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Réinsertion: ancien toxicomane, nouveau marié

12 février 2017, 17:53

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Réinsertion: ancien toxicomane, nouveau marié

 

Il a su transformer son cauchemar en conte de fées. Nageem Karimullah, autrefois «marié» à la drogue, a épousé sa princesse, Izarah. Après des années de lutte, il a su dire non à la souffrance et oui à ses rêves. Récit.

Nageem Karimullah n’a pas toujours été un enfant de chœur. Mais son cœur, il n’a pas hésité à le confier à Izarah. Ce couple de quadragénaires s’est uni, pour le meilleur, après avoir connu le pire. La cérémonie religieuse a été célébrée au centre Idrice Goomany, vendredi.

Dans la petite salle, pas de musique, point de décoration. Pas de berline non plus en guise de carrosse. Les invités: quelques proches et des travailleurs sociaux. Nageem Karimullah portait une djellaba noire et un keffieh blanc. La tenue de la mariée était, quant à elle, rose et or. Le maître-mot: la simplicité.

«Je voulais qu’elle sache tout de moi, je ne voulais rien lui cacher.»

 

Les tourtereaux se sont connus l’année dernière à travers une amie commune. S’en est suivi le traditionnel échange de coordonnées. Puis les conversations interminables. «Depuis le début, je voulais qu’elle sache tout de moi, je ne voulais rien lui cacher.» Nageem, 45 ans, a alors révélé à Izarah qu’il est un ancien toxicomane et est séropositif. De fil en aiguille, l’ouvrière qui travaille dans une usine a tissé des liens forts avec celui qui allait devenir son époux. Malgré son lourd passé et ses défauts.

Nageem Karimullah est originaire de Vallée-Pitot. Cet électricien de profession a d’abord touché aux interdits par curiosité. Il a commencé par une cigarette par-ci, un joint par-là. Puis, il est passé au «siro tousé», pour finalement se retrouver à consommer des drogues dures.

À l’âge de 17 ans, il est rejeté par sa famille. La descente aux enfers du jeune Nageem démarre. «Péna plas kot kapav dormi dan Porlwi ki mo pa koné…» admet-il. Nageem dort souvent à la belle étoile. Il se met à faire les poubelles pour se nourrir. Il «tras-trasé» à droite et à gauche pour pouvoir se payer sa dose quotidienne. Sa première épouse le quitte, il est séparé de ses deux enfants.

«Les jeunes ont accès trop facilement à la drogue de nos jours.»

 

Abri de nuit, trottoir, cellule policière, le toxicomane a tout connu. Son dernier séjour en prison a duré 18 mois. Libéré de prison en 2012, il se retrouve une nouvelle fois dans la rue. Il frappe alors à la porte du centre Idrice Goomany. Il est accueilli par Imran Dhannoo, le responsable. Lentement, mais sûrement, Nageem commence à remonter la pente.

Grâce au traitement à la méthadone, à sa volonté de s’en sortir et l’aide des travailleurs sociaux, il se reconstruit aussi une personnalité. Rencontrer Nicolas Ritter, de PILS, a également été un tournant important dans sa vie, confie Nageem. Il est aujourd’hui Peer Educator au sein de cette organisation.

Retour au présent. Nageem prend la main d’Izarah dans la sienne. Il voit désormais la vie autrement. «Les jeunes ont accès trop facilement à la drogue de nos jours. Il faut éduquer les gens aussi, il faut qu’ils agissent autrement face aux toxicomanes et aux séropositifs.» S’il pousse ce coup de gueule, c’est parce qu’il a ressenti le dédain des gens à son encontre. «Éna réfiz donn ou lamé, pa lé prié kot ou.» Des gestes anodins, qui blessent «au plus profond de l’âme», avoue-t-il.

Le souhait de Nageem et Izarah ? Que les jeunes évitent de tomber dans le piège de la drogue. Un gouffre duquel on a du mal à sortir. Raison pour laquelle le nouveau marié compte redoubler d’efforts pour aider ceux de Vallée-Pitot.

Son temps, il le consacrera également à son épouse. Qui lui a montré que les cauchemars pouvaient se transformer en contes de fées.