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Lisette Fanchin, pêcheuse: «On réclame une allocation de Rs 5 000 par mois»

7 juillet 2019, 21:30

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Lisette Fanchin, pêcheuse: «On réclame une allocation de Rs 5 000 par mois»

Les filets chargés de revendications, ils ont manifesté à Port-Louis, le lundi 1er juillet. Les membres de l’Association des pêcheurs professionnels de l’île Maurice ont tendu une perche au Premier ministre… qui n’a pas encore mordu à l’hameçon. Pourquoi boudent-ils leur allocation augmentée à Rs 355 ? Est-ce qu’on les mène en bateau ?

Pourquoi avez-vous manifesté lundi dernier ?
Cette «paie» qu’on nous donne est insuffisante. La mer est déjà vide, il n’y a presque plus de poisson. On ne peut même plus en vivre. On ne peut même pas joindre les deux bouts. On est à bout de souffle.

Que réclamez-vous au juste ?
Tous les bénéficiaires des pensions et allocations touchent des bonus de fin d’année. Pourquoi pas nous ? On réclame Rs 5 000…

Comme boni de fin d’année ?
Mais non, nous voulons une allocation de Rs 5 000 par mois. Vous savez, plus le temps passe, et moins on a du travail. Que ce soit un vêtement ou une petite chose en plus, on ne peut rien acheter… Pour les fêtes, c’est pire.

Pourtant, votre allocation pour le mauvais temps est passée de Rs 300 à Rs 355…

Ça ne suffit pas. Que peut-on avoir avec Rs 55 de plus ? Ça ne change rien à notre vie de misère. Aujourd’hui, la somme de Rs 1 000 ne vaut que Rs 100. Nous maintenons la réclamation des Rs 5 000.

Pourquoi vous accrochez-vous à ce chiffre ?
Contrairement aux pensionnés, nous n’avons rien, nous ne touchons rien de plus. Pourquoi sont-ils mieux lotis que nous ? De plus, avec les conditions climatiques, nous tombons malade et avons besoin d’argent pour traiter ces problèmes de santé…

Alors que l’hôpital est gratuit…
On ne peut tout traiter et encore moins se fier à l’hôpital. Parfois, il faut courir d’urgence chez un médecin.

Sous quelles conditions bénéficiez-vous de l’allocation de mauvais temps ?
C’est surtout quand les sorties en mer sont déconseillées. Par exemple, quand la météo émet des avis de fortes houles entre autres. Dans ce cas, je reste chez moi pour réparer des casiers. Moi, je ne mets pas un pied en mer…

D’autres pêcheurs y vont quand même ?
Il y en a qui prennent ce risque. D’autres n’osent pas. Mais par temps de pluie, on a vu plusieurs pêcheurs partir et ne jamais revenir.

Combien rapportent ces allocations de mauvais temps ?
Je ne sais pas… je ne me rappelle pas. Pour le dernier mois, c’était à Rs 3 600.

Et votre «salaire» mensuel ?
Ah ça… personne ne sait. On part à la pêche dès 6h30 sans savoir à quelle heure on reviendra. Parfois, la pêche n’est pas bonne. Les filets restent souvent vides. Comment faire pour vivre ainsi ? Pourquoi a-t-on donné une compensation aux extracteurs de sable ? Et nous, alors ? Personne ne prendra la relève. On ne verra jamais un jeune venir exercer ce métier. Je ne conseille à personne un tel travail. Chercher la vie sur la mer c’est se fondre dans la misère.

Le prix du poisson a tout de même augmenté. Vous n’y trouvez toujours pas votre affaire ?
Bien sûr, les tarifs ont augmenté mais de notre côté, c’est la misère qui a augmenté.

Et avec l’hiver, le poisson ne mord pas ?
Avec le froid, la quantité de poisson diminue davantage. C’est peut-être dû à la pollution…

Notre lagon est-il si mal en point ?
Il se dégrade. Les coraux sont presque inexistants. L’eau est sale. Les usines déversent leurs eaux dans la mer. C’est pour ça qu’on doit aller plus loin pour pêcher. En plus, des étrangers pêchent nos poissons.

Et changer de métier, vous y avez pensé ?
Où irai-je ? Regardez mon âge (NdlR, l’habitante de Pointe-des-Lascars a 64 ans)

Quelle est la prochaine étape dans vos revendications ?
On a remis une pétition au Premier ministre. Si rien n’est fait, le syndicat nous a dit qu’on fera une nouvelle manifestation d’ici deux semaines.