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«Baisse» du nombre de cas - Covid-19: des chiffres qui rendent malade

20 septembre 2021, 13:00

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«Baisse» du nombre de cas - Covid-19: des chiffres qui rendent malade

La guerre des chiffres a déjà débuté. Depuis le début de la pandémie à Maurice, les annonces concernant les statistiques n’ont cessé de muter. Le dernier variant du communiqué du ministère de la Santé, qui a fait son apparition au mois de juillet, est le dernier gros changement dans la communication. Mais derrière l’arbre des cas annoncés se cache la forêt des protocoles de dépistage. Une série de changements depuis la fin du mois d’août fait sourciller. Est-ce qu’on se dirige vers une baisse artificielle des nombre de cas ?

Changement du protocole

Tout a commencé le 24 juillet, quand le ministère de la Santé a changé le format de son communiqué. Exit les données sur le nombre de tests, les cas actifs et autres cas en quarantaine. Dans cette version minimaliste, on ne retrouve que le nombre de cas asymptomatiques, les symptomatiques admis à l’ENT, le nombre de vaccinés et le pourcentage de la population contaminée. Ce jour-là, le pays comptait 134 cas. Ce changement est intervenu au moment où le virus se propageait à très grande vitesse dans les dortoirs, ce qui faisait grimper le nombre de cas. Par exemple, le 20 juillet, 305 cas avaient été détectés dans un dortoir.

Après le format du communiqué, c’est le protocole des tests PCR qui a changé. Le 20 août, une circulaire du ministère de la Santé fait surface. Les tests PCR ne sont plus automatiques pour tout le monde. À partir de cette date, le coton-tige dans le nez était réservé à six catégories : 65 ans et plus, ceux souffrant de comorbidités, les symptomatiques, pas vaccinés, ceux qui ont été en contact direct avec une personne positive ou lorsque le test est recommandé par un médecin.

Cinq jours plus tard, autre circulaire, autre protocole. Les tests PCR sont désormais faits uniquement sur les personnes de 65 ans et plus, les symptomatiques ou celles souffrant de comorbidités. Tous les autres sont dirigés vers les tests rapides. Puis, le 4 septembre, troisième restriction. Les personnes symptomatiques nécessitant une hospitalisation seront les seules à avoir accès au test PCR.

«Beaucoup plus de tests signifiaient beaucoup plus de cas (...) avec le nouveau protocole, le nombre de cas recensés va chuter.»

Baisse du nombre de tests

Est-ce que ces protocoles ont fait baisser les chiffres ? Pour rappel, en mars, alors que la deuxième vague débutait, les autorités s’enorgueillissaient d’avoir augmenté la capacité de tester la population par rapport à l’année dernière. Environ 4 000 tests étaient réalisés chaque jour. Cet argument justifiait la hausse du nombre de cas. Beaucoup plus de tests signifiait beaucoup plus de cas. Vendredi dernier, lors de sa conférence de presse, le Dr Kailesh Jagutpal a fait savoir que sur la semaine écoulée, 9 518 tests PCR ont été réalisées uniquement sur les cagoteries ciblées. Avec le nouveau protocole, le nombre de cas recensés va chuter.

D’ailleurs, jeudi, Steven Obeegadoo a fait savoir que de 330 cas en moyenne à la fin du mois d’août, moment où le protocole a changé, le pays compte aujourd’hui 161 cas en moyenne. Mais la baisse du chiffre entraîne un autre problème. Moins de tests alors que le virus circule fait que le taux de positivité augmente. Par exemple, la semaine dernière, sur les 9 518 tests, 950 étaient positifs, ce qui fait un taux de positivité de 9,98 %, donc très élevé par rapport à l’année dernière.

Pour en revenir aux covid-testing centres, du 9 au 23 juillet, 258 cas y avaient été recensés. Est-ce que ce chiffre a augmenté jusqu’au changement du protocole restreignant les tests PCR ? Si la restriction des tests PCR était survenue 15 jours avant le 24 juillet, ce sont autant de cas qui n’auraient pas été détectés. Avec la baisse, n’y a-t-il pas un risque que toutes ces personnes non détectées se baladent dans la nature ? Non, répond le ministre de la Santé. Les efforts sont concentrés sur les personnes qui ne sont pas encore vaccinées, car il est inutile de tester les vaccinés qui sont pour la plupart asymptomatiques. Toujours est-il que selon les chiffres disponibles, des 8 109 patients positifs, 4 554 étaient totalement vaccinés. Notons toutefois que les risques de transmission des patients vaccinés est moindre car ils ont moins de virus actifs et restent moins contagieux qu’une personne asymptomatique non-vaccinée.

Tests rapides et «contact tracing»

Qu’en est-il des tests rapides ? Désormais, les personnes avec un schéma vaccinal complet, en bonne santé et sans symptômes sont soumises uniquement à un test rapide même si elles ont été en contact direct avec les cas positifs. Entre le 9 et le 23 juillet, 261 cas avaient été recensés à travers le contact tracing. De plus, lors de la conférence de presse du vendredi 10 septembre, le Dr Kailesh Jagutpal avait fait savoir que 3 040 personnes étaient en auto-isolement chez eux la semaine dernière et 2 823 cette année, ce qui donne une idée du nombre de tests rapides effectués. Les cas positifs sont mis en auto-isolement et ne sont pas comptabilisés dans le décompte des cas quotidiens. Mais aujourd’hui, avec le nouveau protocole, ces cas ne sont pas systématiquement soumis à des tests PCR. Il faut aussi noter que la fiabilité du test rapide est de moins de 50 % pour les patients asymptomatiques et oscille entre 60 % et 70 % pour les symptomatiques.

Ce que dit l’OMS

Jeudi, lors d’une conférence de presse, Steven Obeegadoo a fait défiler plusieurs infographies réalisées par l’OMS sur la situation à Maurice. Pour ses rapports, l’OMS se base sur les chiffres transmis par les autorités, et ces chiffres sont eux-mêmes issus du nombre de tests effectués. Il a expliqué que pays est passé d’une moyenne de 330 cas à la fin du mois d’août à une moyenne de 161 cas à la mi-septembre. La baisse correspond au moment où le nouveau protocole avec moins de tests réalisés est entré en vigueur. Quant au taux de décès, il est passé de 3,03 % en avril 2020 à 0,34 % à ce jour. La raison derrière cette baisse, a-t-il fait savoir, est la campagne de vaccination. Si l’explication tient la route, il faut aussi noter que si le nombre de patients positifs grimpe, le pourcentage de décès par rapport à la population contaminée baissera.