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Le plastique: un bien pour l’environnement, un mal pour les opérateurs

1 août 2020, 18:37

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Le plastique: un bien pour l’environnement, un mal pour les opérateurs

Les lois ont été revues pour pallier les problèmes de pollution que cause le plastique. Toutefois, l’élimination du plastique à usage unique et non biodégradable pose problème aux opérateurs.

Le Covid-19 a affecté les entreprises financièrement. Outre la pandémie, la décision d’éliminer le plastique qui nuit à l’environnement vient aggraver la situation et bouscule cette industrie. Certaines entreprises menacent de fermer car elles font face à des difficultés financières ou autres problèmes liés aux ravages causés par la crise sanitaire pour pouvoir se réinventer.

Aux dires des opérateurs, le gagne-pain des employés du secteur est en jeu car la décision d’éliminer le plastique à usage unique peut entraîner le chômage, étant donné que ces employés ont de longues années de service et connaissent bien les rouages de l’industrie du plastique.

«Où iront-ils ? Le gouvernement a-t-il pensé à cela ? Quelles sont les autres opportunités de travail ?», se demandent des directeurs, qui déplorent le manque de concertation et de communication.

D’ailleurs, David Chow, directeur de Vic Lux Plastic Ltd et président de la Plastic Product Manufacturers Association, fait valoir qu’il a écrit à deux reprises au ministère de l’Environnement par rapport à l’interdiction de fabriquer ou d’utiliser le plastique à usage unique. Il souhaiterait une rencontre avec le ministre de tutelle ainsi que celui de l’Industrie pour en discuter, car plus de 18 entreprises de plastique sont concernées. Il se dit toujours en attente d’une réponse.

En tant que producteur de sacs en plastique pour les commerçants, comme les marchands de dholl puri, entre autres, et fabricant de laundry bags pour l’hôtellerie et l’aviation, l’usine Viclux Plastic Ltd est affectée par l’élimination du plastique à usage unique.

«C’est la fin pour nous, les fabricants. Nous sommes toujours en période de crise sanitaire et financière, et là nous voyons venir un autre casse-tête.» David Chow reconnait que le plastique est mauvais pour l’environnement mais qu’il a été utile durant la crise sanitaire pour les emballages et le Personal Protective Equipment (PPE). «À partir de janvier 2021, je n’aurai pas d’autre choix que de produire du biodégradable. Comme il est fait à base de pomme de terre ou de maïs, la production est coûteuse. Par exemple, les sacs en plastique se vendent à environ Rs 3, alors que ceux biodégradables coûtent environ Rs 10», avance-t-il.

 «MAUVAIS TIMING»

De son côté, Reena Deerpalsing, directrice de Shamrock Plastic Industry Ltd, une entreprise qui produit des couverts, gobelets, plats, conteneurs, tous objets qui seront bannis, affirme que la décision du gouvernement sur l’élimination du plastique est une bonne chose pour Dame nature mais que le timing est mauvais. Pour elle, la fermeture des frontières l’empêche de voyager pour aller de l’avant avec des investissements dans le biodégradable. De plus, elle craint de ne pouvoir épuiser son stock d’ici le 15 janvier, d’autant qu’elle a été affectée par le Covid-19.

«Ce qui peut engendrer des pertes», dit Reena Deerpalsing. «J’ai déjà quelques équipements pour travailler avec le biodégradable sauf que je n’ai pu importer les matières premières, qui coûtent 3 à 4 fois plus cher, vu les problèmes causés par le coronavirus. De plus, le ministère n’a pas fait circuler une liste de matières premières que les opérateurs pourraient utiliser pour la production des produits biodégradables», soutient-elle.

Reena Deerpalsing ajoute que pour se réinventer, après 40 ans d’expérience dans le plastique, il faut une bonne maîtrise pour passer à la production du biodégradable, ce qui signifie qu’il faut plus de temps pour tout mettre en place. Elle a aussi l’intention de se tourner vers le papier, quoi que ce ne soit pas une meilleure alternative pour le bien de l’environnement. Dans le pire des cas, elle pourrait avoir à fermer de son usine.

Par ailleurs, Ajmal Sumodhee, directeur de Plasticon, qui est dans le domaine depuis plus de 35 ans, fabrique des bouteilles en plastique pour les hôpitaux et les pharmacies ainsi que des détergents, entre autres. Travaillant avec les services de santé, il n’a pas fait de grosses pertes durant le lockdown.

Ajmal Sumodhee précise que son entreprise ne sera pas vraiment affectée car il produit des bouteilles en plastique à base de PET. Par contre, il se dit inquiet car l’avenir est incertain pour les fabricants de produits en plastique.

 «Si demain le gouvernement décide d’éliminer les bouteilles en plastique, je n’aurai d’autre choix que de fermer mon entreprise car je n’ai pas les moyens d’acheter d’autres machines pour produire le biodégradable», confie Ajmal Sumodhee.

 Les opérateurs se demandent si les Mauriciens voudront débourser trois fois plus cher pour les bio- dégradables. Mais parfois, le manque de choix oblige… Pour rappel, une loi a été promulguée le 1er janvier 2016 pour interdire l’importation, la production, la commercialisation et la distribution de sacs en plastique ainsi qu’une utilisation abusive et non-contrôlée et pour combattre ainsi les risques de pollution.

Plastique à usage unique : amende entre Rs 2 000 et Rs 250 000 pour les contrevenants

Toute personne en possession d’objets en plastique non-biodégradable sera passible de poursuites. C’est ce que risque le public avec la nouvelle loi sur le plastique à usage unique qui sera en vigueur dès le 15 janvier 2021.

En effet, les «Environment Protection (Control of Single Use Plastic Products) Regulations 2020» ont été officialisés le 18 juillet et rendus accessibles cette semaine. L’article 16 de ces règlements fait la distinction entre le public et les entreprises qui utilisent le plastique. Selon les dispositions légales, toute personne qui a en sa possession des objets en plastique non biodégradable qui n’est pas pour la commercialisation sera passible d’une amende ne dépassant pas Rs 2 000. Pour les autres infractions subséquentes, une amende ne dépassant pas Rs 5 000 sera imposée.

Pour les entreprises qui commercialisent des produits en plastique non-biodégradable, la première amende sera de Rs 20 000. Et, pour les pénalités suivantes, l’amende ira jusqu’à Rs 100 000 et une peine de prison ne dépassant pas trois mois.

Les importateurs seront frappés d’amendes de Rs 50 000 pour une première infraction et ensuite Rs 100 000 et une peine de prison maximale de deux ans.

L’amende pour les producteurs de produits en plastique non biodégradable sera de Rs 100 000 et, par la suite, une amende de Rs 250 000 et une peine de prison ne dépassant pas deux ans. Pour toutes les autres infractions, une amende de Rs 25 000 est prévue.

Un moratoire de quatre mois sera offert aux produits non biodégradables. En effet, les commerces ont déjà un stock de plastique pour des produits comme des couverts, conteneurs, entre autres.

Pour l’importation et la production de couverts, plats, gobelets, bol, plateaux et pailles biodégradables, il faudra faire une demande auprès du directeur de l’Environnement et fournir les informations nécessaires pour avoir un certificat de conformité. Pour l’importation, il faudra l’aval du directeur de la Mauritius Revenue Authority.