Pour une fois qu’on peut dire merci au ministre Baichoo, pour une fois qu’on peut féliciter Ramgoolam, pour une fois qu’on peut applaudir le gouvernement, allons-y gaiement. D’abord souvenons-nous de notre vie d’avant… Combien étions-nous à nous plaindre, à contenir notre rage, notre nervosité quand, venant du Nord, et souhaitant aller vers les Plaines-Wilhems, Ébène ou le Sud, on devait obligatoirement traverser Port-Louis pour arriver souvent en retard aux rendez-vous avec la sempiternelle excuse de la spirale des bouchons. Combien de temps perdu, d’énergie gaspillée, de bonne humeur massacrée…

Et là, depuis quelques semaines, après l’ouverture de la route Terre Rouge-Verdun, oubliés ces embouteillages enfermés désormais à double tour dans le tiroir de naguère, finies les crises de nerfs, adieu aux coups d’œil réguliers sur l’heure qui tourne, au revoir tristesse… Bonjour bonheur, bonjour plaisir !  Plaisir de conduire, plaisir de redécouvrir la montagne, les belles vues vallonnées, les jolis villages, plaisir en direction de Terre-Rouge, d’admirer au loin les îles du Nord et le coin de Mire qui s’assoit au bord de l’océan. Il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas reconnaître à quel point cette route change nos vies. Et même si elle est plus longue de quelques kilomètres, le gain de temps n’est pas négligeable. Quand on pense que dans quelque temps, avec l’ouverture de la route vers Valentina, le rond-point de Phoenix deviendra un mauvais souvenir, comment ne pas retrouver le sourire… 

Certes, tout n’est pas parfait sur la route Terre-Rouge/Verdun. D’aucuns s’interrogent sur la pertinence du nombre de ronds-points qui ne semblent pas servir à grand-chose, d’autres, comme témoigne un article de l’express lundi, parlent de « confusion », de « cafouillage ». Au fond, et l’inspecteur Ashok Mathar de la Traffic Branch Unit l’a souligné dans le même article de presse, « il ne faut pas que les automobilistes conduisent par habitude, mais par observation. » Et on pourrait ajouter qu’il suffirait surtout de bien lire les panneaux de signalisation. Et de se comporter comme des automobilistes normaux qui utilisent cette agréable route pour rallier un point à l’autre. Or, qu’a-t-on vu ces derniers dimanches depuis l’inauguration de cette route ? Des scènes surréalistes. Ainsi donc, dans le style « a nou al visit la rout Terre-Rouge-Verdun » on découvre avec stupeur une longue file de véhicules qui se garent tout simplement sur la bande d’arrêt d’urgence alors que les occupants s’amusent à « marche marcher », ou à grimper sur les monticules pour admirer la vallée en contrebas. On peut comprendre que la vue est belle. Mais, c’est faire preuve d’un je- m’en-foutisme total que de se garer sur ce genre de route quand il n’y a pas de raison urgente. 

 Pire, dimanche dernier, on a vu un couple assis tranquillement sur leurs chaises comme s’ils étaient dans leur salon. Vous imaginez ! On apporte les chaises comme pour aller à la mer, on les installe sur l’autoroute, on s’assoit et on regarde les voitures passer. C’est vrai qu’il y a un criant manque de loisirs à Maurice. Mais de là à aller pique-niquer sur la route, il y a quand même une ligne dangereuse qu’il ne faudrait pas franchir. Dans un pays où il n’y a pas une semaine sans accident,  faudrait-il arriver à une fatalité provoquée par ce genre de bêtise pour qu’on comprenne à quoi servent réellement les routes ? 

Soyons des automobilistes consciencieux, des citoyens responsables, des mauriciens civilisés. Et disons merci à Baichoo, au gouvernement en cette période festive où il est agréable de recevoir des cadeaux…