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Affaire de cuivre de Mauritius Telecom: est-elle liée au scandale de «sniffing» ?

29 mai 2023, 09:00

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Affaire de cuivre de Mauritius Telecom: est-elle liée au scandale de «sniffing» ?

La «Special Striking Team» (SST) s’est transformée en unité spécialisée en… tout. Alors que l’on parle de trafic de cuivre, les «suspects» sont presque tous accusés de blanchiment d’argent. Ou mieux, de complot pour le même délit.

Est-ce FTI Consulting ou d’autres enquêtes internes à Mauritius Telecom (MT) qui aurai(en)t révélé d’éventuelles maldonnes dans la vente de cuivre ? Y a-t-il eu plainte déposée à la police par MT ? Personne ne le sait. En tout cas, la SST est sur tous les fronts et ses interpellations sont grandement médiatisées. Après le trafic de drogue, c’est le trafic de cuivre qui la passionne. Le scandale de la vente de cuivre, s’il y en a un, a pourtant été révélé dès 2019. Pourquoi la police ne s’y intéresset-elle que maintenant ? Si c’était la révélation du scandale de sniffing qui aurait déclenché cette chasse aux sorcières ?

Le scandale de «sniffing» aurait-il déclenché toutes ces enquêtes,
donc sur l’implication de Sherry Singh dans la vente de cuivre de MT ?

Il y a quelques semaines, on a appris que la SST s’est dotée de sa propre cellule d’enquêteurs. Depuis, plus besoin pour elle ou pour un commanditaire de passer par les procédures habituelles et les unités spécialisées de la police pour engager une enquête, interpeller des «suspects», les interroger, les inculper provisoirement et les arrêter éventuellement. Cependant, avant de procéder à ces deux dernières étapes, la police doit, ou devrait plutôt, consulter le Directeur des poursuites publiques (DPP). Ce qu’elle omet parfois de faire. Le DPP a d’ailleurs eu l’occasion, le 23 mai, de le rappeler à la police lors de la radiation de la charge de «perverting the course of justice» à l’encontre de Rama Valayden. «Consultez le DPP avant d’inculper provisoirement !», a-t-il vivement conseillé. Probablement pour ne pas perdre de temps et des ressources, mais aussi, et surtout, pour ne pas procéder à des arrestations et détenir des «suspects» inutilement.

Perquisition musclée

Le cas de ce businessman indien, Nilesh P., est des plus troublants. Il était sur la liste des personnes à «interroger» par la SST dans l’affaire de la vente de cuivre, on ne sait pourquoi. Toujours est-il que Nilesh P. n’était pas chez lui à Quatre-Bornes, le vendredi 19 mai, lorsque des membres de la SST y ont débarqué sans crier gare. Le gardien aurait été malmené et aurait été obligé de les laisser pénétrer dans la demeure de l’Indien. Une perquisition aurait eu lieu en l’absence de l’occupant de la maison, qui serait actuellement en Inde. On ne sait pas si la SST avait un mandat de perquisition et, si oui, qui l’a signé. On ne sait pas non plus si des objets compromettants, justifiant la perquisition, ont été retrouvés ou pas.

«Certains avocats accompagnant leur client ont peur de se rendre seuls à la SST.» 

Avec France Santharum, le haut cadre de MT, c’était différent. Interpellé et interrogé pendant sept heures, il a été arrêté, dit-on, car ses réponses étaient incohérentes. On apprend qu’en fait, Santharum, qui a étudié le droit, ne voulait pas se laisser faire. Ce qui aurait énervé les flics. Le haut cadre de MT n’était pas assisté d’un homme de loi ni de celui de MT car il n’en a pas eu le temps, ayant été, selon notre source, presque enlevé de son bureau. Il est toujours en détention. Un autre employé de MT vient d’être également interpellé. Sa maison a été perquisitionnée. Pourtant, il avait été interrogé par les inspecteurs de la firme américaine FTI, par les auditeurs internes de MT et même par l’ICAC. «Maintenant, c’est la SST», nous dit un de ses proches.

Après FTI, les auditeurs internes de MT et l’ICAC, c’est au tour de la SST de mener une enquête

«Fishing for evidence»

Le fond de l’affaire de la vente de cuivre est assez flou. On reproche à Sherry Singh d’avoir vendu les câbles en cuivre, enlevés par MT à un prix plus bas que celui d’autres offrants. On a également entendu parler d’erreur sur la quantité : 7 000 tonnes déclarées, au lieu de 50 000 tonnes, alors que l’on avait parlé dans le passé de 300 000 tonnes! On ne sait pas quel chiffre est le bon. Dans sa plainte contre Top FM, MT maintient qu’il n’y en avait que 7 000 tonnes : «The Plaintiff’s network consists merely of 7,000 tonnes of copper, as opposed to 300,000 tonnes as wrongly alleged by the Defendants.» On reproche également à Sherry Singh (ou MT, on ne le sait) d’avoir vendu aux fonderies et pas aux exportateurs qui allaient payer plus cher…

Peur sur la ville

Les descentes, interpellations musclées et arrestations par la SST ont fini par créer une véritable psychose parmi la population, surtout les opposants au régime. Mais il n’y a pas qu’eux. Un avocat nous fait part de la peur exprimée par un membre de la Human Rights Commission de se faire piéger par l’équipe de la SST. «Si même ceux qui sont censés veiller à ce que les droits des citoyens soient respectés face à la police sont effrayés, je vous laisse deviner le sentiment du Mauricien lambda. Je vous rappelle que ces officiels savent beaucoup plus de choses que vous et moi.» On apprend, dans la foulée, que certains avocats accompagnant leur client ont peur de se rendre seuls à la SST. «Ils cherchent toujours un confrère lorsqu’il faut affronter cette équipe.» En plus de la SST, voilà que le National Security Service se renforce. Selon Rama Valayden, le nombre de ses membres est passé à 300, en trois mois. «15 par circonscription…»