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Roches-Noires: la vente d'un terrain recelant une zone humide inquiète les éco-conscients

23 mai 2019, 20:30

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Roches-Noires: la vente d'un terrain recelant une zone humide inquiète les éco-conscients

Chaque projet immobilier qui a tenté d’y voir le jour a rencontré une forte opposition. La Platform Moris Lanvironman (PML) attire l’attention sur la zone humide faite de barachois, de mangroves, de marais côtiers d’eau douce, dont un est classé Catégorie 1 d’après l’étude de 2009 sur les Environmentally Sensitive Areas ainsi que les grottes qui s’y trouvent. Ce réseau informel d’organisations non-gouvernementales et d’individus «éco-conscients», dont la porte-parole est Adi Teelock, argue qu’à l’heure des graves menaces sur la biodiversité et des effets potentiellement dévastateurs du changement climatique, la protection des écosystèmes qui préservent la vie sur terre de tout développement qui porterait atteinte à leur intégrité et aux services écosystémiques qu’elles fournissent est une priorité. Tel est le cas de la zone humide de Roches-Noires. 

De son côté, Rajeev Basgeet, administrateur (étant donné que le terrain est en redressement judiciaire, NdlR) de cette vente au sein de PricewaterhouseCoopers, se veut rassurant. Mis en présence de ces inquiétudes, hier, celui-ci fait valoir que n’importe quel projet qui y sera réalisé dans le futur nécessitera avant tout l’autorisation des autorités compétentes, dont un permis d’Environmental Impact Assessment (EIA) afin de protéger l’environnement du site. 

«Je suis content que des gens soient concernés mais il ne faut pas non plus en faire une polémique alors qu’il n’y en a pas. Le promoteur qui y fera un projet sous le Property Development Scheme par exemple, après l’acquisition du terrain, doit respecter ce que les autorités vont lui imposer», soutient Rajeev Basgeet. 

L’annonce parue mercredi 22 mai présentant l’«opportunité unique»
que d’acheter un terrain dans cette zone qui a fait l’objet de nombreuses polémiques.

Demande depuis 2005

Ce n’est pas la première fois que ce terrain à Roches-Noires suscite des réactions. Il a même été au cœur d’une Private Notice Question (PNQ) de l’ex-leader de l’opposition Paul Bérenger, le 10 avril 2015. Une PNQ à laquelle a répondu Vishnu Lutchmeenaraidoo, alors ministre des Finances. 

Il avait affirmé que depuis le 15 septembre 2005, l’ex-Board of Investment (BoI) avait reçu une demande du groupe sud-africain Élan pour un certificat Integrated Resort Scheme (IRS) afin d’y construire deux hôtels, un terrain de golf, des chalets, un port de plaisance, des villas, ainsi qu’un parc d’affaires. Le promoteur avait alors proposé d’acquérir le terrain (352 hectares) auprès des propriétaires locaux, Grand Lake Ltd, représentés par le groupe Fon Sing. Deux autres petites parcelles adjacentes de 4,22 hectares appartenant à la Société Yajna et de 0,7 hectare appartenant à S. Ghurburrun, ont ensuite été achetées et intégrées dans le projet. Ce qui fait l’étendue totale de 358 hectares. 

Le 9 octobre 2006, le BoI (aujourd’hui l’Economic Development Board) est informé que le groupe Élan, bien qu’il soit en présence d’une lettre d’intention depuis le 6 décembre 2005, se retire du projet. Et que les nouveaux promoteurs étaient un consortium dirigé par Jean Marie Bain et composé de Cassiopée (île Maurice) Ltée comme actionnaire principal. Un certificat IRS a été émis le 13 novembre 2007. 

Le 11 février 2010, le consortium informe le BoI qu’il n’a pas pu lever des fonds et rembourser ses emprunts en raison de difficultés financières et a demandé l’autorisation de vendre 90 hectares, sur les 358 hectares, à des investisseurs locaux qui souhaitent réaliser un morcellement résidentiel. Une demande qui, toujours selon la réponse de Vishnu Lutchmeenaraidoo dans le hansard de l’Assemblée nationale, a été rejetée par le BoI. Le 3 mai 2010, la Barclays Bank, détentrice de diverses charges fixes/variables sur les actifs de la société Roches Noires Resort and Residence Ltd, a nommé PricewaterhouseCoopers en qualité d’administrateur.

Smart city annulée

Après un exercice d’appel d’offres par PricewaterhouseCoopers, le groupe chinois YIHE, qui a enregistré Island Summer Palace Ltd à Maurice, a montré son intérêt le 4 septembre 2012. Sauf que son projet de smart city comprenant hôtel, zone commerciale et d’affaires, quartier résidentiel et terrain de golf est également tombé à l’eau. 

Cela même si Vishnu Lutchmeenaraidoo avait alors affirmé, face aux «objections et, à juste titre, en ce qui concerne l’environnement» que les milieux humides et les barachois sur le site seront maintenus dans leur état actuel et que les arbres et les plantes endémiques seront préservés et de nouvelles plantes endémiques seront cultivées. 

Rappelons aussi que ce terrain se trouve dans la zone identifiée dans le passé pour accueillir une seconde piste d’atterrissage. Ce que Vishnu Lutchmeenaraidoo avait, lors de cette PNQ, qualifié de «clairement un prétexte trouvé par l’ancien gouvernement pour arrêter ce grand projet» et que «les mauvaises langues prétendant que le campement de l’ancien Premier ministre juste en face est la raison réelle». Le département de l’aviation civile a abandonné le projet de «northern airport» en 2015.