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La solitude de SAJ

19 septembre 2010, 05:40

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Il est bien seul, le président de la République. Depuis le décès du vice-président Angidi Chettiar, sir Anerood Jugnauth (SAJ) et d’autres Mauriciens se posent une double question. Qui va remplacer le brave Angidi ? Et surtout, conservera-t-on le poste que ce dernier a occupé jusqu’à 20h30 ce mercredi ? Une personne, une seule, a des éléments de réponse : le Premier ministre. Mais encore faut-il que Navin Ramgoolam ait commencé à réfléchir à la question !

Dans le cadre de ce type de remplacement, l’équation à résoudre est complexe. Mais elle peut néanmoins être posée clairement. Les éléments à prendre en compte sont en effet connus. Il y a d’abord la perception.

Ramgoolam aurait lui-même identifié en toute lucidité le problème il y a quelques mois. Le Premier ministre, l’un de ses adjoints et la Présidence sont tous issus de la même ethnie…plus précisément de la même caste.

Nommer le même type de profil en remplacement de Chettiar ne ferait alors qu’accentuer cette perception.

Le prochain vice-président, s’il y en a un, risque donc fort ne pas être un membre de la population majoritaire.

Il faudra chercher ailleurs.

Mais où ? Si le fait que le vice-président doit provenir d’une frange minoritaire de la population apparaît comme une évidence, il est par contre moins aisé d’identifier celle-ci. Ramgoolam n’est pas sans savoir que Rashid Beebeejaun ne jouit pas d’une cote de popularité folle auprès de l’électorat traditionnel travailliste.

Il est donc très peu probable qu’il installe à la vice-présidence une personne ayant le même profil.

Car il risquerait alors d’étayer la thèse selon laquelle l’actuel numéro 2 du gouvernement exerce une trop grande influence sur lui.

Restent donc deux profils susceptibles de faire l’affaire.

D’abord l’évidence. On ne remplace pas une pomme par une poire. Si un Chettiar quitte la scène, il serait logique qu’on le remplace par un autre travailliste provenant de la même minorité. Ce serait là un signal fort renouvelé à l’intention d’une composante de la population dont on dit que la couleur du coeur oscille entre mauve et rouge.

Toutefois, sur papier, la carte Chettiar bis semble n’être qu’un second choix pour le Premier ministre. En effet, voici plus de cinq ans que Ramgoolam joue avec l’idée de réaliser un coup politique en nommant un membre de la population générale au Réduit. La place étant prise par SAJ jusqu’en 2013, Ramgoolam peut être tenté de se rabattre sur la vice-présidence pour marquer les esprits. L’enjeu, c’est la consolidation de l’image de son gouvernement auprès de la population générale. Qui, à raison sans doute, considère qu’elle est insuffisamment représentée aux plus hauts échelons de l’Etat. Malgré la présence de Xavier Duval au front bench du gouvernement. L’heure d’installer un Karl Offman bis – mais travailliste cette fois – à la viceprésidence a peut-être sonné.

Voici donc de quel côté penche la balance. Toutefois, Ramgoolam demeure un décisionnaire imprévisible.

Capable d’audace dans ses choix. Et si finalement le Premier ministre décidait de remplacer une pomme… par une poire? Et si Chettiar laissait finalement sa place à une personne pas si différente de lui. Un autre compagnon de lutte et ami de sir Seewoosagur Ramgoolam. Mais qui aurait une particularité par ailleurs: celle de provenir de la minorité laissée officiellement orpheline au Parlement depuis la fi n de mandat de Sylvio Tang.

Tout est possible. Toutefois, ce qui le semble moins, c’est l’abolition de la vice-présidence. On l’a vu, cette fonction est trop stratégique, trop utile pour satisfaire tel ou tel électorat, voire récompenser un proche, pour être rayée de nos institutions. Au diable donc les arguments faisant valoir que ce poste coûte inutilement cher à l’Etat. SAJ est bien seul. Mais quelque part, il doit savoir qu’il ne le restera pas longtemps.

Rabin BHUJUN