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Jayen Chellum: «Etre à l’écoute du consommateur»

8 novembre 2013, 09:14

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Jayen Chellum: «Etre à l’écoute du consommateur»

Les consommateurs mauriciens sont plutôt livrés à eux-mêmes. Les organisations qui les défendent, telle l’Association des Consommateurs de l’île Maurice (ACIM), essaient tant bien que mal de faire entendre leurs voix. Les autorités et les opérateurs économiques, bénéficiant d’un marché ouvert, imposent des règles qui ne tiennent pas toujours en compte les intérêts des consommateurs. Le budget 2014 leur offrira-t-il une plate-forme d’écoute à ces consommateurs? Jayen Chellum, secrétaire général de l’ACIM, se montre plutôt sceptique.

 

Il faut dire qu’à l’image des syndicats, les associations des consommateurs sont appelées à faire leur mue. Une transformation qui n’est pas toujours bien comprise. D’organisation de revendication et de protection des intérêts des citoyens, ces organisations deviennent peu à peu un porte-voix citoyen. On intervient moins dans une lutte pour équilibrer le rapport de force entre le marché et le consommateur. On s’attaque davantage aux politiques générales.

 

Comprendre le consommateur

 

Mais il est des faits qui demeurent incontournables. «Si nous tentons de cerner les consommateurs avec des visières, nous nous dirons que leurs intérêts sont pris en compte dans certaines taxes en hausse ou à la baisse, voire dans les coûts de certains services et produits…. Si nous tentons de comprendre le consommateur de manière plus globale, il est clair que leurs intérêts se retrouvent, directement ou indirectement, dans toutes les parties du budget. Le consommateur est un citoyen qui non seulement achète un produit mais qui fait aussi l’expérience des services qui sont mis à sa disposition, qu’ils soient payants ou non», explique Jayen Chellum. Il y a, en ce sens, tout un travail à faire pour éclairer le consommateur. Le responsabiliser. Le confronter à la réalité du surendettement. Mais aussi de lui présenter les faits tels qu’ils sont afin qu’il ne devient pas un simple outil de consommation.

 

Il lui faut, à cet effet, le piège qui le verra s’engouffrer dans des politiques labyrinthiques sans garder sa clairvoyance. Chaque gouvernement tente ainsi d’effacer les instruments de lecture critique. «L’orientation politique de ce gouvernement a été initiée en 2006. Elle favorise le secteur privé qui est appelée à créer de l’emploi. Lorsqu’il ne parvient pas à le faire, la responsabilité en incombe au secteur public qui se voit ainsi engagé dans de gros projets dont le pays n’a pas nécessairement besoin ou qui ne sont pas prioritaires. Donc le gouvernement est contraint à donner une orientation sociale à son action que ce soit en termes de la création de logements, de la gestion du pouvoir d’achat, du contrôle des prix», estime le secrétaire général de l’ACIM.

 

C’est de cette manière que des processus semblent devenir irréversibles. Du moins, telle est la perception. Notamment celle qui veut que l’écart entre les riches et les pauvres ne cessent de s’agrandir alors que la classe moyenne se diluerait dans une zone marginalisée. «Pour ceux qui ne paient pas la taxe, soit ceux au bas de l’échelle, on constate avec le Household Budget Survey qu’il y a eu une hausse de la pauvreté à Maurice. Les 20% des nantis perçoivent quelque 45% des revenus contre quelque 5.5% des revenus à ceux qui sont au plus bas», tempère Jayen Chellum. Cela démontre que la politique adoptée vis-à-vis des classes défavorisées n’a pas porté, à son avis, ses fruits car le fossé devient insurmontable.

 

Démocratisation ou distribution?

 

Un état des choses qui amènerait le gouvernement à développer des politiques sociales parallèles. Le gouvernement pensait pouvoir contourner le problème en introduisant la Corporate Social Responsability (CSR). «Le gouvernement a profité de l’introduction du CSR pour démissionner de ses responsabilités. Un exemple: dans le cas du logement social, lorsqu’une compagnie a dit qu’il voulait donner un terrain de telle dimension pour un logement social, il y a eu une pression du ministère des Finances pour réduire la taille du terrain», avance Jayen Chellum.

 

La question de la dignité humaine d’une famille vivant dans un logement social, insiste le secrétaire général de l’ACIM, n’est pas prise en compte. De la même manière, on exploite le patrimoine national pour en faire profiter ceux qui sont proches du pouvoir. Sous couvert de démocratisation de l’économie, on fait également le bonheur de ses partisans. Cela veut dire que la corruption n’est pas à la baisse. Le rapport de l’Audit le prouve d’ailleurs.

 

Pour conclure, Jayen Chellum soutient qu’il faut un comité de surveillance visant ceux opérant dans le commerce et dans les services. L’observatoire des prix a montré ses limites. «Le gouvernement doit freiner ceux qui veulent faire des profits exagérés», tonne notre interlocuteur. Chacun est, cependant, dans ses droits et œuvre selon ses objectifs. Les meilleures affaires pour les consommateurs. Le plus de profit pour les opérateurs. L’équation, dans un tel cas de figure, n’est pas facile à trouver.