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Je suis perplexe

4 avril 2010, 05:32

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Incompréhensible, impensable, inimaginable ; et par ailleurs inqualifiable. Que Navin Ramgoolam ait fi nalement décidé de ne pas s’allier au MMM peut se comprendre. Ce qui n’est pas intelligible, c’est l’ampleur des concessions qu’il a faites à un parti dont la faible représentativité lui a été démontrée. Plus inconcevable encore est sa disposition à sacrifi er son vice-Premier ministre et ministre des Finances, l’homme qui a donné à sa mandature l’essentiel de ses succès. Je ne parle pas d’ingratitude, j’en suis à mesurer l’insanité.

Mais peut-être que tout se tient. En abandonnant l’idée d’une alliance avec le MMM, Ramgoolam a tourné le dos à une certaine forme de gouvernance. Le MMM ne possède pas toutes les vertus dont il se drape volontiers, mais il est certain qu’un Bérenger au sein du gouvernement aurait été un sacré gêneur pour le Ramgoolam tyrannique et omnipotent qui préside le Conseil des ministres. Il est vrai que la seule présence de Bérenger aurait été un frein aux pratiques scandaleuses que nul n’a osé condamner.

J’ai des raisons d’affi rmer que c’est parce qu’il entend continuer à s’entourer de faibles qu’il peut mener à la baguette que Ramgoolam n’a pas voulu renouveler l’expérience du têteà- tête déstabilisant avec le Bérenger hyperactif, impatient et irritant qu’il a connu au gouvernement. Cette posture du leader travailliste n’est pas très noble, elle n’est pas dans l’intérêt de la nation, mais à la limite, cette idée d’une molle stabilité peut se défendre.

Ce qui n’est pas clair, c’est la raison qui incite Ramgoolam à ouvrir ainsi un boulevard à un MSM dont il a fait mesurer le poids et dont il sait qu’il ne lui apporte rien au plan électoral. Pourquoi offrir 30 % des investitures à un parti qui pèse 4 % des voix ? Une explication possible est en effet le syndrome du chat au « dile so » qui craint un possible regroupement de ses adversaires. Mais l’argument ne tient pas la route : les études commandées par Ramgoolam lui indiquent que même réunies, les oppositions sont données battues. Et qui plus est, selon la même étude, une alliance avec le MSM fait perdre des voix aux travaillistes. Alors ? Je donne ma langue au chat… Et si Jugnauth a vraiment réussi à faire croire à Ramgoolam qu’il avait une option MMM, alors il l’aura bien emberlifi coté.

Le plus dramatique, c’est le risque que le Premier ministre en vienne à sacrifier son ministre le plus compétent, son fi dèle collaborateur, son compagnon des mauvais jours, pour satisfaire les ambitions de Pravind Jugnauth. Ramgoolam commettrait là une triple erreur : il priverait le pays d’une compétence hors pair ; il perdrait personnellement son conseiller le plus fiable ; il mettrait en selle, bien tôt, le challenger qui va hâter son éviction programmée. Plus injustifiable encore, il intronise le plus farouche opposant de Sithanen, le contestataire le plus virulent des réussites économiques de son gouvernement.

Et le MMM ? Le combat est inégal à tous les égards, mais il possède quelques cartes. Je crois que Cassam Uteem est une carte maîtresse. C’est une des rares personnalités du pays à bénéficier d’une audience nationale. Le fait qu’il ait assumé les fonctions de président de la République ne doit pas le priver de la possibilité de continuer à servir son pays. Tous nos présidents ont été des hommes politiques qui n’ont jamais cessé de l’être. Que fait Anerood Jugnauth depuis des mois ?

Je ne crois pas le MMM en mesure de nourrir de grandes ambitions pour la prochaine échéance, mais un retour d’Uteem sera le début de la reconstruction, seuls les benêts de son bureau politique ne l’auront pas compris.