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Nettoyage des côtes: une partie des hydrocarbures condamnée à rester

25 août 2020, 20:00

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Nettoyage des côtes: une partie des hydrocarbures condamnée à rester

Suffit-il d’un seau et d’une pelle pour retourner les galets et le sable ? Ou d’appliquer une bonne dose de dispersants chimiques pour retrouver la carte postale. Le nettoyage fin des hydrocarbures du MV Wakashio s’annonce beaucoup plus complexe. Mais surtout long. 

Si «le gros a déjà été enlevé», estime Yann von Arnim, océanographe et spécialiste de biologie marine qui collabore avec la Mauritius Marine Conservation Society (MMCS) et la Mauritius Scuba Diving Association (MSDA), il faut se concentrer sur les endroits les plus difficiles d’accès. Car, avec la marée, «l’huile lourde part et revient», s’infiltrant entre les roches et dans le sable. 

Il est d’avis que ce n’est pas à la population mais aux spécialistes d’intervenir dans les zones sensibles où poussent les mangroves. Une région qui passe par Grand-Port, Rivière-des-Créoles, Anse-Jonchée jusqu’à une partie de Pointe-du-Diable. Ce qui explique que le nettoyage prendra «plusieurs mois ou même un an avant d’être complété à 100 %». 

Il existe des dispersants chimiques qui permettent à l’huile de se dissoudre dans l’eau. Sauf que «c’est encore plus toxique que les hydrocarbures eux-mêmes», prévient Yann von Arnim. Mise en garde dont Vassen Kauppaymuthoo, océanographe et ingénieur en environnement, se fait l’écho. «Il ne faut surtout pas utiliser des produits qui vont redonner un beau coup d’oeil au paysage, mais qui sont en réalité toxiques.» Il ajoute que «certains vont dire que ce sont des produits biodégradables», mais il ne faut pas s’y fier. 

Le spécialiste – et non expert, précise-t-il – explique qu’à l’air libre, une partie du pétrole s’évapore. «C’est ça les mauvaises odeurs que des habitants de cette région ont respiré.» L’autre partie sèche et devient des «galettes que l’on ramasse à la main». Ce qui est «mieux» que de gratter avec une pelle avant que le pétrole ne soit sec, car cela a le désavantage de le faire pénétrer plus profondément. 

Vassen Kauppaymuthoo plaide en faveur de l’utilisation de produits qui permettent à la Nature elle-même de se nettoyer et de se régénérer. «On peut activer des bactéries qui sont présentes dans la Nature et qui vont se nourrir des hydrocarbures», propose-t-il. Comment contrôler la prolifération de ces bactéries ? L’océanographe précise qu’il s’agit de bactéries «spécifiques» aux hydrocarbures et qui deviennent inactives quand elles ne sont plus nourries. 

Malgré tous les efforts, il faut se rendre à l’évidence. «Il y a une partie qu’on ne pourra pas enlever. Quoi qu’il arrive, il y aura des traces», affirme Vassen Kauppaymuthoo. Car cette pollution finit par entrer dans la chaîne alimentaire. Dans les planctons qui sont mangés par d’autres animaux marins, dont les crabes. Quant aux produits dispersants, certains comportent des éléments cancérigènes.

 

Nettoyer c’est bien, ne pas salir c’est mieux 

<p><em>&laquo;Il faut nettoyer l&rsquo;huile lourde, mais surtout nettoyer les plages tout court&raquo;</em>, s&rsquo;écrie Yann von Arnim, océanographe. Selon lui, <em>&laquo;quand on fait des photos des plages, on voit l&rsquo;huile, mais surtout beaucoup de bouteilles en plastique et autres déchets&raquo;.</em></p>