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Lettre «anonyme» de Ken Arian: Et si c’était Collendavelloo qui était visé ?

13 août 2022, 22:00

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Lettre «anonyme» de Ken Arian: Et si c’était Collendavelloo qui était visé ?

Il y a quelque chose qui ne colle pas. Ken Arian n’avait aucune raison de s’en prendre à Ameenah Gurib-Fakim. Son investissement dans la lettre anonyme au PM, et l’importance que Pravind Jugnauth y accorde ne font aucun sens car l’ex-présidente de la République était déjà à terre, elle avait déjà démissionné quand la lettre de Ken Arian arrive «officiellement» entre les mains du PM. Décortiquer des «dirty tricks» exige des «dirty minds». Essayons.

Ameenah Gurib-Fakim a beau profiter des révélations de l’express et Radio Plus sur l’auteur de la lettre anonyme citée par le Premier ministre dans le scandale qui l’a fait quitter la présidence pour tenter de redorer son blason, il y a une quasi-certitude : ce n’est pas cette lettre qui l’a fait partir du Réduit. D’abord l’ex-Présidente n’en a pris connaissance qu’hier, soit quatre ans après sa démission. Ensuite dans les faits, la lettre ainsi que la révélation de son existence par Pravind Jugnauth, interviennent après sa démission. (Elle démissionne le 17 mars 2018, et Pravind Jugnauth révèle l’existence de la lettre le 23 mars 2018).

Depuis hier, quand une analyse graphologique a révélé que c’est Ken Arian, alors Senior Advisor du Premier ministre, qui a – au moins corrigé sinon – rédigé la lettre avant qu’elle ne soit remise au Premier ministre, Ameenah Gurib-Fakim s’est lancée dans une campagne de communication pour réécrire les faits; allant même jusqu’à justifier sur Radio Plus, l’utilisation de la carte que lui avait offerte le Planet Earth Institute du sulfureux Sobrinho. Mais cette théorie de la lettre visant Ameenah Gurib-Fakim ne tient pas la route. Quand la lettre est écrite, quand Pravind Jugnauth révèle son existence, Ameenah Gurib-Fakim, déjà fragilisée par la publication de ses relevés bancaires par l’express en mars 2018 (ce qui a fait éclater tout le scandale), avait déjà démissionné.

Pourquoi donc, a posteriori, l’advisor du Premier ministre se donne-t-il autant de peine (rédiger, imprimer, corriger à la main, peut-être réécrire à l’ordi) ? Pourquoi a posteriori, Pravind Jugnauth accorde-t-il une telle importance à cette lettre officiellement anonyme ? (Le Premier ministre la cite le 23 mars lors d’une conférence de presse en annonçant qu’il l’a remise à l’ICAC, puis plusieurs fois le 27 mars en répondant à la PNQ du leader de l’opposition. Cibler Ameenah Gurib-Fakim, à ce moment de la chronologie des événements, est un non-sens.

«C’est Collendavelloo qui était visé», s’accordent à dire deux personnes qui étaient très proches du PMO à l’époque. «Vous remarquerez que les cinq derniers paragraphes formulent des allégations de bénéfices illicites de Sobrinho, en forme d’interrogation sur des «personnalités, hommes d’affaires, membres parlementaires». Ce n’est pas anodin», analyse un de ces ex-‘kwizinié’. Leur théorie à tous les deux : une enquête de l’ICAC sur Collendavelloo ramènerait un partenaire d’alliance trop exigeant à sa juste valeur. Il faut cependant reconnaître que cette théorie est assez loufoque – imputer à un Premier ministre la volonté de révoquer son numéro 2 – et difficile à prouver. Il nous faut donc nous contenter des faits.

Le fait demeure que dans ses deux dernières interviews à l’express, Collendavelloo a dénoncé le fait d’avoir été révoqué en 2020 (deux ans après le scandale Platinum Card) «sur un bout de papier» et que l’ICAC ne l’a jamais appelé jusqu’ici. En effet, Pravind Jugnauth n’a jamais rendu public le rapport de la Banque africaine de développement (BAD). Avant de révoquer Ivan Collendavelloo, il avait simplement montré son nom qui figurait, selon le Premier ministre, sur un document de la BAD. Sans le moindrement insinuer que Ken Arian est aussi derrière la révocation d’Ivan Collendavelloo, le fait demeure aussi qu’une lettre que personne n’a vue a finalement eu la peau de Collendavelloo en 2020 et c’est une ressemblance frappante.