n’est pas leur faute, il ne faut pas s’attendre qu’ils aient du bon sens. Vous êtes leur maman, le bourreau c’est aussi leur papa…