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Cannabis médical: «Mo invit tou bann ki pé kritiké pran enn sel kouyer sa delwil-la apré kozé»…

16 mai 2018, 19:45

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Cannabis médical: «Mo invit tou bann ki pé kritiké pran enn sel kouyer sa delwil-la apré kozé»…

L’éternel débat sur l’autorisation du cannabis à usage thérapeutique a fait son come-back lors de la Private Notice Question (PNQ) hier. Le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, se base sur des recommandations de l’Organisation mondiale de la santé pour plaider pour les patients souffrant de certaines maladies comme l’épilepsie et le cancer et autres, afin qu’ils aient accès au cannabis médical.

Pour sa part, le Premier ministre, qui ne semble pas très convaincu, soutenant que les tests sont encore à un «baby stage», n’a néanmoins pas clos le chapitre. Il a affirmé qu’il discutera de cela lors d’une prochaine réunion. Pendant ce temps, qu’en pensent les patients concernés ?

L’une, Anshika Sawaram, témoigne. Elle a tenu à parler à visage découvert afin de «rendre publiques les luttes rencontrées par les patients et toucher aussi ceux qui sont figés dans leurs positions, leur faire découvrir l’autre côté».

À 27 ans, Anshika Sawaram, consultante en criminologie actuellement en congé maladie, est une consommatrice de cannabis thérapeutique depuis cinq ans. L’habitante de Chamouny souffre de lupus systémique, une maladie chronique qui survient lorsque le système immunitaire s’attaque aux cellules de l’organisme et les détruit. Mais aussi de la myélite transverse, une maladie neurologique rare, qui se manifeste par une inflammation qui atteint toute la largeur de la moelle épinière, et de la maladie de Raynaud, qui est un trouble de la circulation du sang au niveau des extrémités.

La jeune femme raconte qu’elle est à bout contre un système médical qui lui en a fait voir de toutes les couleurs. Pour elle, oui, il faut autoriser le cannabis à usage médical, tout en reformant le système médical. Il faut, dit-elle, des spécialistes en la matière qui puissent guider les malades et leur prescrire le bon dosage. Mais surtout des médecins qui ont le sens de l’écoute et de l’empathie.

Diagnostic à tort

«Et non des arrogants qui en sus de vous traiter comme un moins que rien, vous font un diagnostic à tort», s’insurge-t-elle. Elle s’en va aussi en guerre contre ces figures publiques qui cultivent le cannabis chez elles à des fins thérapeutiques mais qui, ditelle, ne vont jamais de l’avant pour plaider la cause.

La vie de notre interlocutrice a basculé en 2013. Une semaine après avoir prêté main-forte à la suite les inondations meurtrières du 30 mars, cette activiste du groupe Azir Moris tombe malade. Douleurs aux articulations et à la tête, vomissements, chute de cheveux, elle n’arrive plus à tenir sur ses pieds.

Celle qui faisait 41 kilos en perd 10 dans un premier temps. Aujourd’hui, elle n’arrive pas à dépasser les 30 kilos. Selon elle, à l’hôpital, un médecin la traite d’anorexique, de dépressive. Huit mois plus tard, elle saura vraiment de quoi elle souffre.

Son traitement : 22 comprimés chimiques par jour qui la rendent encore plus malade. Les effets secondaires menant à la dépression s’enchaînent. «Ça a été une période bien sombre de ma vie. Ces médicaments me faisaient m’endormir 18 heures à 20 heures dans une journée alors que je suivais des cours pour un diplôme à l’université deTechnologie.»

À force de tomber malade, de ne plus supporter les longs trajets de Chamouny à Pointe-aux-Sables et de subir des commentaires désagréables, Anshika Sawaram abandonne l’université. Par la suite, lorsqu’elle s’en remet un peu, elle passe aux cours en ligne avec une institution canadienne.

Son salut viendra des groupes internationaux, comme Lupus Canada, Lupus UK, Transverse Myelitis International UK, qui lui font découvrir le cannabis médical. Plus précisément, l’huile de cannabis qui, bien entendu, n’est pas disponible à Maurice.

«Ces groupes comportent des spécialistes et organisent des débats ouverts sur Internet chaque vendredi. J’ai eu le soutien de plusieurs patients qui souffrent des mêmes maladies que moi. Ils ont bénéficié du cannabis médical. J’étais dans une condition tellement critique que j’ai essayé l’huile de cannabis. Personne ne peut me pointer du doigt car je suis la seule à savoir par quoi je suis passée.»

Aucun «Nissa»

Cette huile, elle en achète lors de ses déplacements à l’étranger. «Ça n’a rien à voir avec le cannabis que l’on fume. Pa gagn okenn nisa ladan. Mo invit tou bann ki pé kritiké pran enn sel kouyer sa delwil-la apré kozé», fustige-t-elle.

Au départ, elle l’a caché à ses parents. Ce n’est que lorsque son père a noté une amélioration de sa santé qu’elle a fini par le lui avouer. Elle ajoute qu’elle n’est pas la seule à avoir trouvé un soulagement avec le cannabis médical.

Il y a, dit-elle, cette mère dont l’enfant fait jusqu’à 50 crises d’épilepsie par jour. «Elle ne peut sortir. Son enfant est confiné à la maison. Cette maman doit cultiver du cannabis en cachette comme une criminelle pour soigner son enfant.»

Anshika Sawaram n’est pas dupe. Elle soutient qu’elle ne sera guère étonnée qu’on leur colle une étiquette et les traite de cannabis apologists, lorsque son cas et celui de cette mère seront rendus publics.

«Des politiciens vautours s’en accapareront pour un capital politique. Des consommateurs de cannabis à usage non médical en profiteront à leur avantage. Qui se souciera du véritable besoin de cet enfant et du mien pour qu’on puisse mener une vie normale ?» s’interroge-t-elle. Et de lancer : «Suis-je dans l’illégalité si je choisis du cannabis médical plutôt que des médicaments pharmaceutiques pour mon bien-être afin d’avoir une vie presque normale malgré mes maladies ?»