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Drames en mer: intégrer la National Coast Guard à la SMF, une option

16 septembre 2020, 22:00

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Drames en mer: intégrer la National Coast Guard à la SMF, une option

«Oui», nous répond un ex-membre de commando de la Special Mobile Force (SMF) qui s’y connaît en natation, plongée, recherches et sauvetages. Notre interlocuteur a suivi des formations en Europe et il a plusieurs années d’expérience au sein de la SMF. L’affaire Wakashio et la marée noire qui s’ensuivit l’ont mis hors de lui, notamment la façon dont la National Coast Guard (NCG) aurait réagi, pour ne pas dire, n’aurait pas réagi. Mais la goutte qui a fait déborder le vase, c’est l’affaire du remorqueur Sir Gaëtan et l’absence de résultats dans les recherches du malheureux capitaine Moswadeck Bheenick. Il veut maintenant en parler mais tient à conserver l’anonymat pour des raisons évidentes. 

Formation en recherches de mer 

Pour lui, une recherche ne se fait pas comme l’a fait la NCG. «Il fallait d’abord baliser la zone et contacter la météo pour avoir des informations sur les marées et les courants le jour et l’heure du drame.» Il considère que ces informations sont précieuses car elles renseigneront sur la trajectoire de la personne recherchée. «Il faut utiliser deux mannequins, le premier remplaçant de par sa consistance une personne inconsciente ou décédée. La dérive du mannequin que l’on placera le lendemain ou un autre jour dans les mêmes conditions océaniques nous mettra sur la voie. Le deuxième mannequin représentera une personne en vie et on saura donc où le naufragé pourrait être emporté.» 

Par ailleurs, il explique qu’une personne en vie ou inconsciente restera à la surface alors qu’une personne morte par noyade ou autrement restera «entre deux eaux», c’est-à-dire à trois ou quatre mètres de profondeur. «Bien sûr, le corps remontera à la surface avec le temps par l’action du soleil, entre autres.» Il souligne qu’un corps inerte peut rester immergé à plus de cinq mètres de profondeur et, dans ce cas-là, la pression de l’eau l’empêchera de remonter à la surface à jamais. 

Avec les données collectées de la météo et autres, explique-t-il, les recherches pourraient commencer. «Il ne suffit pas de faire des rondes en bateau ou en hélico sans aucune méthodologie. Des plongeurs balaieront la zone en se plaçant à une distance visuelle entre eux et ils chercheront à la surface. Une autre équipe toujours déployée en formation recherchera sous la surface entre les deux eaux. Une troisième équipe sondera les fonds pour un corps resté immergé.» 

«Plonzer manti manti» 

Est-ce que la NCG a procédé ainsi ? «Non», soutient notre interlocuteur, qui suit l’affaire de près. Pour l’exmembre de commando de la SMF, «les recherches se font au petit bonheur. L’essentiel pour les garde-côtes, c’est de sortir et de toucher la prime pour ces sorties. Zot plonzé manti manti !» Alors qu’à la SMF, contrairement au MARCOS (unité de commando de la NCG), on ne bénéficie pas de diving allowance car les plongeurs sont de carrière, dit-il. Cependant, notre intervenant tient à souligner qu’il existe de nombreux bons éléments au sein de la NCG qui ne sont pas exploités. 

«C’est là le drame à la NCG. Trop de passe-droits et ce sont ceux qui ne méritent pas qui parfois ont des faveurs.» Ainsi, il rappelle comment une organisation respectable qui décernait des certificats de life-saving a été mise à l’écart parce qu’elle n’octroyait des certificats qu’aux membres de la NCG qui réussissaient aux tests. «En 2018, lors d’un examen de 13 candidats de la NCG, aucun d’eux n’a obtenu de certificat. Depuis, la NCG a copié les programmes de cette organisation pour faire ses tests… elle-même.» Accorde-t-elle donc des certificats de complaisance ? Pour notre interlocuteur, la réponse est catégorique : «Absolument.» 

Y a-t-il donc des gardecôtes qui ne savent pas nager ? «Beaucoup», dit-il. Et il nous rappelle un incident en 2016 à Flic-en-Flac, qui avait vu la noyade d’un Mauricien. «Un élément de la SMF qui faisait la surveillance sur la plage fut pris par les garde-côtes à bord de leur bateau pour aller au secours d’un nageur imprudent. Le canot de la NCG chavira et un garde-côte tombé à l’eau appela au secours le soldat du SMF en criant : “Sov mwa. Mo pa konn naze”.» Et le sauveteur de la SMF le sortit des eaux ! Il nous rappelle aussi le bus tombé dans la mer à Macondé en 1995 causant cinq noyades. Alors que c’est une équipe de la SMF qui ramena les corps, ce sont les éléments de la NCG qui en prirent le crédit et obtinrent même une promotion ! 

Selon des informations obtenues de source sûre, il y a effectivement beaucoup d’éléments de la NCG qui ne savent pas nager et encore moins plonger. À l’instar de cet élément dont le nom revient souvent et qui, malgré le fait qu’il ne sache pas nager, est presque toujours en mer pour aller à Agalega, Rodrigues ou plus loin en Inde. «Il a même obtenu une bourse du gouvernement américain», nous dit un garde-côte qui se demande pourquoi on l’a envoyé représenter la NCG et Maurice alors qu’il ne sait même pas nager. 

L’ex-membre de commando de la SMF nous explique que les plongeurs de la NCG obtiennent en plus de leur salaire une diving allowance de Rs 750 par plongée avec un maximum de 15 plongées par mois ! «Ces ‘plongeurs’ s’enrichissent sur le dos d’autres fonctionnaires alors que, quand on a besoin d’eux, ils ne sont pas présents. Certains d’entre eux, qui ont soi-disant fait de la plongée pendant dix ans et ont touché des sommes folles en primes de plongée, n’ont jamais effectué une seule mission de recherche et de sauvetage.» Il nous rappelle qu’après le naufrage du Wakashio, alors que des volontaires du public et du secteur privé se salissaient dans l’huile lourde, des membres de la NCG se contentaient de regarder faire dans leur uniforme immaculé. «Je le répète. Il y a de très bons éléments dont d’anciens nageurs de compétition mais ils sont mis à l’écart à la NCG sauf quand on a bien besoin d’eux.» 

Entraînements intensifs 

Il nous explique que contrairement à la NCG, la SMF a des plongeurs dédiés qui suivent des entraînements réguliers dans toutes sortes de conditions. De la natation sur trois kilomètres en haute mer, plongée à 14 mètres en apnée, entrée et sortie de la passe sans aide et tout cela dans l’eau glaciale de l’hiver ; et en été, des sauts d’hélicoptère, du capsize drill, etc. Ce qui lui fait dire que l’on ne peut pas et l’on ne doit pas prétexter le mauvais temps pour arrêter des recherches ou l’inspection d’un navire naufragé. «Je rigole et je suis en même temps en colère quand j’entends le Premier ministre expliquer que le temps ne permettait pas de s’approcher du Wakashio.» 

Au Police Press Office, on nous assure que les membres du MARCOS suivent les mêmes entraînements intensifs que les plongeurs et sauveteurs de la SMF. Et que les recherches de disparus sont bien effectuées, selon une méthodologie éprouvée, par des plongeurs et des officiers à bord de bateau. Pour l’exmembre de commando de la SMF qui maintient ses dires, il serait temps d’abolir la NCG et le MARCOS. «Tous doivent être réunis sous le commandement de la SMF. Ils coûtent beaucoup trop et suivent un autre régime.» Il est temps de mauricianiser la NCG, ajoute-t-il, car nous avons les compétences nécessaires. «Rien que pour avoir laissé le Wakashio venir se balader tout près de nos côtes, la NCG aurait déjà dû avoir été remise en question !»