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Traité fiscal avec l'Inde: ce qui change

12 mai 2016, 22:30

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Traité fiscal avec l'Inde: ce qui change

Le traité fiscal avec l’Inde  a été signé sous de nouvelles conditions, le mardi 10 mai. Qu’est-ce qui change? Explications. 

CAPITAL GAINS TAX : L’INDE POURRA TAXER LES PLUS-VALUES

Avant : Dans son ancienne version, le traité fiscal permettait à Maurice de ne pas appliquer de taxe sur l’investissement (Capital Gains Tax), une prérogative qu’elle a pendant longtemps utilisée afin de tirer profit du traité fiscal.

Après : L’Inde pourra désormais imposer une taxe sur les investissements transitant par Maurice pour atterrir en Inde. Idem pour Maurice. Et ce, à hauteur de 50% de nos taux d’imposition domestique respectifs, à partir du 1er avril 2017. Condition sine qua non: que les sociétés répondent aux critères de la clause limitation of benefits. Par la suite, à partir de 2019, Maurice n’aura plus le droit de taxer alors que l’Inde disposera des droits d’imposition à 100%.

LA LIMITATION OF BENEFITS RENFORCÉE

Avant : Les sociétés indiennes souhaitant ouvrir une filiale à Maurice n’avaient pas d’obligation légale de prouver des dépenses administratives et des activités physiques.

Après : Elles devront désormais démontrer qu’elles ont des dépenses administratives de Rs 1,5 million par an après une année d’incorporation à Maurice pour pouvoir bénéficier des avantages fiscaux du traité. Si elles n’y parviennent pas, les investissements seront taxés à 100% dans leur pays d’origine, c’est-à-dire l’Inde.

LES INTÉRÊTS PERÇUS PAR LES MAURITIAN-BASED BANKS IMPOSABLES  EN INDE

Avant : Jusqu’ici, l’Inde ne taxait pas les intérêts sur les prêts contractés auprès des banques internationales à Maurice.

Après : Sous le nouveau protocole fiscal, il y a une nouvelle taxe de 7,5% imposée sur les intérêts de remboursement.

L’ÉCHANGE D’INFORMATIONS BASÉ SUR LES NORMES INTERNATIONALES

Avant : La méthode des échanges d’informations était décidée entre nos deux pays.

Après : L’échange d’informations devra désormais se faire suivant les normes et standards internationaux.

TRADE–OFF OU PAS ?

Vue aérienne d'Ebène Heritage City @FLYING FREAKS

Est-ce un échange que le gouvernement indien a imposé aux autorités mauriciennes avec les amendements apportés au traité fiscal Inde-Maurice? Roshi Bhadain, qui a été l’envoyé spécial du Premier ministre à New Delhi, le mois dernier, le nie. Mais les spécialistes du secteur semblent privilégier cette option.

Lors de son point de presse de mardi, le ministre des Services financiers n’a pas parlé de compensation, mais de donations de Rs 12,7 milliards accordées à Maurice. S’il faut dresser un parallèle, c’est identique à l’enveloppe financière que l’Union européenne avait octroyée à Maurice en 2006 pour réformer son industrie sucrière. Plusieurs projets bénéficieront de ce financement indien. À commencer par Heritage City (Rs 3,7 milliards), Financial City (Rs 3,6 milliards), Convention Centre (Rs 1,8 milliard) et un nouveau projet qui sera annoncé le 6 juin lors du Budget, par le Premier ministre, au coût de Rs 3,6 milliards.

LE GLOBAL BUSINESS : GRAND POURVOYEUR D’EMPLOIS

À en croire plusieurs acteurs du secteur offshore, le secteur du global business est sans nul doute l’un des domaines qui se trouvent parmi les plus grands pourvoyeurs d’emplois à Maurice. Et pour cause, en termes d’emplois directs, l’on retrouve les gestionnaires de fonds, les actuaires qui se chargent de faire les financial forecasts, des fund administrators ou encore des analystes financiers, pour n’en citer que quelques-uns. Il faut ajouter à cela des postes dans l’administration, des clerical jobs ou encore des conseils légaux.

Parmi les emplois indirects, l’on peut compter les services de transports et de catering, entre autres. Fait important: le secteur du global business emploie beaucoup de jeunes, notamment des jeunes diplômés en management, en comptabilité et en finance. Citant un rapport du Fonds monétaire international en 2003, la firme Global Finance dans son Country Report sur Maurice pour 2014 a fait ressortir que le secteur des services offshore a contribué à créer des «high value added jobs». À ce jour, le secteur compte environ 5 000 emplois directs. Le nombre d’emplois indirects pourrait être le double.

ZOOM SUR UNE SOCIÉTÉ DU GLOBAL BUSINESS

Depuis le renouvellement du traité fiscal avec l’Inde, les sociétés du global business sont plus que jamais sous les feux des projecteurs. Mais qui sont-elles exactement et comment fonctionnent-elles? Zoom sur l’une des plus grosses d’entre elles: International Financial Services (IFS).

Fondée par Couldip Basanta Lala et Dev Joory, et dont le Chairman est Rama Sithanen, IFS fait partie des pionniers dans le secteur du global business à Maurice. Avec plus d’une vingtaine d’années d’expérience dans le domaine, la société compte à ce jour environ 200 employés. D’autre part, elle détient plus de 87 milliards de dollars d’actifs sous administration, a contribué à créer plus de 1 000 entités financières internationales et gère pas moins de 140 fonds internationaux (global funds). Une société spécialisée dans le global business telle qu’IFS se spécialise notamment dans la création de sociétés offshore comme les fonds internationaux et les trusts, entre autres. Comme plusieurs des grosses sociétés du global business qui opèrent à Maurice, les activités d’IFS sont principalement rivées au marché indien.

GAAR VS DTAA

Si Maurice n’avait pas signé le DTAA amendé mardi, le global business aurait été régulé par la loi domestique indienne GAAR. Elle doit entrer en vigueur l’an prochain. Voici les différences entre les deux règlements.

GAAR

  • Une loi domestique susceptible d’avoir préséance sur les dispositions du traité de non double imposition.
  • Elle devrait être introduite en avril 2017.
  • Elle fait amplement provision pour la protection et la préservation des droits acquis par rapport aux projets d’investissement existants. Cette provision a été recommandée par le Shome Committee et le Parliamentary Standing Committee indiens. Ce qui a été confirmé par le ministre indien des Finances, Arun Jaitley, dans son dernier Budget, l’année dernière.
  • Maurice aurait retenu les droits taxables sur les Capital Gains.
  • Maurice aurait été sujette au Bona fide Business et Main Purpose Test en retenant les droits taxables sur la Capital Gains Tax (taxe imposée sur la plus-value).
  • Elle prévoit la clause Most Favoured Nation qui a pour objectif de protéger Maurice contre les pratiques discriminatoires.
  • Un partage de droits taxables sur le Capital Gains Tax à travers la limitation of benefits (LoB), une clause qui impose une obligation de substance économique aux investisseurs potentiels. Les compagnies qui vont adopter la LoB seront taxées sur les Capital Gains à Maurice même alors que celles qui ne vont pas satisfaire les dispositions de la LoB devront alors payer la Capital Gains Tax en Inde pour être en mesure de disposer de leurs actions et de leurs actifs selon les règles établies.

DTAA

  • Le nouveau protocole en vue d’amender le traité avec l’Inde a été signé le 10 mai 2016.
  • Cette version amendée, qui inclut le transfert des droits taxables, entre en vigueur le 1er avril 2017.
  • Maurice a abandonné ses droits taxables établis dans le cadre de l’article 13 portant sur la plus-value sur les investissements.
  • Maurice a accepté l’imposition de 7,5 % d’impôt sur les intérêts bancaires retenue à la source à partir du 1er avril 2017.
  • Aucune mention de la clause Most Favoured Nation en vue de protéger Maurice contre des pratiques discriminatoires.
  • L’Inde imposera une taxe de 50 % sur la Capital Gains Tax si une opération de vente d’actifs survient au plus tard le 31 mars 2017.
  • La version amendée du traité donne aux entités une période de transition de deux ans pour obtenir des fonds, pour investir et partir. Il est prévu qu’il va y avoir un flux d’investissements durant la période de transition.
  • Si un opérateur ne respecte pas les dispositions de la clause LoB, et ne démontre pas que les dépenses administratives encourues ont atteint les Rs 1,5 million, la Capital Gains Tax sera alors appliquée à 100 %.
  • Le protocole évite que Maurice soit sujet à l’application à son encontre d’une Notice of Termination of Treaty qui mettrait définitivement un terme au traité.

Lexique

> DTAA: DOUBLE TAXATION AVOIDANCE AGREEMENT

C’est un traité de non double imposition fiscale entre deux pays qui vise à éviter une double imposition à des entreprises. Depuis l’année dernière, le gouvernement mauricien était en phase de négociations avec le gouvernement indien pour le renouvellement du traité. Un nouvel accord a finalement été signé le 10 mai.

> GAAR: GENERAL ANTI AVOIDANCE RULES

Les GAAR constituent un ensemble de mesures basées sur la législation nationale pour autoriser le fisc indien à sévir contre les investisseurs soupçonnés d’utiliser les dispositions du traité pour ne pas payer l’impôt dû au gouvernement indien. Ce qui donnerait alors à ce dispositif fiscal une préséance sur le traité.

> LIMITATION OF BENEFITS

Article du traité amendé qui vise à combattre les investisseurs qui utilisent Maurice comme boîte postale sans aucune intention de s’implanter physiquement.

> MAIN PURPOSE TEST

Il permet de vérifier si l’objectif premier d’un investisseur n’est pas lié à une opération d’évasion fiscale.

> BONA FIDE BUSINESS

Mécanisme de contrôle dont le but est de mettre à l’épreuve la bonne foi des investisseurs qui auraient manifesté sur papier leur intention de s’installer à Maurice.

> CAPITAL GAINS TAX

La Capital Gains Tax est une taxe imposée sur la plus-value. Dans le cadre du traité de non double imposition fiscale Maurice-Inde, Maurice a choisi de ne pas appliquer de Capital Gains Tax aux filiales des sociétés indiennes basées à Maurice.