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Marchandages

30 novembre 2013, 05:37

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Fait notable : c’est le leader d’un petit parti qui fait la leçon aux principaux dirigeants des partis politiques traditionnels. La posture audacieuse de Mario Bienvenu face aux marchands ambulants à Curepipe mérite d’être saluée – c’est ce que nous avons choisi d’illustrer en titrant en Une hier : «Curepipe donne l’exemple.» Malgré une pluie de critiques des marchands ambulants, de leurs proches et des politiciens qui les soutiennent, par ailleurs ses propres électeurs, il fait ce que la mairie de Port-Louis et le gouvernement central n’arrivent pas à faire, c’est-à-dire libérer la capitale et ses principales artères de l’emprise des marchands ambulants. En se rangeant du côté de la justice, le maire de Curepipe ne se crée pas que des ennemis (ceux qu’ils délogent) mais également de nombreux supporters, dont le front commun des commerçants de Maurice, dont le lobby est devenu, au fil des années et des élections, bien moins fort que celui des incontournables marchands ambulants.

 

Après des années de laisser-faire par les autorités, sur une initiative de la «Market Traders Association», la Cour suprême devait statuer le 16 août 2012 : interdiction aux marchands ambulants d’opérer dans un rayon de 500 mètres du marché central. La mairie de Port-Louis et la police ont été sommées d’appliquer cette décision.

 

Toutefois, cette décision de la Cour suprême a singulièrement embarrassé le gouvernement central et ses représentants élus des régions portlouisiennes qui voulaient protéger leurs votes. C’est au Parlement que cela vient d’être démontré par le ministre des Administrations régionales qui a expliqué dans des termes polis, que le gouvernement a le cul entre deux chaises : «Government which firmly believes in the separation of powers provided in our Constitution, complied with the judgment. However, at the same time, as a caring and responsible Government which is sensible to the plight of these hawkers, it set up a high level Ministerial Committee under the Chairmanship of my colleague, the vice-Prime Minister, Minister of Public Infrastructure, National Development Unit, Land Transport and Shipping and comprising other colleague Ministers, to urgently identify possible sites for the relocation of these hawkers so that they can earn a livelihood.»

 

Le gouvernement se montre davantage sensible à la cause des marchands ambulants qu’aux revendications des commerçants qui paient dûment leurs taxes car il ne fait que suivre le rapport des forces politiques sur le terrain. On assiste dès lors à un véritable bras de fer entre le gouvernement central et la mairie de la capitale qui est sous le contrôle du MMM. On voit même des ministres enjamber la grille de la municipalité avec les marchands ambulants pour afficher leur soutien à ces derniers et défier la municipalité.

 

À suivre les zigzags des politiciens, que ce soit au Parlement ou lors des meetings, l’on ne peut que déduire que le dossier brûlant des marchands ambulants transcende les partis politiques et les collectivités locales. À Curepipe, les conseillers du MMM (et le leader du Parti Malin) manifestaient hier contre la décision de Bienvenu de mettre de l’ordre à la veille des fêtes de fin d’année; fêtes qui ont transformé nos villes et villages en véritables souks. Mais à Port-Louis, le problème est autrement plus grave, outre d’être la vitrine du pays, le souk s’y est installé de manière permanente, avec la bénédiction des ministres de la République, qui encouragent une économie parallèle au nom d’une approche humanitaire. Demain, les rôles pourraient, encore une fois, être inversés. Mais qu’à cela ne tienne, les marchands ambulants ont trouvé le bon filon pour faire du marchandage : les politiciens de tous les partis traditionnels. Selon la saison, ils sont soit défenseurs de marchands, soit administrateurs saisonniers…