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Sarita Boodhoo: «J’ai retrouvé la maison familiale en Uttar Pradesh»

20 février 2018, 01:45

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Sarita Boodhoo: «J’ai retrouvé la maison familiale en Uttar Pradesh»

Sept ans séparent le moment où Sarita Boodhoo entame des recherches généalogiques et ce jour de décembre 2017, où elle visite la maison ancestrale, dans l’Uttar Pradesh. Récit.

Sa terre d’origine, Sarita Boodhoo, auteur, présidente de la Bhojpuri Speaking Union, l’a foulée tant de fois. Ses voyages l’ont menée à Ballia et Darampur. Mais c’était sans savoir que c’est de là qu’est parti son ancêtre, Makhun, travailleur engagé arrivé à Maurice en 1872. Elle a retrouvé le chemin de la maison ancestrale il y a deux mois à peine.

C’est en faisant des recherches pour une tierce personne que Sarita Boodhoo tombe sur des documents qui concernent sa famille.

Sarita Boodhoo avec ses cousins de la quatrième génération devant la maison ancestrale.

Le 12 mai 2010, direction le Mahatma Gandhi Institute oú sont conservées les archives de l’immigration indienne. «On m’explique qu’il faut d’abord aller à l’état civil, retrouver l’acte de naissance de mon père, de mon grand-père ainsi de suite, jusqu’à ce que j’obtienne l’Immigrant number du premier ancêtre qui est venu à Maurice.»

De prénom à nom de famille

En remontant la filière, elle tombe sur Makhun, arrivé à Maurice en 1872, à l’âge de 18 ans, à bord du navire Hindustan. Il est engagé sur une propriété à Montagne-Blanche.

«A l’arrivée de l’immigrant, on lui demande son nom. Le premier nom qu’il donne, c’est ce qui devient le nom de famille de tous les descendants nés à Maurice.» Un patronyme qui devient Makhan au fil du temps.

Aller-retour entre l’Inde et Maurice

Makhun est originaire de Darampur (Dorapore), à Ballia, qui se trouvait auparavant dans le Bihar, mais qui est aujourd’hui dans l’Etat de l’Uttar Pradesh. «À l’époque, il y a eu diverses crises. Le pandit que fréquente Makhun faisait l’aller-retour entre l’Inde et Maurice. Le jeune Makhun suit ce pandit pour aller chercher du travail à Calcutta. Il n’est jamais revenu. Les descendants en Inde m’ont dit que c’est ce que leurs grands-parents leur avaient raconté.»

Makhun, travailleur engagé, est arrivé en 1872.

L'aide d'un pandit et d'un instituteur

En 2012, lors d’un séjour en Inde, auprès du pandit Kubey Mishra, «c’est le premier à faire des recherches sur les chansons bhojpuri à Maurice en 1976. Cet érudit m’a énormément aidée», Sarita Boodhoo fait la connaissance d’un homme providentiel. Il s’agit de Ram Nivas Yadav, un instituteur.

Dans son temps libre, il ne rechigne pas à enfourcher sa moto pour poursuivre les recherches du côté indien. «Il avait entendu parler de mon travail, notamment à travers des articles dans la presse indienne. Il a accepté de m’aider sans rien demander en retour.»

Moqueries

Mais sa bonne volonté se heurte à«des fonctionnaires indiens qui se moquent de lui», affirme Sarita Boodhoo. Ils ne comprennent pas pourquoi il cherche d’aussi vieux papiers. «On lui dit qu’il perd son temps». Ram Nivas Yadav persévère. Il fouille dans les cadastres de Ballia. «Si les ancêtres possédaient un terrain, c’est plus facile de trouver des documents».

Eureka. En mars 2012, non seulement Ram Nivas Yadav trouve des documents, mais il se rend sur place à Darampur. Sauf que le séjour de Sarita Boodhoo tire à sa fin. Elle doit rentrer.

Les cousins de la quatrième génération

Retour en Inde en 2014. Entre-temps, des liens se sont tissés. Ram Nivas Yadav a rencontré les cousins de la quatrième génération de Sarita Boodhoo.

L’année suivante, Sarita Boodhoo obtient la carte People of Indian Origin, convertie en Overseas Citizen of India, en 2016. La même année, elle met le cap sur Bénarès. Une première rencontre est organisée entre cousins de la quatrième génération.

Elle fait la connaissance de Rambeeas Rai et de sa fille, aujourd’hui décédée. Ils sont les descendants du frère de Makhun. La famille reste en contact via WhatsApp.

Nouvel an avec sa «nouvelle» famille

Fin 2017, nouveau voyage dans la Grande péninsule. Guidée par Ram Nivas Yadav, Sarita Boodhoo débarque à Ballia. Elle n’a prévenu personne et arrive le 14 décembre 2017. Sur place, la nouvelle se répand.

Tout le village est au courant. On l’accompagne jusqu’à la maison ancestrale qui a au moins 200 ans. Sarita Boodhoo passera un nouvel an plein d’émotions avec sa «nouvelle» famille.

La question de caste

Les documents attestent que Makhun, dont le nom de famille est en réalité Rai, est de la caste des «bhumihar brahmin». «Quand on remonte encore plus loin, la famille portait le titre de thakur, qui désigne des notables et propriétaires terriens», explique Sarita Boodhoo.

«La première fois que Ram Nivas Yadav (NdlR : celui qui a aidé Sarita Boodhoo dans ses recherches) s’est rendu au village, les gens étaient un peu chiffonnés. Ils se demandaient si on venait réclamer un héritage.» Une fois rassurés sur les intentions de la cousine mauricienne, ils ont partagé avec elle le fruit de leurs propres recherches généalogiques. «Ils sont remontés 300 ans en arrière.»