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Affaire Kistnen: Sawmynaden, l’ex-ministre qui ne sait rien

16 juin 2021, 09:04

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Affaire Kistnen: Sawmynaden, l’ex-ministre qui ne sait rien

Tactique ou véritable ‘ignorance’ ? Dans les deux cas, c’est grave, dira Me Roshi Bhadain à la sortie de l’audience, hier, mardi 15 juin au tribunal de Moka. Pour lui, si le ministre n’est pas au courant à ce point des affaires de son ministère, il doit démissionner au plus vite. Toutefois, l’avocat est d’avis que le député du MSM «pé déklar kouyon». Au cours de l’audition, Yogida Sawmynaden a tellement fait celui qui ne sait rien que la magistrate Vidya Mungroo-Jugurnath en entendant l’ex-ministre répondre à côté, lui a demandé, «Don’t you understand English ?» Éclats de rire dans la salle… Pour rappel, c’est son avocate, Me Nargis Bundhun, qui avait insisté pour que les débats aient lieu en anglais et non en kreol. 

L’ex-ministre ne répondra plus à côté après ce recadrage mais aura presque tout le temps seulement deux réponses : «Pas au courant» ou «Non». Ainsi, lorsque Me Bhadain lui demande s’il est au courant que des contrats de Rs 33 millions ont été alloués à Vinay Appanna par son ministère en avril 2020 sans que les procédures ne soient respectées, la réponse est «non». Et quand on lui demande comment est-il possible qu’il n’en soit pas au courant, Yogida Sawmynaden tente une explication : «C’est le management (NdlR, les hauts fonctionnaires) du ministère qui s’en occupe.» 

Mal lui en prit ! Me Bhadain lui rappela alors que, comme ministre, Yogida Sawmynaden était tenu à le savoir. Comme lorsqu’il répond aux questions au Parlement lors de l’exercice de Committee of Supplies ; ou que c’est lui-même, Yogida Sawmynaden, qui avait animé une conférence de presse avec ses collègues du gouvernement pour donner moult détails des tarmac buyings sous le Covid ; et qu’il y avait même une liste déposée au Parlement à ce sujet. À tout cela, l’ex-ministre répond que s’il maîtrise les procédures et les données en général, tel n’est pas le cas pour un achat en particulier. Mais quand le même avocat lui demande si son ministère est bien responsable de la STC, il répond «oui». Un membre du public ne put s’empêcher de dire : «Ouf, omwin sa li koné.» 

Mais juste après, rebelote. Est-il au courant que Bo Digital de Deepak Bonomally, employé devenu consultant de son ami d’enfance Vinay Appanna, a décroché un contrat de Rs 308 000 ? C’est la même réponse qu’il avait donnée précédemment: «Il y a beaucoup de compagnies qui ont obtenu des contrats…» La magistrate perd patience : «La question concerne Bo Digital.» Il bredouille alors un oui. 

Et qui a porté la demande de Bo Digital au High Level Committee ? veut savoir Me Bhadain. Le «je ne sais pas» du ministre ne convainc pas l’avocat. «Ne représentez-vous pas le ministère du Commerce au sein de ce comité ?» La réplique du député orange ne manque pas d’air: «Je représente tout le gouvernement au High Level Committee, pas le ministère du Commerce.» 

Mais qui a donné le nom de Bo Digital et AV Techno au High Level Committee ou au comité technique ? insiste Bhadain. La réplique de Sawmynaden qu’il y a une enquête en cours par l’ICAC sur ces deux com- pagnies et de ce fait, il ne serait pas bien d’en parler, n’est pas du goût de la magistrate : «Écoutez M. Sawmynaden, la question est précise et je ne pense pas que votre réponse gênerait l’enquête de l’ICAC.» L’ex-ministre accepte de répondre mais c’est pour dire un «non» inaudible, comme s’il avait honte de prononcer ce mot tellement il l’a utilisé hier. 

«Quelqu’un d’autre l’a fait alors ?» demande Me Bhadain. Je n’ai pas dit ça, rétorque Sawmynaden. «J’ai dit que toutes les propositions venaient directement au comité.» On n’en saura pas plus car juste après, le témoin aura une autre explication sur sa déclaration à ce propos à l’Assemblée nationale : «I don’t recall that I am aware of this.» Ce qui provoquera la fin de la séance, comme demandé par Me Roshi Bhadain, qui aura probablement ressenti soudainement une grosse fatigue devant tant d’ignorance et de perte de mémoire. Et de réponses «cousues de fil blanc», dira-t-il.