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Dîner annuel de la BoM : les quatre vérités de Ramesh Basant Roi

28 novembre 2016, 22:13

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Dîner annuel de la BoM : les quatre vérités de Ramesh Basant Roi

Il en avait visiblement sur le cœur. «La vérité et toute la vérité doit être dite ouvertement, sans tergiverser et sans crainte d’atteindre la susceptibilité de quiconque.» Lors de la 19e édition du dîner annuel de la Banque centrale, à l’hôtel le Méridien, Pointe-aux-Piments, vendredi, le gouverneur de la Banque de Maurice (BoM) a voulu jouer franc-jeu. Quitte à heurter certains.

Plusieurs thèmes ont ponctué l’intervention de Ramesh Basant Roi, dont l’impact du protectionnisme affiché par les nations naguère grands défenseurs de la globalisation, la compétitivité et la politique du taux de change. Pour le gouverneur de la Banque centrale, la technologie, qui a créé un dynamisme mondial, est un des piliers de l’avenir.

«C’est le monde de la robotique, le monde de la cybernétique. Il est de notre devoir d’abandonner les comportements instinctifs du 20e siècle pour adopter les comportements que requièrent les impératifs du 21e siècle.» Car souligne Ramesh Basant Roi, au vu de la complexité du contexte économique mondial et de l’effritement des systèmes conventionnels, «l’étendue et l’envergure des défis sont loin d’être comparables à ceux des années 80».

Pénurie de compétences

Si le pays ambitionne d’atteindre le niveau de croissance qu’il a connu dans les années 80, il ne peut le faire qu’en exploitant le potentiel de l’exportation des biens et services. «Dans un pays qui est confronté à une pénurie de compétences, le montant moyen des revenus ne peut connaître de hausse sensible que si les exportations des biens et services augmentent.»

D’où la nécessité d’être compétitif, «une évidence que beaucoup parmi nous choisissent d’ignorer». Ramesh Basant Roi de lancer : «lorsque les ressortissants d’un pays estiment que tout le monde peut vivre aux dépens des autres, c’est la preuve que quelque chose ne tourne pas rond dans le mental même de cette population.»

Le gouverneur de la Banque centrale va encore plus loin. «Elle est déplorable l’attitude qui consiste à transposer la responsabilité individuelle sur la responsabilité sociale.» D’expliquer que le gouvernement ne peut se permettre de recourir en permanence aux facilités fiscales.

«Notre principale ressource, c’est notre capital humain. Aucune société n’est en mesure de faire face à la concurrence si son capital humain est inadapté et limité.» Et pour Ramesh Basant Roi, ce handicap peut être contourné en allant chercher les ressources humaines là où elles sont disponibles.

D’autre part, le gouverneur n’a pas manqué d’égratigner ceux qui mettent tous les maux affectant l’économie sur le compte du taux de change de la roupie. «Qu’en est-il des augmentations périodiquement des gages et des salaires qui ne sont pas en rapport avec une hausse de la productivité ? Ces approches n’ont-elles pas d’impact sur le taux de change de la roupie ?»

Taux de change

Pour Ramesh Basant Roi, le mécanisme menant à la compensation salariale doit être «éliminé». Système, rappelle-t-il, qui «dépendait de la détermination administrative du taux de change de la roupie par la banque sur une base quotidienne du temps où le taux de change était sous contrôle».

Ce n’est pas tout. «Je suis pleinement conscient que celui qui souhaite augmenter son capital d’estime social devrait s’abstenir de mentionner cet arrangement administratif pour déterminer le montant de la hausse des salaires et des gages.» Lui estime qu’il faudrait une nouvelle formule basée sur les conditions économiques. «Le problème est que nous voulons manger le gâteau et l’avoir en même temps.»

Certes, poursuit Ramesh Basant Roi, le taux de change de la roupie a un rôle non négligeable dans la consolidation du niveau de compétitivité. «Pendant un certain temps, nous avions une roupie forte. Le flux sur le marché des capitaux et dans d’autres secteurs de l’économie a contribué à l’appréciation tant du taux de change de la roupie que du cours des titres. Cela a, en retour, attiré plus d’investisseurs. Ce qui a contribué à octroyer à la roupie une valeur bien au-delà de sa juste valeur.»

En fait, souligne le gouverneur de la BoM, le déficit du Budget national sur une longue période reflète le degré de déviation de la roupie de sa juste valeur. «Un taux de change surévalué encourage la consommation, particulièrement des produits importés et constitue un facteur déflationniste en ce qui concerne l’économie nationale.» Une telle situation contribue à ronger le niveau de compétitivité de la filière des exportations.

«En ce qui nous concerne, c’est une situation qui a empiré par le recours à un système de détermination des salaires et des gages dépassé et qui s’effectue dans l’ignorance de l’état de santé de l’économie nationale.»