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Île-aux-Bénitiers : là où le temps s’est arrêté

20 août 2017, 03:00

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Île-aux-Bénitiers : là où le temps s’est arrêté

C’est la destination carte postale. Avant même d’apercevoir l’île, on est bercé par l’eau turquoise de l’océan, dominé par le Morne dans toute sa splendeur. Une étendue de sable blanc, des cocotiers, des filaos... On est à l’île-aux-Bénitiers, où la vie semble s’être arrêtée depuis longtemps.

En cet hiver, l’eau froide n’en est pas moins claire ou attrayante. À l’approche du rivage, on aperçoit un assortiment de huttes et de bâches. Des marchands et autre artisans y ont élu domicile pour gagner leur vie. Une marchande de plage s’approche du bateau. Mariline Legentil ne se veut pas envahissante. Le sourire aux lèvres, elle offre un coco piké décoré de bougainvillée. Elle arbore, elle-même, des fleurs dans les cheveux.

«Cela fait quatre ans que je fais ça», explique-t-elle. Mais il ne faut pas s’en tenir à son sourire depi zorey drwat ziska zorey gos, ce métier n’est pas tout rose. Les marchands ne sont pas en règle et ils le savent. Mais, ils n’ont pas d’autres choix. «Nous n’avons pas d’emploi. Nous avons eu une ouverture ici et nous nous y sommes installés. Nous savons que nous ne sommes pas en règle», soutient la jeune femme. D’ailleurs, les descentes des gardes côtes sont régulières. Et les occupants de ces plages n’y sont pas réfractaires. Ils obtempèrent car ils savent que ce qu’ils font n’est pas légal. Tout ce qu’ils veulent : «Un projet qui améliore les choses ici sans que nous perdions notre gagne-pain», explique Mariline Legentil.

Toilettes en feuilles de palmier

En effet, l’île aux Bénitiers a bien besoin d’un coup de neuf. Les toilettes ? Une petite cellule mise en place avec quelques feuilles de palmier. Pour le barbecue, c’est pareil, on fait avec les moyens du bord. Même les huttes des marchands ont été construites avec le bois obtenu des arbres de l’ile. Leur gagne-pain n’est pas durable. Les occupants de l’ile aux Bénitiers le savent. «C’est soit ça, soit on demande la charité. Ici, on ne dérange personne», plaide un autre marchand de plage.

Surtout qu’une vraie communauté s’est forgée sur cette île. «Mwa mo ti vinn balie balie lor lil. Létan mo vinn là, mo mama perdi so travay dan karo kann. Nou dir ena touris, nou fer enn ti biznes», explique Jessica Toussaint. Cette mère célibataire de trois enfants a besoin de l’argent qu’elle gagne sur l’île.

Mais, surtout, malgré les tracas qui se lisent sur son visage, elle s’y sent épanouie. «C’est extraordinaire ici, sakenn ed so kamarad. Monn al lekol ziska Form IV mwa, kan mo ti vinn isi, mo pa ti konn koz anglé. Isi ki bann lezot inn aprann mwa», explique-t-elle. Avant de se tourner vers une touriste pour lui lancer : «Of course you can take pictures.»

Que pensent les touristes de cet endroit ? «C’est incroyable. C’est tellement authentique», soutient une quadragénaire. Le manque d’esthétique ou encore les toilettes de fortune ne semblent pas les gêner. Pour eux, sur les plages de l’île-aux- Bénitiers, le temps s’est arrêté. Et c’est tant mieux comme ça…