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Finlay Salesse: «En dix ans, l’émission Dimanche Culture est devenue une référence ici et ailleurs»

22 juin 2019, 17:23

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Finlay Salesse: «En dix ans, l’émission Dimanche Culture est devenue une référence ici et ailleurs»

Votre émission Dimanche Culture fête cette année ses dix ans puisque votre première émission remonte au 31 mai 2009. Comment allez-vous fêter cet anniversaire ?
Nous ferons certainement comme nous l’avons fait pour les 100e , 200e , 300e émissions, soit un grand évènement dans un hôtel avec plusieurs invités. La date reste à être définie car elle est déterminée par la disponibilité des invités. Quelques contacts ont été pris.

Dix ans de Dimanche Culture, cela fait combien d’auditeurs ?
Il est très difficile de chiffrer le nombre d’auditeurs. Mais je pense qu’en 10 ans, j’ai dû en engranger des milliers. Au début, il fallait courir pour remplir les émissions. Aujourd’hui, les gens nous appellent, nous envoient leurs livres. Rien que pour cette semaine (la semaine écoulée), j’ai reçu quatre publications : Aux quatre coins de mon pays de Jean Forget, Anou partaze de Loga et Dev Virahsawmy, Blue Mauritius, roman extraordinaire d’Emmanuel Richon et Last words of the magnate de Rajiv Seeras. Il y a dix ans, on était obligé de faire appel à une boîte de communication à Paris pour avoir des auteurs et des livres. Les deux éditions du Festival International du Livre nous ont beaucoup aidés. Aujourd’hui, il y a suffisamment de matière à exploiter car le nombre de publications a sensiblement augmenté à Maurice, le nombre de maisons d’édition aussi, le nombre de concours également.

Dimanche Culture ce n’est pas que les livres ?
La culture, c’est tout ce qui caractérise un peuple, soit sa langue, sa religion, sa cuisine, ses expressions artistiques, ses habitudes sociales, tout. Il est évident que je ne m’intéresse pas qu’aux livres. Les galeries d’art font deux à trois expositions par mois. Tout cela alimente mes émissions. Il y a les débats mensuels du Centre culturel d’expression française, les lancements de livres, le Labourdonnais Hotel s’est récemment lancé dans la formule À table avec... dont le prochain invité est Jean-Claude de l’Estrac. Sans compter qu’il y a le Caudan Arts Centre, qui s’est ajouté à l’offre. La vie culturelle locale est assez riche et je ne fais que puiser dans toute cette matière disponible. Donc, lorsque j’entends dire qu’il n’y a rien dans la vie culturelle à Maurice, je m’arrache les cheveux (rires) !

Avez-vous eu initialement du mal à convaincre votre direction par rapport au lancement d’une émission culturelle ?
Au début, j’ai fait face à du scepticisme. Mais j’ai eu le soutien de la direction et à force de persévérance, j’ai réussi à boucler les émissions avec le cinéma et la télévision. Aujourd’hui, il n’y a plus de place pour ces deux domaines.

«Sur le plan culturel, il n’y a pas d’arrogance.»

Vos meilleures interviews en dix ans ?
Citons les morts pour ne pas faire de jaloux (rires) ! L’interview politique marquante a été Stéphane Hessel, à qui j’ai donné la parole quelques mois avant sa disparition. Sur le plan émotionnel, cela a été Claude Lelouch. J’étais étudiant en 1966 lorsque j’ai vu son film Un homme et une femme. Récemment, j’ai vu Lelouch monter les marches du Festival de Cannes pour la suite d’Un homme et une femme et 53 ans après, quelle émotion ! Chaque interview est porteuse d’émotion, d’ivresse de l’altitude. On ouvre une fenêtre et on parle à un étranger. Dommage qu’il n’y ait plus le Festival international du Livre d’organisé à Maurice.

Et chez les femmes interviewées ?
Claudia Cardinale en raison d’Il était une fois dans l’Ouest. On a tous fantasmé sur Claudia Cardinale à l’époque des films en noir et blanc. Et Josiane Balasko pour son intelligence.

Des regrets ?
Deux énormes regrets. J’avais pris rendez-vous avec l’icône radiophonique et télévisuelle Jacques Chancel. On se parle au téléphone et il me dit : «Mon jeune ami, vous me faites beaucoup d’honneur. Je suis entre deux avions et je reviens vers vous.» Entre-temps, il est mort. Le second regret est pour Jean d’Ormesson, qui s’est dit très fatigué et qui m’a demandé de le rappeler. Je ne l’ai pas fait à temps.

Avez-vous eu affaire à des interviewés(es) arrogants ou désagréables ?
Sur le plan culturel, il n’y a pas d’arrogance. Avec un auteur, c’est un autre état d’esprit. Que ce soit Jean-Marie Leclézio, Patrick Poivre d’Arvor ou une autre grosse pointure, il n’y a pas eu d’arrogance. Nous avons un avantage, nous journalistes mauriciens. Dès que nous disons que nous appelons de l’île Maurice, le dépaysement se fait dans la tête de notre interlocuteur. J’ai aussi développé de bons réseaux de contacts à Paris. Dimanche Culture est devenue une référence à Maurice et ailleurs.

Après dix ans, qu’allez-vous apporter comme changements à votre émission ?
Je dois lui donner un nouveau souffle, tout en maintenant tout ce qui a fait sa richesse et sa diversité. Pourquoi pas un concours de poésie ou de roman, qui porterait le nom de Radio1 ? Je pense aussi à faire des lectures d’auteurs à l’antenne, surtout ceux qui ont disparu. Je ferai aussi connaître la facette culturelle de certaines personnes auxquelles on ne s’attend pas du tout. Je pense aussi à un rendez-vous mensuel avec des personnes de 70 ans, qui ont eu 50 ans de carrière et des choses extraordinaires à raconter et qui ne le font pas faute d’une plateforme pour le faire. Je vais les interviewer avant qu’elles ne meurent. Les Africains disent qu’un vieux qui meurt est une bibliothèque qui disparaît. C’est notre devoir de les interviewer maintenant, notre devoir de mémoire.