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Il y a plus important que vous, que nous, M. Jugnauth…

13 août 2020, 08:07

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Il y a plus important que vous, que nous, M. Jugnauth…

On ne va pas en faire un mélodrame ni établir de grandes thèses philosophiques. Tous ceux qui ont vu comment nous (un photographe, un vidéographe et deux autres journalistes de l’express) avons été refoulés du lieu où se tenait la conférence de presse du Premier ministre hier, comprennent bien que Pravind Jugnauth ne nous aime pas, pour ne pas dire, nous déteste carrément.

Vivre, privé de son amour, est parfaitement possible – je suis même convaincu qu’on vit mieux sans, qu’avec – et on ne s’en plaint pas. Les raisons de cette haine sont compréhensibles et nous n’allons pas refaire le film de toutes les fois où nous lui avons fait mal avec nos révélations.

Mais le drame écologique, l’inquiétude d’une nation, l’engagement de milliers de Mauriciens qui confectionnent les booms, les pêcheurs et gens de la mer qui sont en train de les déposer dans le lagon du Sud-Est, à l’heure où vous tenez ce journal entre les mains, dépasse la petitesse d’esprit qui alimente la haine de Pravind Jugnauth envers l’express. L’express n’est pas plus important qu’un autre journal et ne détient pas la science infuse de comment lutter contre une marée noire qui s’est produit 12 jours après l’échouement d’un navire. Mais comme le font les autres journaux et médias depuis que le Wakashio s’est drossé sur nos récifs, puis a commencé à déverser son huile lourde, nous remplissons simplement notre devoir d’informer mais aussi de faire remonter les informations que nous rapportent les frontliners vers le Premier ministre. Ainsi, avant de nous rendre à cette conférence presse hier, nous avons pris le soin de sonder les vrais héros: ces citoyens ordinaires mobilisés à Mahébourg qui sont en train de lutter contre la marée noire. Parmi les nombreuses questions récoltées il y avait celles-ci:

Selon les miltants de Rezistans ek Alternativ, qui étaient parmi les premiers à organiser la confection des booms et qui sont toujours sur  place, les autorités officielles n’ont installé que 200 m de bouées mardi, alors que les pêcheurs et autres gens de la mer en ont à eux seuls installé près d’un kilomètre. Est-ce que c’est vrai ? Si oui, l’État n’est-il pas en train de déléguer sa responsabilité aux citoyens engagés ?

Les pêcheurs et autres gens de la mer de la région, qui connaissent, sans l’ombre d’un doute, mieux que n’importe qui les courants et les marées du sud-est, clament qu’ils ne sont pas consultés et qu’on les prive d’informations cruciales qui leur permettraient de peaufiner leur stratégie contre la marée noire.

Nous voulions aussi interroger le Premier ministre sur l’énormité qu’il a dite à la BBC hier. Alors que nous nous vantons d’une Ocean Economy, le grand chef du gouvernement déclare qu’un «oil spill was totally unexpected» pour reprendre la question de notre consoeur de la BBC: «Don’t you owe an apology to the nation ?»

Des questions que nous estimons importantes et légitimes mais qui, nous le concédons, ne sont pas plus importantes que celles de nos autres confrères qui ont eux été admis à la conférence de presse. Nous sommes tous des adultes qui comprennent qu’à l’heure qu’il est ce n’est pas «l’express» ou «Pravind Jugnauth» qui compte ; il y a plus important que nous.

Si le locataire du Prime Minister’s Office est un petit gamin déguisé en Batman qui veut jouer au superhéros, qu’il s’adonne à ses enfantillages durant ses heures libres. Car dans une telle situation, il y a plus important que lui.

Il y a plus important que les conseillers en communication, Mes Jean-Paul Arouff et Ken Arian, qui, sollicités hier à la porte, nous ont envoyé l’assistant commissaire de police Veeramalay. Il y a évidemment plus important que ce clown qui s’est ridiculisé devant nos caméras hier.