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Liberté, égalité, Mbappé !

18 juillet 2018, 07:49

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Liberté, égalité, Mbappé !

Kylian Mbappé est champion du monde à 19 ans. Cristiano Ronaldo et Lionel Messi, monstres sacrés du football moderne, n’ont jamais remporté un Mondial. Shocking ! Le jeune surdoué du PSG a brillé en Russie, avec quatre buts (sans penalty SVP !) Une précocité qu’on n’avait plus vue depuis Pelé à la Coupe du monde 1958. Joli symbole.

N’allons pas trop vite en besogne pour dire qu’il sera ceci ou cela. Il est très en avance par rapport aux joueurs de son âge, c’est avéré, mais donnons-lui le temps d’avancer et de grandir sans brûler les étapes. Même si son accélération dévastatrice à la Thierry Henry, ses dribbles qui cassent les reins adverses, son culot et son sens de la répartie ont déjà subjugué le monde.

Kylian Mbappé est né à Bondy (en Seine-Saint-Denis) en 1998, après que la France ait remporté sa première Coupe du monde, le 12 juillet de cette même année. Et dire qu’il vient de contribuer à offrir une deuxième étoile sur le maillot des Bleus, vingt ans après France 98 et la génération Deschamps-Zidane-Barthez...

La France peut être fière de cette pépite et de son équipe de foot très imprégnée de la diversité de la société française. Bien entendu, ça ne fera pas plaisir à tout le monde. Surtout pas à ceux qui s’amusent à véhiculer sur le net des photos montages avec une équipe de France avec un seul joueur de couleur datant de 1984 (Jean Tigana) comparée à celle beaucoup plus ‘colorée’ de 2018 en parlant de… réchauffement climatique ! Ou ceux qui comptabilisent le nombre de joueurs musulmans de l’équipe... Parenthèse : personne ne souligne qu’il n’y a plus UNE star qui fait gagner l’équipe, époque Platini ou Zidane, mais un collectif… Passons.

La question de l’immigration et des migrants est sensible, pas seulement en France. Celle des religions d’autant plus. On ne réglera pas ça ici. Le mouvement des populations est une question politique épineuse sans réponses toutes faites. Vivre en autarcie, auto-centré sur soi-même et fermer ses frontières, voir ériger un mur entre les ‘envahisseurs’ mexicains et le gentil habitant américain par exemple ? Ou accepter tout le monde indistinctement au nom des grands principes des droits de l’homme et de l’humanisme ? L’un et l’autre ne sont pas viables. Tout n’est pas tout noir, ou tout blanc (sans jeu de mots !).

Lors de passionnantes discussions avec des journalistes français, formateurs à l’école supérieure de journalisme de Paris (ESJ), ils ont reconnu avec regret l’échec de la France ‘black-blanc-beurre’ vantée par les médias après France 98. De cette harmonie sociale qui n’aura duré que quelques semaines. De ce vivre ensemble si dur à trouver aujourd’hui.

La société française actuelle est clivante, ce qui peut sembler paradoxal à l’heure où nous vivons dans un monde de plus en plus globalisé. Mais, nos confrères venus de l’Hexagone s’extasient pourtant devant une chose : l’exemple mauricien. Son brassage pluriethnique. Sa société multicolore. Sa vie paisible et harmonieuse.

Sommes-nous conscients de cela ? Pensons-nous à nous unir et à sauvegarder cette paix que le monde nous envie plutôt que de nous diviser à chaque sujet de société ? Car on est bien servi ces derniers mois ! Nos politiciens ont bien compris cela et en jouent souvent pour exister.

Mais pourquoi une majorité de Mauriciens déteste-t-elle autant la France et son équipe de foot depuis dimanche soir ? Les commentaires chauvins ? Il faudrait déjà commencer par différencier le style anglo-saxon, pragmatique («Yes it’s a goal !»), de celui des pays latins, fervent etpassionné («Gol, gol, gol, goooool de Neymaaaaar !»). Ou alors changer de bouquet satellitaire. Radical, mais efficace. Mais on verra si le Mauricien est moins cocardier que le Français quand il parlera de ses athlètes et de ‘son’ Club M, l’an prochain, aux Jeux des îles.

Autre critique véhémente : l’équipe de France devrait remercier l’Afrique pour sa victoire parce qu’il n’y a pas de ‘vrais Français’ au sein de la bande à Didier Deschamps…

Oui, vous avez bien lu. Au risque de me répéter, quand Vikash Dhorasoo portait le maillot de Bleus en finale du Mondial 2006 en Allemagne, ses origines mauriciennes ne dérangeaient personne chez nous non ? Et même dans les médias en Inde, où aucun footballeur n’a jamais percé à ce jour, on évoquait la fierté d’avoir un fils de la diaspora comme Dhorasoo, évoluant à un tel niveau du football mondial !

Certes, Kylian Mbappé, par exemple, est né d’un père camerounais et d’une mère algérienne mais il est né en France (seuls 2 joueurs sur les 23 sont nés à l’étranger et sont arrivés sur le territoire à l’âge de 2 ans) et c’est la France qui les a formés, comme tous les champions du monde 2018. L’Hexagone peut remercier l’Afrique pour son héritage oui, mais cette équipe est aussi le reflet de la société française avec sa diversité et une forte représentation d’enfants issus des banlieues parisiennes. Ils jouent pour le pays où ils ont grandi, où ils ont sans doute le plus d’affinités, même si tout n’y est pas rose.

Commentaire éclairant à ce titre de François Colin, un Français qui vit à Maurice, sur les réseaux sociaux : «Cette victoire c’est celle de la jeunesse, de la diversité et de l’unité. Ca dépasse le football. (…) Nous sommes un peuple multi-culturel comme les USA, le Brésil ou… Maurice !»

Maintenant, il reste la question de la bi-nationalité. Chaque joueur peut choisir le pays qu’il veut défendre avant d’honorer sa première sélection. Dommage pour le Cameroun, que Mbappé et Samuel Umtiti n’ait pas choisi leur pays d’origine… Que dire de plus ?

Les champions du monde 2018, qui deviennent du coup la nouvelle référence du football après le règne espagnol (2010) et allemand (2014), ne regrettent probablement pas aujourd’hui d’avoir choisi de défendre le maillot bleu.

C’est peut-être éphémère mais les Bleus de 2018 fédèrent la population française, surtout les plus jeunes, car cette équipe leur ressemble. Elle est simple et ne se prend pas la tête. Elle a juste écrit son histoire. Si loin des clichés ‘les racailles n’aiment pas la patrie’. Ces Bleus 2018 sont sympathiques et attachants à l’instar de Paul Pogba, qui s’est improvisé MC à l’Elysée aux côtés du chef de l’État, Emmanuel Macron, lundi dernier. Il a même lancé la Marseillaise et chauffé le ‘public’, bousculant tous les protocoles. Sacrée diversité Made in France !