Publicité

Amputé d’une jambe: Mihir Kaitoo, 14 ans, raconte…

26 juillet 2017, 19:45

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Amputé d’une jambe: Mihir Kaitoo, 14 ans, raconte…

Ce qu’il souhaite, c’est un peu d’aide. Non, pas pour lui. «Mo ti anvi dimounn ed mo mama ek mo papa sorti enn tigit dan sa mizer-la.» Lui, c’est Mihir Kaitoo, 14 ans. En 2015, il a été amputé de la jambe gauche. Un camarade de classe lui a tiré dessus… À l’époque, les deux enfants étaient âgés de 11 ans.

Nous nous sommes rendus au domicile des Kaitoo, à Vallée-des-Prêtres. Ils nous ont reçus dans leur salon. Les mots manquent pour décrire la misère dans laquelle vit cette famille dans cette maison qu’elle va bientôt devoir quitter car elle n’en est pas la propriétaire. Premduth et Prema Kaitoo confient que les deux soeurs de Mihir habitent actuellement avec leur grand-mère. Il n’y a rien à mettre dans la marmite ces jours-ci, dit-elle, les larmes aux yeux.

Mihir, étant l’aîné, n’a pas voulu abandonner ses parents. «Li’nn dir pa fer narnyé si péna narnyé pou manzé. Li pa pou kit nou», lâche Premduth.

Lorsque nous l’interrogeons, Mihir accepte de revenir sur le jour où sa vie a basculé. Son accident remonte aux vacances scolaires de 2015. Le 12 novembre, plus précisément. Son père et son oncle, Jean-Francis, étaient, à l’époque, gardiens dans les vergers de letchi, à Calebasses. Ce soir-là, Mihir décide d’accompagner son oncle pour aller retrouver son père.

«Mo pou bez twa enn kout bal»

Un autre enfant de son âge, le neveu du propriétaire des lieux, se trouve aussi dans le verger. Par terre, une carabine laissée sur place après une partie de chasse. L’enfant, qui est un camarade de classe de Mihir, s’en empare et la pointe vers ce dernier. Mihir a le dos tourné et n’entendra que «mo pou bez twa enn kout bal». Lorsqu’il se retourne, il voit son camarade de classe, l’arme à la main. «Je lui ai dit de ne pas plaisanter.» Mais l’enfant mettra ses paroles à exécution…

Mihir s’effondre. Il s’en rappelle comme si c’était hier. Il confie qu’il pensait que son coeur allait exploser. «Mo’nn santi so, pa ti pé kapav respiré. Kan mo’nn pass mo lamé lor mo lipié, mo’nn trouv disan ek mo’nn koumans kriyé, ploré.» Son oncle, qui se trouvait non loin, entend ses cris. «Li ti pansé mo pé badiné mé kan li’nn vini, li’nn trouv mwa pé ploré ek mo lipié pé ségné. Mo’nn dir li mo’nn gagn kout bal.»

Jean-Francis alerte le propriétaire des lieux, lui demandant de conduire Mihir à l’hôpital. Il n’acceptera qu’à une condition : que Mihir n’implique pas son neveu et dise qu’il s’est blessé lors d’un accident de la route. Jean-Francis accepte.

Le garçon est admis à l’unité des soins intensifs. Mais constatant une infection, les médecins effectueront une chirurgie en urgence et extrairont du plomb de la jambe du jeune garçon. L’affaire est rapportée à la police. L’oncle de Mihir et le propriétaire du verger avaient été arrêtés puis relâchés. Depuis, l’affaire suit son cours...

«Li kriyé mwa ‘ta andikapé’ apré li riyé»

Entre-temps, la vie des Kaitoo a été complètement chamboulée. Au début, Mihir se rendait à l’école en taxi. Mais son père Premduth, n’ayant pas d’emploi fixe, n’a pu continuer à payer les Rs 1 500 mensuelles que cela lui coûtait. C’est donc en bus que Mihir se déplace chaque jour pour aller à l’école. Il peut compter sur l’aide de ses amis.

Premduth a également obtenu de l’aide afin que son fils obtienne un fauteuil roulant électrique et une prothèse. Mais, récemment, des voleurs ont fait main basse sur la batterie du fauteuil, un soir dans le ti godam, dans leur cour.

Mais ce qui affecte le plus Mihir, ce sont les moqueries de celui qui lui a fait perdre une jambe. «Li pran plézir ek mwa aster-la. Li kriyé mwa ‘ta andikapé’ apré li riyé. Li boufonn mwa.»

Premduth et Prema disent qu’ils n’ont jamais réclamé le moindre sou au propriétaire du verger. Ce qu’ils souhaitaient, c’est qu’il s’acquitte des frais de la clinique qui avait, à l’époque, dit pouvoir sauver la jambe de leur fils. Le couple explique que dans un premier temps, ils avaient trouvé un accord en ce sens. Mais au moment de débourser pour la chirurgie, le propriétaire du verger s’est désisté. Il n’a d’ailleurs jamais rendu visite à Mihir, bien qu’ils habitent la même localité.

Aujourd’hui, cette famille démunie aimerait pouvoir prendre un nouveau départ. Elle veut compléter la construction de sa maison sur un lopin de terre obtenu en héritage. Mihir, lui, souhaite après ses études, se lancer dans le métier d’«ouvrier aluminium». Ils veulent également trouver de l’aide afin de payer leurs factures d’électricité. Ils ont beaucoup de retard et devront tout régler avant de partir. «Si kouran koupé, Mihir pou ress dan nwar. Kouma li pou fer?»