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Miel: la ruche mauricienne bourdonne

18 juin 2019, 21:45

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Miel: la ruche mauricienne bourdonne

Les abeilles ne cessent d’être laborieuses. Avec une production en hausse, le secteur se veut tout sucre tout miel. Le Budget 2019-20 prévoit la création de nouvelles réserves à Rivière Tamaka et Palma ainsi qu’une exemption de la taxe sur les véhicules pour les apiculteurs. De plus, un label mauricien sera bientôt une réalité.

Sous les majestueux arbres bordant un petit sentier au Dauguet, à Port-Louis, se cachent deux boîtes en bois. Enfumoir à la main, Iswar Gajadhur, auxiliaire de laboratoire, s’approche d’elles vêtu de sa combinaison de protection. Hors de question d’effrayer ces petits insectes qui y sont nichés. Entre quelques bouffées de fumée, les voilà qui virevoltent. «Ce sont des abeilles hybrides, donc entre les types jaunes et noires. Elles ne vont pas nous agresser», confie Ajitsingh Hardowar, Apiculture Officer.

Dans la boîte, les abeilles sont environ 20 000 à s’activer autour des pains de miel. Ce secteur a actuellement le vent en poupe. Depuis 2018, le nectar connaît un boom de sa production, passant à 25 tonnes contre 15 tonnes annuelles, suivant la maladie du varroa en 2014. Pour continuer sur cette lancée, le Budget 2019-20 prévoit l’institution d’autres réserves pour les abeilles à Rivière Tamaka et à Palma. Une exemption de la taxe sur l’achat de véhicules et sur la mise sur route sera effective pour les apiculteurs ayant un minimum de 20 ruches.

Ce secteur fourmille d’autres idées. «Nous travaillons sur deux projets importants. Premièrement, nous érigerons un bâtiment qui abritera un centre d’assistance aux producteurs à Réduit. Deuxièmement, nous comptons créer un label mauricien. Pour l’heure, chaque producteur opère de son côté. Il faut que notre miel local soit reconnu et visible sur la scène internationale, par exemple dans les boutiques hors taxes», déclare Preeaduth Sookar, Principal Scientific Officer de la division d’entomologie au ministère de l’Agro-industrie. Un branding précis sera effectué pour concevoir ce label mauricien. Dans cette optique, des experts étrangers seront bientôt à Maurice pour des formations.

Suite à ces développements mielleux au nom du nectar, des réserves additionnelles pour les abeilles se multiplient. Une loi pour les déclarer zones de protection officielle est aussi en préparation. «Nous sommes en train de faire les aménagements sur ces sites et avons acheté une cinquantaine de colonies d’abeilles. De plus, nous procéderons à l’élevage de la reine que nous mettrons en vente. Nous devons en changer dans un intervalle de deux ans. Une reine pond environ mille œufs par jour. Si celle-ci est productive, il en sera de même pour le miel», explique-t-il. Ainsi, au Dauguet, par exemple, les travaux s’accélèrent pour les opérations futures de sept apiculteurs. Ce domaine intéresse d’ailleurs de plus en plus de femmes (voir encadré).

Comment conçoit-on ces sites d’élevage naturels ? Selon nos interlocuteurs, d’abord, des terrains de l’État, situés en forêt et dépourvus de pollution et d’habitation, sont identifiés. «Ils doivent être accessibles et loin des habitants pour éviter les risques de piqûre. Par exemple, il faut que les autorités nous permettent d’y placer les ruches. Une autre condition cruciale est la provision de plantes mellifères. Au Dauguet, nous avons des hectares d’eucalyptus ainsi que l’acacia, le campêche, entre autres. Ces espèces sont très appréciées des abeilles.»

En fait, les plantes mellifères produisent des nectars de pollen. À l’inverse, d’autres espèces comme la rose ou encore le guinda ne sont pas propices à la productivité des abeilles, explique Preeaduth Sookar. Une fois les lieux déterminés, les ruches en pin non traité y sont installées et exposées partiellement au soleil pour stimuler les abeilles, affirme Ajitsingh Hardowar.

Après une réserve déjà à Petit-Sable, de nouveaux espaces seront pourvus à La Ferme, à Bras-d’Eau et à La Nicolière. «À la Ferme, par exemple, nous avons reçu une quinzaine de demandes, alors que nous en prévoyions cinq. Par conséquent, nous réalisons une étude pour diviser les terres et répondre aux demandes. On donne l’accès aux apiculteurs sous des conditions précises. Par exemple, il ne faut pas mettre le feu aux bois ou installer des constructions. Tout est aussi sous le contrôle des gardes forestiers», soutient Preeaduth Sookar. Par contre, dans le nord de l’île, cet espace peut être difficilement installé en raison de la culture cannière. Dans ce cas, le miel serait fermenté et se transformerait en fangourin, ce qui nuirait aux abeilles mais aussi aux consommateurs du nectar, précise-t-il.

Qu’en est-il de leur protection des maladies ? Outre le varroa qui a eu des conséquences négatives sur la production de miel, des parasites comme les coccinelles sont aussi la bête noire des abeilles. Depuis, des techniques naturelles sont prisées. Du coup, les insectes butineurs ont désormais repris du poil de la bête, souligne l’Apiculture Officer. «Nous n’utilisons pas de pesticides. On laisse les abeilles développer leur résistance. Nous les contrôlons naturellement avec l’usage de thym, romarin, tulsi, basilic, entre autres. Le parfum au- ra un effet répulsif.» Généralement, ces feuilles sont écrasées et placées dans les ruches. Et pour parer aux intempéries, les parois des ruches sont enduites de cire d’abeille. Auparavant, elles étaient peintes. Cette pratique a été abandonnée en raison de la toxicité de certains composants du produit.

 

En chiffres

<p style="text-align: justify;">Actuellement, 450 apiculteurs sont enregistrés auprès des autorités. Une colonie peut avoisiner entre 20 000 et 30 000 abeilles, indiquent les officiers du ministère de l&rsquo;Agro-industrie. À Maurice, on compte trois variétés d&rsquo;abeilles. Les noires qui sont d&rsquo;origine africaine, sont plus agressives et résistantes au varroa. Les jaunes, connues comme les Italiennes mais importées d&rsquo;Australie, sont plus fragiles. Et finalement, nous trouvons les hybrides, issues des deux espèces.</p>

 

 

Témoignages

<h3 style="text-align: justify;">Nadine Ramsamy Appadoo</h3>

<p style="text-align: justify;">Après avoir travaillé dans le secteur des pneus, elle s&rsquo;est tournée vers la pâtisserie et l&rsquo;apiculture. Depuis trois ans, Nadine Ramsamy Appadoo vit cette belle aventure avec son époux. <em>&laquo;C&rsquo;était mon rêve. On a vu quelques abeilles à Chamarel, notre lieu de résidence. On a commencé ainsi. Puis, l&rsquo;amour des abeilles s&rsquo;est développé&raquo;,</em> indique-t-elle. Aujourd&rsquo;hui, la responsable de Nadi&rsquo;Miel compte une vingtaine de ruches et ne peut plus s&rsquo;en passer. En effet, la reine des abeilles est une source de motivation pour l&rsquo;apicultrice.<em> &laquo;Elle est comme une maman. Au même titre, je me sens comme une reine et importante.&raquo;</em> Depuis, Nadine Ramsamy Appadoo est au four et&hellip; à la ruche. En complément à sa production de miel, elle fabrique désormais 14 varié- tés de gâteaux maison avec des fruits de sa cour.</p>

<h3 style="text-align: justify;">Anita Larché</h3>

<p style="text-align: justify;"><em>&laquo;Depuis longtemps, mon mari et moi partageons la passion pour le miel. Moi, je suis plus active depuis trois ans et demi&raquo;</em>, déclare Anita Larché. Enseignante de profession, elle s&rsquo;implique davantage dans la production de ce nectar. Aujourd&rsquo;hui, elle gère 250 ruches et produit environ 2 à 3 tonnes de miel par an.<em> &laquo;Cela demande beaucoup de patience mais c&rsquo;est un domaine très intéressant. Les abeilles sont très importantes pour la nature&raquo;,</em> confie-t-elle.</p>