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Mireille Martin ministre de l’Egalité des genres : « Pourquoi Aurore Perraud m’a poignardée »

24 novembre 2013, 14:58

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Mireille Martin ministre de l’Egalité des genres : « Pourquoi  Aurore Perraud m’a poignardée »

Dire que « Mireille la rouge » a peu goûté la saillie d’« Aurore la bleue » est un euphémisme. Cela fait des années que la crise couve entre les deux « collègues » du gouvernement et de Port-Louis/Montagne-Longue. Mais au fait, c’est quoi le malaise ? La ministre travailliste donne sa version....qui réquisitionne la psychanalyse.

 
Vous paraissez tendue comme une arbalète…
Je n’aime pas donner d’interview, je suis plus à l’aise en conférence de presse.
 
Pourquoi avez-vous accepté cette interview ?
Pour rétablir quelques vérités.
 
Une devinette vous détendrait ?
Peut-être…
 
Mireille Martin, Aurore Perraud et Stéphanie Anquetil sont sur un bateau. Mireille Martin tombe à l’eau. Qui l’a poussée ?
Peu importe puisque Mireille Martin sait nager ! (rires)
 
La semaine dernière, Aurore Perraud a dit au Parlement tout le mal qu’elle pensait de vous...
Cette sortie m’a fait très mal (émue)...
 
En gros, elle vous accuse de bloquer la construction d’un centre de jeunesse à Cité-La-Cure...
Mme Perraud a trahi les faits. Mais surtout, son intervention était très calculée, organisée même. Alors qu’elle aurait pu venir me parler, elle a choisi de me poignarder en public. J’ai eu l’impression de tomber dans un guet-apens. Juste avant qu’elle ne prenne la parole, une vingtaine d’habitants de Cité-La-Cure sont entrés dans l’hémicycle. Elle les avait invités. Or ces gens-là n’ont entendu que sa version, ils ne sont pas restés pour écouter ma réponse. J’ai été piégée. Mme Perraud a clairement agi pour me nuire, tout cela était prémédité, c’est ce qui m’a fait le plus mal. J’ai eu la sensation de me faire poignarder en plein ventre.
 
N’avez-vous pas, vousmême, poignardé son projet ?
Absolument pas ! Premièrement, ce centre de jeunesse n’est pas le projet d’Aurore Perraud mais celui du gouvernement. Elle n’a toujours pas compris que dans une alliance, le « on » a préséance sur le « je ». Deuxièmement, il faudrait que je sois complétement folle pour torpiller un projet dans ma propre circonscription [n°4, Port-Louis/Montagne-Longue, ndlr]. Ce serait un suicide politique.
 
N’empêche que ledit projet n’avance pas...
C’est faux.
 
Aurore Perraud, dans son intervention, a pris à témoin le ministre de la Jeunesse et des Sports, qui lui aurait dit que « rien n’a été fait ». Qui ment ?
Devinez… J’ai parlé avec Devanand Ritoo. Effectivement, son ministère attend une lettre du mien. Mais il n’a jamais dit, comme Mme Perraud essaie de le faire croire, que le projet est au point mort. Le mois dernier, il m’a même reçue dans son bureau pour en parler ! Laissez-moi vous expliquer comment ça s’est passé. D’abord, un terrain a été choisi. Il se trouve que ce terrain appartient à mon ministère et que nous n’avons aucun projet dessus dans l’immédiat. J’ai donc été voir le ministre Ritoo pour lui dire que je n’avais aucun problème à lui céder ce terrain. Il m’a remerciée et nous sommes tombés d’accord pour travailler ensemble. Mais cela ne veut pas dire que Cité-La-Cure aura son centre de jeunesse demain, ça peut prendre un an ou deux. Question : que fait-on en attendant ? Le contentieux avec Aurore Perraud est là.
 
C’est-à-dire ?
J’ai décidé de restructurer le community centre de Cité-La-Cure pour qu’il puisse servir aussi de youth centre. Cette décision prendra effet dès le mois prochain. C’est un aménagement temporaire en attendant que Cité-La-Cure ait son propre youth centre. L’avantage, c’est que les jeunes du quartier n’auront plus besoin de se déplacer jusqu’au youth centre de Roche-Bois pour avoir accès aux activités du ministère de la Jeunesse et des Sports. C’est une solution pratique et, je le répète, transitoire. Mme Perraud en a fait un psychodrame. Elle y a vu un stratagème de ma part pour faire capoter le projet. C’est une constante chez elle, elle aime se poser en victime, elle ne fait même que cela depuis qu’elle est parlementaire. Comptez le nombre de réalisations concrètes de Mme Perraud et comparez- le au nombre de fois où elle a fait parler d’elle pour des pleurnicheries.  Elle se sent persécutée en permanence.
 
Les tensions entre vous ne datent pas d’hier. Le fond du problème, c’est quoi ?
(Longue expiration) En politique, vous avez deux catégories de personnes : celles qui pensent « équipe » et celles qui pensent « moi d’abord ». Le fond du problème, c’est l’ego de Mme Perraud. Je ne sais pas s’il est surdimensionné ou sous-dimensionné, si elle souffre d’un complexe de supériorité ou d’infériorité, je sais en revanche que c’est très compliqué de travailler avec elle. Et dire que j’ai tout fait pour qu’elle devienne députée… On se connaît depuis l’adolescence, nous fréquentions le même collège [le BPS, à Beau-Bassin, ndlr], j’ai même été sa prefect. En 2010, pendant la campagne, elle était en difficulté. C’est tout naturellement que je lui ai tendu la main. Bref, je n’ai pas envie de revenir là-dessus, ni de perdre mon temps à psychanalyser Aurore Perraud, j’ai d’autres chats à fouetter. Notamment un travail qui me prend 16 heures par jour. Rien que sur le volet enfance, mon ministère doit gérer, chaque semaine, une centaine de cas de maltraitance. Vous pensez bien que les problèmes d’ego d’Aurore Perraud passent après.
 
Là c’est vous qui faites une fixation…
Pas moi seulement. Lancez Abu Kassenally ou Kalyanee Juggoo sur le sujet, vous verrez… Mme Perraud, quand vous discutez avec elle, elle est d’accord sur tout. Le lendemain, vous découvrez dans la presse qu’elle ne l’est plus du tout. C’est une championne du double langage. Quand j’ai été nommée ministre, je l’ai appelée pour désamorcer les tensions. Elle était là, assise à votre place. On s’est dit que nous faisions partie de la même équipe et qu’il fallait travailler en bonne entente pour le bien-être de la circonscription. Elle était d’accord, mais très vite, elle ne l’était plus. Il faut croire que je n’ai pas de chance avec mes colistières. Que voulez-vous, c’est comme la famille, on ne choisit pas...
 
C’est vrai qu’avec Kalyanee Juggoo, ça n’a jamais été le grand amour non plus…
Ça s’améliore, heureusement. Vous noterez que je n’ai jamais tiré la première. Je ne me trompe pas d’adversaire, moi.
 
Stéphanie Anquetil, votre deuxième « meilleure copine » du moment, se trompe-t-elle d’adversaire ?
Non, Stéphanie ne m’a pas poignardée, elle s’est contentée de soulever une préoccupation de ses mandants, ce qui est tout à fait normal. [Deux jours avant Aurore Perraud, la députée travailliste Stéphanie Anquetil s’est fendue d’une sortie au Parlement pour dénoncer « le long retard » autour d’un projet de centre communautaire à la Mairée, égratignant au passage le ministère de l’Egalité des genres, ndlr].
 
Elle vous a quand même gentiment menacée de « revenir à la charge avec une question parlementaire ».
Qu’elle le fasse, je répondrai avec plaisir ! Après son intervention, nous nous sommes parlé. Elle m’a dit : « Mireille, j’espère que tu ne le prends pas personnellement, je me fais juste l’écho des habitants de ma région. » Je comprends parfaitement, c’est son travail. Pour moi, l’incident est clos.
 
Il le sera quand on saura pourquoi vous traînez des pieds sur ce projet.
(Agacée) Vous êtes vraiment insupportable…
 
C’est gentil mais ça ne répond pas à la question.
Mais enfin, je ne peux pas aller plus vite que les procédures ! Quand un ministère cherche à louer un bâtiment pour y installer un centre communautaire, il y a des règles et figurez-vous que je compte les suivre.
 
Une réponse très langue de bois…
Trois appels d’offres ont été lancés pour trouver un bâtiment, ça n’a rien donné. Que voulez-vous que j’y fasse ? Je n’allais quand même pas installer un centre communautaire dans un cagibi ! En janvier, nous lancerons un nouvel appel d’offres. S’il est infructueux, on abandonnera l’idée d’une location pour privilégier une construction, mais ce sera plus long. C’est ce que l’on voulait éviter.
 
Dans votre réponse au Parlement, vous avez eu cette phrase : « Je note que la demande de l’honorable Anquetil est appuyée par les membres de l’opposition ». Et donc ?
L’opposition fait feu de tout bois en ce moment. Le moindre signe de friction au sein de la majorité est surexploité. J’aimerais que l’on se serre les coudes au lieu de donner du grain à moudre à nos adversaires.
 
Résumons. Deux de vos collègues de la majorité se plaignent publiquement de vous. N’est-il pas temps de vous remettre en question ?
C’est-à-dire ?
 
Vous avez très bien compris.
Je fais mon mea culpa quand il y a lieu de le faire. En l’occurrence, ce n’est pas le cas.
 
Si Aurore Perraud vous présentait des excuses, les accepteriez-vous ?
Question suivante…
 
Si Mme Perraud vous présentait des excuses, les accepteriez- vous ?
La balle est partie, c’est trop tard pour des excuses.
 
 Pourquoi cristallisez-vous autant d’animosité féminine ?
Qu’est-ce qui vous fait dire cela ?
 
Pas moins de sept députées vous sont littéralement tombées dessus ces derniers jours. Toutes des femmes...
Pie ki raporte gagn kout ros, comme on dit.
 
Vous pensez rapporter quoi, ces temps-ci, à part l’antipathie de vos collègues ?
J’ai un patron, le Premier ministre. Ce patron ne s’est jamais plaint de mon travail. Au contraire, il souligne mon sérieux et m’encourage à faire encore mieux. A partir de là, je me contrefiche de ce que pensent les autres.
 
Elle va durer combien de temps cette guéguerre entre la transfuge gâtée et les zanfan lakaz frustrés ?
Je ne suis en guerre contre personne. Dans une équipe, des frustrés, il y en a toujours. Le baseline, c’est que nous avons un patron. C’est lui qui choisit les ministres. Les frustrés n’ont qu’à aller se plaindre au patron.
 
N’empêche qu’à ce rythme, vous devrez rapidement trouver un autre job. Présentatrice du JT de la première TV privée, ça vous dirait ?
(Rire)
J’estime qu’il est bien trop tôt pour penser à ma reconversion ! [Une reconversion qui n’en serait pas une puisqu’elle a présenté durant quatre ans le JT de la MBC, ndlr]
 
Etes-vous favorable à des actualités sur une télé privée ?
Oui. Je pense que ce serait sain, mais pas tout de suite, il faut y aller par étapes. Quand on entend le niveau de désinformation qu’atteignent parfois les radios privées, ça refroidit.
 
Et le monopole de la MBC sur l’info télévisée, ça vous refroidit ?
Euh… joker.
 
Si vous croisez Aurore Perraud, vous lui sautez à la gorge ?
Certainement pas. Mon ministère lutte contre la violence envers les femmes…
 
Etes-vous mûre pour une réconciliation ?
Non. Il faut être deux pour ces choses-là. Aurore Perraud, à mon avis, ne le souhaite pas.
 
Appelons-la pour vérifier.
(Surprise) Vous faites quoi, là ?
 
Je lui téléphone et je vous la passe...
Elle refusera de me parler…
 
Chut, ça sonne.
C’est déjà arrivé, vous savez, qu’elle refuse de prendre mon appel…
 
Ses deux numéros ne répondent pas, dommage….
(Agacée) Ça suffit, je veux parler du travail de mon ministère.
 
On en reparle quand vous aurez réussi à faire avancer un projet ?
En fait, vous n’êtes pas insupportable. Vous êtes....non je préfère me taire.
 
 
« Comptez le nombre de ses réalisations concrètes et comparez-le au nombre de fois où elle a fait parler d’elle pour des pleurnicheries..  Elle se sent persécutée en permanence. »
 
« Dans une équipe, des frustrés, il y en a toujours. Le baseline, c’est que nous avons un patron. C’est lui qui choisit les ministres. Les frustrés n’ont qu’à aller se plaindre au patron. »