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La construction oui, mais pour faire quoi ?

12 octobre 2011, 08:42

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Le mémoire pré-budgétaire du «Joint Economic Council» (JEC) qui était très attendu est enfi n arrivé la semaine dernière. Comme d’habitude, l’analyse des enjeux stratégiques qui nous guettent sur le plan économique et les solutions proposées sont justes. A quelques exceptions près.

D’où vient cette impression de déjà-vu ? Sans doute parce que le JEC réitère année après année les mêmes critiques sur ce qui ne va pas au niveau systémique et qui nous empêche d’atteindre des courbes de croissance supérieures. C’est comme, pour prendre un exemple parmi d’autres, le scandale de ce «Utility Regulatory Act» qui a été voté depuis des années mais qui n’existe que sur papier seulement. Or cette loi aurait le mérite d’ouvrir les opportunités d’investissement dans les énergies renouvelables, de Maurice ou de l’étranger.

Ce n’est pas parce qu’on a l’impression de prêcher dans un désert qu’il faut s’arrêter de dire ce qu’il faut dire. Le JEC fait preuve de constance et de cohérence. Mais il est un domaine où la mouture 2011 du mémoire prébudgétaire de l’«apex organisation» du secteur privé surprend.

C’est quand il consacre tout un volet aux difficultés du secteur de la construction. On croirait lire un papier préparé par l’association des compagnies de construction. Certes on y découvre des choses aberrantes sur l’octroi des permis et la fi scalité dans ce secteur.

Mais deux questions nous taraudent. Ils ont fait comment, ceux qui ont déjà construit ? Le groupe ENL a injecté Rs 3,1 milliards comme s’il s’agissait d’une bagatelle dans un «shopping mall».

«Cascavelle» ouvrira ses portes bientôt au coût de Rs 1 milliard. Il y a eu les Vallées d’Helvétia, Riverside à Rivière du Rempart et bientôt l’usine de St-Pierre sera probablement transformée en complexe commercial aussi.

Par ailleurs, il suffi t de jeter un coup d’oeil sur le site du ministère de l’Environnement pour se rendre compte que les morcellements, IRS ou RES, il n’y a pratiquement que cela comme projet soumis. Et puis, on fait toute une histoire sur les diffi cultés supposées de la construction et du secteur foncier. Mais pour faire quoi ? Encore des centres commerciaux et des morcellements ?

Nous comprenons fort bien que le JEC doit aussi défendre l’intérêt de ses membres. Mais pas comme cela. Ce n’est pas en nous promettant Rs 6 milliards d’investissements qu’on sera convaincus. Certes, les maçons seront contents, mais les plus heureux seront les compagnies de construction et les developpeurs des projets immobiliers. Une fois terminé, Bagatelle a annoncé la création de 1 500 emplois. Le calcul est simple, avec Rs 6 milliards d’investissement, on va créer 3 000 emplois. Ce n’est sûrement pas cela qui
va résoudre le chômage.

Si on nous avait dit que la construction des complexes commerciaux, d’hôpitaux ou d’universités faisait partie d’un vaste projet de développement qui ferait de Maurice un «hospitality and shopping hub», que les étrangers pourraient avoir une résidence secondaire à Maurice, que l’on développerait davantage le tourisme medical et le «knowledge hub», là, cela aurait pris une autre dimension. Et si en plus parallèlement, on parvenait à résoudre le problème de l’accès aérien : ce serait une cerise sur le gâteau. Car les Mauriciens n’auront pas le pouvoir d’achat pour faire tourner tous ces complexes commerciaux.

En faisant l’impasse sur le «bigger picture», le dossier du JEC ressemble à une «shopping list». Casser le thermomètre ne fait pas baisser la fièvre.

Stphane SAMINADEN