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Alain Auriant

10 décembre 2005, 00:00

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La troisième fois a été la bonne. Alain Auriant a enfin sa revanche sur tous ceux qui n?ont jamais cru en sa musique. Il est aujourd?hui, avec Sandra Mayotte, le deuxième artiste mauricien, récipendiaire du prestigieux Kora Award, les trophées de la musique africaine. Une reconnaissance qui a valeur de revanche, puisque Alain Auriant, comme il le dit lui-même, n?a jamais fait partie du clan des artistes populaires de notre île.

Son séga à lui ne mélange pas des rythmes frénétiques, il est plutôt à part. L?artiste a toujours été fasciné par les musiques diverses, c?est la raison pour laquelle, son séga ne se conjugue pas à la sauce populaire. Il n?est donc pas diffusé en boucle sur les chaînes de radio. Une injustice que l?artiste ne s?explique pas. Cette soif de reconnaissance même si elle est légitime, se voit aujourd?hui couronnée de succès, puisque l?Afrique, terre de nos racines, lui a décerné le prestigieux Kora Award, dans la catégorie Meilleur artiste de l?Afrique de l?Est.

Traversée du désert

Le jury, friand d?inconnu, s?est laissé convaincre par la chanson française d?Alain Auriant, Je t?aime encore, qui figure sur la compilation French Kiss. Cette compilation, sponsorisée par le Centre Culturel Charles Baudelaire, et réalisée par Richard Hein et le Studio Kapricorn, lui a porté chance. Alain Auriant a tenté de faire de la World Music à la française, et le jury, convaincu de l?authenticité de sa démarche, s?est laissé séduire. «Mone senti moi bien a partir du moment ki mone perform. Kan jury ine designe moi, mone gagn enn sok. La zwa la indescriptible! » Alain Auriant, qui travaille depuis ses sept derniers mois aux Maldives, a connu de nombreux démêlés, avant de pouvoir participer aux Kora Awards.

Vers d?autres cieux

Une fois sa candidature soumise et acceptée, il a dû remuer ciel et terre, pour se retrouver sur la scène du Festival du Kora Awards, entouré d?amis musiciens qui ont bien voulu l?accompagner. Faute de moyens, il a failli râter son rendez-vous avec le destin. C?est finalement grâce à Air Mauritius, Saloni Dusoruth, productrice, et à sa tire-lire, qu?il a réussi à réunir la somme nécessaire pour payer son billet d?avion, ainsi que ceux de ces musiciens.

Une traversée du désert au cours de laquelle, il aurait pu laisser des plumes. La vieille incompréhension entre l?Etat et les artistes, ne le fait même plus taper du poing sur la table. Et malgré tout le «mépris», dont il est l?objet, il n?a pas manqué de remercier l?île Maurice, lorsqu?il a reçu son trophée.

Las de s?être battu pour que sa musique sorte des placards, dans lesquels on la confine, fatigué de la quasi indifférence dans laquelle il s?est retrouvé sur la scène du Kora Awards, Alain Auriant a aujourd?hui, toutes les raisons de retrouver le sourire.

Son tour de chant lors du festival qui a précédé la cérémonie de remise de récompenses et qui avait pour but de marquer les dix ans des Kora Awards, lui a permis de taper dans l??il de Steven Alvin Naruseb, un producteur zimbabwéen. Ce dernier lui a déjà commandé un reggae pour un de ses artistes, une certaine Stella Kavendjii.

Une tournée africaine qui porte le lauréat du concours, dans chaque catégorie, devrait le mener bientôt vers d?autres cieux. L?artiste est malgré tout habité d?un rude réalisme, comme d?une forme de désenchantement. «Mo pense mo pa pou capav sanz mentalite dimoune, mais si mo ressi trouv enn label ek enn producteur, mo capav fer enn kariere kouma Denis Azor ou Eric Triton, mai dan mo manière. »

Et Alain Auriant a raison de croire en sa musique. Mieux encore, quand c?est l?Afrique qui lui tend les bras. Renoncer à elle, serait comme cesser d?exister.