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Non, ce n’est pas une alliance de l’opposition !

27 juillet 2020, 11:13

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La sémantique a pris le pouvoir ! Le mot alliance est honni, banni, enterré. À la place, on préfère entente, réunion, force. Mais cela n’a échappé à personne. La rencontre entre les leaders des principaux partis de l’opposition devant les caméras samedi n'est que le premier jalon d’une alliance dont le principal test sera les municipales de 2021.

La politique étant ce qu’elle est à Maurice, voilà donc des leaders qui ont décidé d’avaler leur langue de vipère, utilisée entre eux, en mettant de côté leurs hostilités pour se montrer souriants, chaleureux et solidaires devant les clichés des photographes de presse.

Et c’est ainsi donc que plusieurs pages sont subitement tournées, au profit de nouveaux intérêts politiques, cristallisés par une envie de s'unir contre l’alliance MSM-ML. Les ennemis d’hier sont donc revenus se caresser dans le sens du poil en partageant la même table pour regarder dans une seule direction, tout en attaquant ensemble la cible Jugnauth.

Voici donc Bérenger et Duval – celui-ci se permettant même de galvauder le mot historique pour qualifier cette rencontre – mettant de côté leur différend légendaire. Voici donc le leader des Rouges qui concède la présence de Boolell sur la plateforme des leaders, celui-ci gagnant sa place de par son poste constitutionnel de leader de l’opposition. 

Pour l’heure, à écouter les chefs, il s’agit de réflexion, de mise en commun, de structure collective qui ne réunira pas uniquement les responsables des partis mais aussi des jeunes de chaque formation. Une formule toute trouvée pour éviter de froisser leur électorat respectif qui n'est pas forcément d’accord avec ce choix d’embrasser hypocritement  aujourd’hui les adversaires d’hier.

D’où les précautions prises pour ne pas parler d’alliance, dont le seul mot génère une quantité de compromis, d’interrogations et de guerres intestinales plus susceptibles de casser la dynamique, surtout quand il s’agit de trois partis à tout se partager !

À quatre ans et demi des prochaines élections générales, on n’en est pas encore là. Du reste, a-t-on jamais vu de koz-koze aussi tôt dans le temps avant un scrutin, qu’il soit général ou municipal. Qu’importe la forme que ces partis veulent nous vendre, on en est donc à l’aube d’une reconstruction d’un bloc de l’opposition dont le rapport de forces envers le pouvoir pourra se mesurer au Parlement ou ailleurs, lors d’une éventuelle manifestation annoncée par le leader du MMM.

En officialisant cette union, l’objectif est de faire savoir qu’il est donc possible de réunir les voix de ces leaders-là en une seule, que désormais les forces ne seront plus dispersées, car les tirs envers le pouvoir se feront collectivement. Faut-il souligner que c’est la faiblesse de l’alliance MSM-ML qui facilite la tâche d’une opposition n’ayant pas besoin de faire beaucoup d’efforts pour critiquer un gouvernement qui creuse chaque jour son sillon d’impopularité ?

Six mois seulement après les législatives, combien de scandales n’ont-ils pas été révélés ? À quelle dérive n’assiste-t-on pas ces jours-ci, allant du copinage à la menace de notre démocratie illustrée dangereusement ces jours-ci par les arrestations et autres tracasseries envers les internautes, quand on ne tente pas, sous couvert de nouvelles lois, de confisquer la liberté d’opinion ?

En vérité, l’ensemble de l’équipe MSM-ML est le meilleur agent de cette nouvelle force de l’opposition qui ne fait que surfer sur la colère d’une population rejetant progressivement ce gouvernement coupé de l’opinion publique.

La nouvelle dynamique opposante a fait ses calculs : le gouvernement de Pravind Jugnauth représente 37 % de la population. Est-ce à dire que les trois autres partis font forcément le poids restant quand l’on sait qu’en politique, l’équation n’est pas toujours ce que l’on croit ? Mais en attendant, malgré la sémantique utilisée, l’on sait que les graines d’une future alliance sont plantées. À moins que les résultats des prochaines municipales viennent casser les branches du nouvel arbre rouge-mauve-bleu… 

L'édito paru cette semaine dans 5-Plus Dimanche