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[Enquête] Soopramanien Kistnen connu comme Kaya: le curieux «suicide» de cet agent du MSM…

19 novembre 2020, 12:00

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[Enquête] Soopramanien Kistnen connu comme Kaya: le curieux «suicide» de cet agent du MSM…

Le décès suspect de cet agent du Mouvement socialiste militant (MSM) ressemble à une boîte de Pandore. Soopramanien Kistnen, retrouvé mort le 18 octobre dans un champ de cannes à Telfair, Moka, le corps partiellement calciné, avait été approché pour la fourniture de 236 000 test kits pour le Covid-19, à 18,50 dollars pièce équivalant à un total de Rs 4,3 millions. Derrière cette commande au défunt entrepreneur : Yogida Sawmynaden, ministre du Commerce. 

Toutefois, l’agent orange n’a pas été retenu. Dans un échange d’e-mails entre Soopramanien Kistnen et le ministre, le 14 avril 2020 (voir fac-similé), ce dernier lui demandait : «Can I have the full and technical details of the test kits, then I will submit same to the Ministry of Heath for their comments.» Juste avant, le matin même, IOPL International (Pty) Ltd avait proposé un devis au «contracteur». Nous avons contacté Sailesh Matooreah, Procurement & Logistics Manager de cette société. Il explique qu’il avait proposé ces produits au ministère de la Santé ainsi qu’à la State Trading Corporation (STC), mais n’avait reçu aucun retour.

Il a par la suite reçu un appel de Soopramanien Kistnen, qui lui a demandé un devis pour 236 000 test kits sur l’adresse email de Rainbow Construction Ltd, sa compagnie. Ce qu’a fait Sailesh Matooreah. Mais, dit-il, il n’a pas eu de réponse de Soopramanien Kistnen. C’est AV Techno-World Co Ltd, de Vinay Appanah, beau-frère de Jonathan Ramasamy, le directeur de la STC, qui a finalement remporté le contrat pour la fourniture de test kits. Nous avons contacté Yogida Sawmynaden à plusieurs reprises à propos de ces échanges, mais il ne nous a pas répondu. À noter que nous avons déjà parlé au ministre à ce sujet il y a quelque temps de cela. 

Voici un échange d’e-mails entre Soopramanien Kistnen et le ministre Yogiga Sawmynaden, le 14 avril 2020, concernant les «tests kits» pour le Covid-19.

Soopramanien Kistnen a également participé à un appel d’offres pour le nettoyage et la désinfection de la STC, le 6 mai. Il l’a fait à travers la compagnie Final Cleaning Ltd, qu’il avait créée précédemment. Encore une fois, le contrat aurait été alloué à la fin à Vinay Appanah, le directeur de Techno-World Co Ltd. Nous attendons une confirmation de la STC, à qui nous avons écrit. Cet entrepreneur a été «invité» à plusieurs occasions à participer à ce genre d’appels d’offres mais a été coiffé au poteau par un concurrent qui parfois proposait un prix à peine plus bas. Soopramanien Kistnen en aurait conclu qu’on l’utilisait juste pour faire le nombre en permettant à d’autres d’obtenir des contrats. 

Il aurait manifesté sa colère et fait savoir à plusieurs personnes qu’il comptait alerter l’Independent Commission against Corruption (ICAC) sur ces pratiques. Quand ses menaces sont tombées dans les oreilles d’une Very Very Important Person (VVIP), un garde du corps de cette dernière aurait menacé Soopramanien Kistnen en lui disant de ne plus dire du mal de son patron. Ce garde du corps a été vu lors des funérailles de la victime, bien qu’en congé. La VVIP s’était elle-aussi montrée à ces funérailles mais quelques minutes seulement. Soopramanien Kistnen était pourtant l’un des plus grands agents de la circonscription concernée. De plus, un proche de cette VVIP aurait lui aussi brandi des menaces envers Soopramanien. Contactée lorsque nous avions publié un premier article sur ce décès suspect, le 21 octobre, cette VVIP nous avait déclarés, en substance, qu’elle ne connaissait pas cet homme. Quand nous lui avions remémoré qui la victime était, elle s’en est rappelée. Et quand nous lui avions demandé ce qu’elle pensait de cette mort, elle avait répondu laisser la police faire son enquête. Plus troublant, selon des proches, un protagoniste allait, par personne interposée, remettre une grosse somme d’argent à Soopramanien Kistnen le jour de son décès.

 

 

Analyses toxicologiques attendues

<p>Le corps de cet entrepreneur et activiste MSM était carbonisé dans un champ de cannes, tout près de l&rsquo;ICAC. Il n&rsquo;avait pas ses chaussures aux pieds et son sac contenant ses documents a été retrouvé brûlé. Malgré toutes ces indications troublantes et d&rsquo;autres dont nous ne reproduirons pas les détails, un enquêteur de la police a informé la famille qu&rsquo;il n&rsquo;y avait pas d&rsquo;acte criminel. Un autre officier a affirmé que le défunt, aussi connu comme Kaya, se serait suicidé, avant même des enquêtes approfondies. Ce que rejettent ses proches, qui se demandent comment il aurait pu faire cela. Le premier rapport du médecin légiste a conclu à un décès des suites d&rsquo;un œdème pulmonaire. D&rsquo;autres analyses toxicologiques notamment sont en cours et la famille attend depuis un mois les conclusions&hellip; La thèse d&rsquo;œdème pulmonaire comme cause de décès, selon un médecin indépendant, &laquo;<em>est trop vague, à moins que la victime ait succombé à une asphyxie due à la fumée, alors qu&rsquo;elle était vivante mais inconsciente&raquo;</em>.</p>

<h3>Lieu du décès et indices incendiés</h3>

<p>La police a très rapidement communiqué sa conclusion de suicide aux proches de la victime. Ce qui a eu pour conséquence d&rsquo;endormir leurs soupçons et de les conduire à incinérer le corps le lendemain même de la découverte macabre. La police n&rsquo;a pas objecté à ce choix. Selon des témoignages, un officier a même demandé aux proches d&rsquo;une façon expéditive : &laquo;<em>Ki pou fer pou lékorla? Pou brilé ou antéré ?&raquo;</em> Sans expliquer que l&rsquo;incinération ferait disparaître des preuves et rendrait impossible toute éventuelle contre-autopsie. Pourtant, la même police est revenue plus tard pour dire qu&rsquo;&laquo;<em>aucune piste n&rsquo;est négligée et l&rsquo;enquête continue&raquo;</em>. Autre interrogation des proches : pourquoi a-t-on brûlé les cannes où se trouvait le corps le lendemain même de la découverte macabre, dès que la police a promptement enlevé le ruban jaune ? Nous avons contacté un responsable à Mon Désert Alma, propriétaire de ce champ, pour demander si c&rsquo;est la société qui avait fait couper ces cannes et y mettre le feu. Il nous a répondu que ce n&rsquo;était pas dans les habitudes de Mon Désert Alma de brûler les cannes avant la coupe car cela réduit la teneur en sucre. D&rsquo;ailleurs, il n&rsquo;avait pas fait couper ces cannes. Quand nous lui avons dit que cette superficie a été brûlée et la canne coupée, il n&rsquo;a plus voulu continuer la conversation et nous a simplement déclarés : <em>&laquo;Je ne vous ai rien dit.&raquo; </em>Qui a brûlé et fait couper le restant de ces cannes parties en fumée avec toutes les preuves qui y subsistaient ?</p>

<h3>Pas de chaussure , caméras Safe City en panne et révélations à l&rsquo;ICAC</h3>

<p>Soopramanien Kistnen a été retrouvé pieds nus. &laquo;<em>Même si cette partie du corps était calcinée, on aurait dû découvrir la semelle de ses chaussures ou ce qu&rsquo;il en reste. Or, la partie inférieure du corps a été plutôt épargnée mais aucune trace de chaussure&raquo;</em>, commente un proche. Il est hors de question que la victime se soit baladée sans chaussures et avec son sac. Justement, si les restes du sac ont bien été retrouvés, le contenu, dont des documents importants, a disparu. &laquo;<em>Seuls ces documents ou de l&rsquo;argent auraient pu renseigner sur les motivations de l&rsquo;assassinat</em>&raquo;, nous dit-on chez la famille qui est convaincue, elle, d&rsquo;un &laquo;foul play&raquo;. Soopramanien Kistnen leur avait à maintes reprises parlé de faire des révélations. Sur qui ? À propos de quoi ? Mettait-il ses menaces à exécution partant de chez lui, à Montagne-Ory, le vendredi 16 octobre, lorsqu&rsquo;il a disparu ? Il se pourrait, nous disent des proches, qu&rsquo;il se dirigeait vers l&rsquo;ICAC quand il a brutalement été arrêté sur sa route. Quand la famille a demandé à la police de consulter les images des caméras Safe City de la zone, elle s&rsquo;est vu répondre que toutes ces caméras étaient en panne&hellip;</p>

<h3>Enter pomponnette ou un barrage qui n&rsquo;en finit pas d&rsquo;être payé</h3>

<p>Le défunt, qui était le directeur de <em>Rainbow Construction Ltd</em>, obtenait des contrats de certaines institutions publiques, le conseil de district de Moka notamment. Mais c&rsquo;est surtout le contrat auprès de <em>Clear Ocean Ltd</em>, la controversée compagnie sud-africaine qui occupait jusqu&rsquo;à tout récemment des Pas géométriques à Pomponette, qui interpelle. Nous détenons plusieurs lettres adressées par Soopramanien Kistnen à <em>Clear Ocean</em>, dans lesquelles il réclame différentes sommes allant de Rs 1,2 million à Rs 4,5 millions pour ériger le fameux barrage en tôle. A-t-il été payé pour ces travaux ? Nous y reviendrons.</p>