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Droits humains: quand l’inclusion des personnes avec un handicap passe par l’accessibilité

11 septembre 2018, 12:30

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Droits humains: quand l’inclusion des personnes avec un handicap passe par l’accessibilité

Les personnes porteuses de handicap ont droit à une place légitime dans toutes les sphères de la société. Ainsi, la question de l’accessibilité est l’un des principaux champs de bataille des ONG travaillant dans ce secteur. De gros efforts sont déployés par celles-ci pour faciliter et améliorer l’accès des personnes concernées à différents espaces publics. C’est une question de droits humains, les mêmes droits que ceux dont bénéficient les autres Mauriciens.

Lorsque l’on parle de personnes avec un handicap, le concept d’accessibilité englobe l’idée de rendre des services, informations, conseils ou lieux «accessibles» à des personnes ayant des besoins spéciaux, en s’aidant de différentes technologies ou simplement en faisant de petits ajustements. De légères modifications qui ne sont pas toujours considérées comme prioritaires à Maurice, selon les ONG travaillant dans le secteur du handicap.

Nalini Ramasamy, de l’organisation Voice of DPI - Mauritius.

Pour Hélène de Cazanove, responsable de projets à la Fraternité mauricienne des malades et handicapés (FMMH), si des efforts sont faits pour améliorer lesinfrastructures publiques en faveur d’un meilleur accès aux personnes avec handicap, certaines démarches mises en oeuvre sont un peu maladroites ou faites sans consultation avec les partis directement concernés (ONG travaillant dans le secteur du handicap ou personnes vivant avec un handicap elles-mêmes).

«Par exemple», indique Pooja Gopee, coordinatrice du réseau Inclusion Mauritius, «il y avait ce grand centre commercial qui avait placé un panneau pour diriger ses visiteurs vers les toilettes, mais il avait été placé très haut avec un texte écrit en petits caractères et un pictogramme qui n’était pas visible.» Or, pour une personne avec un handicap intellectuel, la compréhension passe beaucoup par des références visuelles, souligne-t-elle.

Hélène de Cazanove, responsable de projets à la FMMH.

En gros, il existe la volonté de faire avancer leschoses mais il n’y a pas de pouvoir décisionnel qui soutient et porte plus loin les projets enclenchés ou envisagés, remarque Hélène de Cazanove. Nalini Ramasamy de l’organisation Voice of Disabled People International (DPI) – Mauritius note que la question de l’accessibilité a pourtant été mentionnée dans le dernier Budget national. « L’on parlait de rendre tous les bâtiments publics de Maurice accessibles aux personnes en situation de handicap. Comment et quand ? Selon quelles normes ? Depuis l’annonce, nous n’entendons plus rien à ce sujet et nous ne voyons aucune mesure concrète prise par les ministères concernés. »

Et tandis que partout l’on parle d’Accessible Tourism, fait-elle aussi ressortir, à Maurice, qui utilise ses plages comme principal outil de promotion touristique, les personnes avec handicap physique ne peuvent toujours pas se rendre à la plage «publique», faute d’accès pour leurs fauteuils roulants.«Dommage… D’autant que l’exercice physique dans l’eau est très recommandé pour ces mêmes personnes !»

«Tant qu’il n’y a pas d’accessibilité physique», explique Nalini Ramasamy, «on ne peut pas parler d’accessibilité aux services.» Hélène de Cazanove abonde dans le même sens. Pour elle, la question d’accessibilité comprend d’enlever tous les obstacles sociétaux bloquant l’accès des personnes avec handicap aux services et informations auxquels elles ont droit. Des obstacles qui sont présents «non seulement au niveau des infrastructures publiques mais aussi au niveau des services clients et de la mentalité du public à l’égard des personnes avec handicap», ajoute-t-elle.

Les problèmes d’accès à Maurice pour les personnes porteuses de handicap prennent différentes formes. Cela peut aller de l’accessibilité aux services de santé – une personne avec un handicap physique peut difficilement faire une mammographie par exemple car il faut se tenir debout, remarque Nalini Ramasamy –, ou du respect du parking pour personnes avec handicap.

Une rampe d’accès peut être empruntée par tous, contrairement à un escalier.

D’ailleurs, note cette dernière, «les informations-icônes pour le respect des personnes avec un handicap sur la route ne figurent pas dans le code de la route.» En gros, souligne-telle, le problème vient du fait que le handicap n’est pas traité comme une question «mainstream» à Maurice, mais est classifié sous des taches auxquelles seule le ministère de la Sécurité sociale et quelques ONG devraient s’atteler.

Selon Aarthi Burthony, représentante de la Global Rainbow Foundation, l’idée d’accessibilité englobe aussi les sentiments et les considérations humaines : «Si l’inclusion occupe une place si primordiale dans l’accessibilité aux personnes en situation de handicap, c’est justement dans le but de mettre tout en oeuvre pour les traiter avec dignité, en gardant à l’esprit que ces personnes ont droit à leur place dans notre société.» L’«inclusion» est-il donc le maître-mot lorsqu’il s’agit de la question d’accessibilité pour les personnes en situation de handicap ? «L’inclusion doit primer en toutes circonstances et tout projet de société devrait être réalisé en considérant les besoins spécifiques de chaque fragment de la population», poursuit Aarthi Burthony.

Pooja Gopee (à droite), coordinatrice du réseau Inclusion Mauritius.

Inclusion Mauritius, à travers son réseau de 12 ONG du handicap intellectuel et des polyhandicaps, travaille beaucoup sur cette question d’inclusion. «Nous aidons les jeunes de notre groupe d’auto- représentants à écrire leurs lettres aux parties concernées afin qu’ils fassent eux-mêmes entendre leurs voix. En ce sens, nous les aidons à travailler euxmêmes pour éliminer les obstacles à l’accessibilité», explique Pooja Gopee.

Selon cette dernière, de petits ajustements suffiraient à améliorer la situation. Il ne s’agit pas de créer deux accès séparés pour les personnes avec et sans handicap, mais un accès commun qui pourrait être utilisé par tous, poursuit Pooja Gopee.

Nalini Ramasamy abonde dans le même sens. «En construisant un bâtiment public, pourquoi faire une rampe d’accès et un escalier quand tout le monde, avec ou sans handicap physique, peut emprunter une rampe ?»

 

À propos de la Fraternité mauricienne des malades et handicapés

La Fraternité mauricienne des malades et handicapés (FMMH) gère, entre autres services, une école pour des enfants porteurs de handicaps âgés de 5 à 20 ans, ainsi qu’une équipe de basketball sur fauteuils roulants et une salle de gym pour ses membres. Fondée en 1976 par le père Henri Souchon, l’association a vite fait de l’éducation des enfants porteurs de handicap sa principale priorité.

L’objectif de la FMMH est la promotion du bien-être des personnes avec un handicap ainsi que leur intégration dans la société et dans le circuit économique de Maurice. Un gros effort est fait pour permettre aux étudiants suivis par l’association d’accéder à des facilités sportives, récréatives et éducatives au sein de leurs environnements immédiats et respectifs.

L’accessibilité des personnes avec un handicap aux différents services disponibles pour les autres citoyens mauriciens est ainsi un des principaux champs de bataille de la FMMH, notamment la question de l’accessibilité à l’information reproductive et sexuelle pour les jeunes femmes vivant avec un handicap. Avoir accès à ce type d’informations leur permettrait d’être en contrôle de leurs corps et de lutter contre les nombreux abus auxquels elles feraient régulièrement face, soutient Hélène de Cazanove.

Le centre se situe à Grande-Rivière et touche environ 75 bénéficiaires.

La FMMH encourage lea jeunes vivant avec un handicap à s'autonomiser.
Les guichets trop hauts pour des personnes en fauteuils roulant font partie du problème d'accessibilité.
L'éducation des parents d'enfants vivant avec un handicap est aussi à faire.

 


Contacts utiles

<p style="text-align: justify;"><strong>Fraternité Mauricienne des Malades et Handicapés : </strong>210-5012 | 210-7097<br />
	<strong>Inclusion Mauritius :</strong> 467-1711<br />
	<strong>Global Rainbow Foundation : </strong>283-8604</p>

 

Aarthi Burthony: Les infrastructures de la bibliothèque de l’université de Maurice revues

La Global Rainbow Foundation (GRF) travaille actuellement sur un projet d’accès aux étudiants en situation de handicap à la bibliothèque de l’Université de Maurice. En quoi consiste-t-il ?
Il vise à rendre la bibliothèque de l’université accessible aux étudiants en situation de handicap, ce qui n’est actuellement pas le cas. Il a pour but d’éliminer toute forme de discrimination envers nos amis porteurs de handicap afin qu’ils bénéficient des mêmes facilités que celles qui sont offertes aux autres étudiants. Dans ce contexte, la GRF a soumis une demande de fonds à une organisation philanthropique internationale afin de financer ce projet. L’université de Maurice a accepté la proposition de la GRF, qui prend donc en charge tout l’aspect financier et technique, aidée de ses différents partenaires.

Qu’est-ce que cela changera pour les personnes porteuses de handicap qui fréquenteront cet espace ?
L’infrastructure de l’université de Maurice, notamment la bibliothèque qui date de plusieurs années, n’était jusque-là pas adaptée aux personnes en situation de handicap. Par exemple, les escaliers menant au premier étage de la bibliothèque, ne peuvent être empruntés par les étudiants avec un handicap moteur. La première phase du projet consiste à aménager une salle d’études au rez-de-chaussée de la bibliothèque. Dans un deuxième temps, cette salle d’étude sera équipée d’outils technologiques tels que le Eye-Pal Solo qui reproduit les textes imprimés en format audio et une imprimante braille sera installée pour permettre la conversion des livres disponibles en braille. Des tables ajustables seront aménagées pour être à la hauteur des fauteuils roulants des étudiants en situation de handicap physique et ces derniers auront également accès aux livres sur des étagères aménagées à leurs niveaux. Le personnel de la bibliothèque sera formé pour porter assistance aux étudiants avec un handicap en cas de besoin d’évacuation des lieux ou d’autres cas de force majeure. Pour faire court, il s’agira de mettre en place la structure nécessaire afin d’améliorer leurs conditions d’études.

Les normes d’accessibilité dressées sous ce projet suivent celles de l’«Americans with Disabilities Act»… Pourquoi l’«Americans with Disabilities Act» ?
Parce que les dispositions de cette loi donnent aux professionnels de la construction des indications techniques claires sur les moyens de rendre accessible chaque partie d’un bâtiment, notamment les rampes, les ascenseurs, les toilettes… L’on y trouve également des indications sur les modes d’installation de panneaux en braille et en langue des signes. Suivre ces références qui sont conformes aux normes internationales permettra d’assurer une garantie de résultat probant à l’achèvement des travaux.