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Karine Ernest : Il y a le ciel, le soleil, la mer, la jeune fille et son râteau

17 juin 2017, 15:30

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Karine Ernest : Il y a le ciel, le soleil, la mer, la jeune fille et son râteau

Elle porte un short, un top estival. Mais elle n’est pas là pour pique-niquer. Karine Ernest ratisse les plages chaque jour, pour garder sa pirogue à flots, contre vents et marées. Le tout, avec un sourire qui fait de l’ombre au soleil. Larguons les amarres.

Débarquement improvisé. C’est sur la plage de Pointe-aux-Sables que nous accostons la jeune fille de 23 ans, au visage tout rond. La timidité la fait hésiter, elle n’est pas de ceux qui aiment se voir dans les journaux. À ses côtés, son fidèle râteau montre ses dents usées.

Cela fait deux ans et demi que Karine nettoie la plage, de 6 h 30 à 15 heures ou de 9 h 45 à 17 h 30, sept jours sur sept,qu’il vente ou qu’il pleuve. Les ordures, les saletés ramenées par des chiens, des pollueurs errants ou le temps, elle les fait disparaître. Pas le temps d’admirer l’horizon ou de ramasser des coquillages. Ni de se trouver un marin d’eau douce d’ailleurs ; Karine avoue avec un sourire qu’elle n’est pas encore casée.

Et puis, depuis que ses parents sont décédés, elle a appris à manoeuvrer sa petite barque, pour la mener à bon port, confie Karine, qui vit avec sa grand-mère. «Monn kit lékol laz 16 an. Mo ti pé travay lizinn enn lepok, lerla monn gagn sa travay balié-la.» Son porte-monnaie parvient-il à affronter les tempêtes financières en fin de mois ? «Wi, ressi débat. Mo baz saler sé Rs 8 700, ek overtime gagn enn Rs 13 000.»

Temps libre ? Un concept plutôt vague pour Karine, qui n’a qu’un jour de congé par mois. Qu’elle occupe en balayant. «Bizin fer louvraz, netwayé tousala. Mo ress lakaz mem.»

Ce qu’elle souhaite faire plus tard ? Elle ne sait pas vraiment, elle est du genre à vivre au jour le jour, à côté de sa mer et de son râteau, qui lui permet de gagner sa vie bien rangée. «Mo ziss anvi kontigné travay ek gagn mo ti kass.»

À côté, le vent tourbillonne, invitant les feuilles mortes à danser le séga. Du boulot pour Karine. Il est temps de mettre les voiles.