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Analyse du Budget 2014 : ce que les chiffres disent... et cachent!

8 novembre 2013, 22:09

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Deux heures et demie de discours budgétaire, ça a tendance à générer beaucoup de chiffres. Et au bout du compte, on peut parfois un peu perdre son sens de la perspective. Par exemple, si le déficit budgétaire, qui a glissé des 2 % prévus initialement à 3,7 % en 2013, sera, pense le ministre des Finances de 3,2 % du PNB, c’est relativement simple et direct. Pourtant, une variance, en 2014, du même ordre que celle de 2013, soit 1,7 %, nous mènerait à un déficit de 4,9 %, ce qui serait tout simplement désastreux !

 

Premier point donc : la marge de manœuvre est désormais beaucoup plus faible et nous ne pouvons pas nous permettre des largesses sur le déficit. La dette publique, la balance des comptes courants - d’autant que notre dépendance toujours importante sur les flux de capitaux étrangers, qui nous permet, en passant, de vivre au-dessus de nos moyens - ne diminue pas !

 

Les mesures qui ont du « poids » ne sont pas légion. Citons le Bus Replacement Scheme qui devrait assurer (si le privé y trouve son compte…) que 200 nouveaux bus du type « low semi floor type » se retrouvent sur nos routes au bout d’une année ; le scheme réduisant le coût de chaque bus de Rs 1,6 million environ. Mais si cette réduction est bienvenue, on ne nous dit pas ce que le coût ainsi réduit représente : est-ce que cela risque d’être toujours trop élevé pour intéresser les opérateurs privés ?

 

L’Expanded Africa Strategy va susciter beaucoup d’espoir, mais le gouvernement ne sera qu’un equity partner à 10 % et pas plus. Suggérons que les lourdeurs administratives que cela emmènera sont les mêmes à 1 %, 10 % ou à 50 % du capital et que beaucoup s’en dispenseront donc… Les subsides de 25 % sur le fret et de 50 % sur l’assurance garantissant le paiement des exportations pèseront par contre plus fortement.

 

Autre mesure de poids : le Housing Empowerment Scheme qui, avec la garantie gouvernementale à 20 %, réduit le « cash deposit » de l’emprunteur à seulement 5 % et qui, de plus, va rembourser jusqu’à Rs 300 000 de TVA. Ce plafond cependant indique des maisons ou des appartements à pas plus de Rs 2 millions. A voir les annonces, ne serait-ce pas un peu limitatif par rapport aux aspirations de la « classe moyenne » ?

 

Ensuite, les mesures pour aider ceux qui ont des difficultés à rembourser leurs dettes. Encore que, quand les intérêts ont atteint le montant du capital, ce n’est pas de « difficulté » dont on parle, mais « d’incapacité » de remboursement, ce qui va peut-être simplement accélérer le recouvrement des dettes par les banques.

 

Ce côté un peu illusoire, même si bien intentionné, de certaines mesures se retrouve ailleurs. Par exemple, dans le pre-paid meter du CEB qui est sensé empêcher que 5 000 familles continuent à être déconnectées du réseau électrique par an. A l’envolée rhétorique du ministre « Where there was darkness, there will now be light », ne pourrait-on pas au moins opposer la question : « Where there was no money, where will it now come from?»

 

Deux derniers exemples de ce que peuvent cacher les chiffres .On a promis des « free basic web sites » à toutes les PME du pays. Ça parait chouette, mais le site totalement gratuit sera à Rs 6 000 ! Gageons que les PME ne vendront pas beaucoup avec. Par contre, ceux qui fourniront, en vrac, des centaines de sites « standard », « plug and play », eux, peut-être ? Ensuite Rs 100 millions sont prévues pour de l’« income support » à 8 000 familles vulnérables non couvertes actuellement. Ce qui est louable et parait excellent jusqu’à ce qu’on fasse les divisions ! En effet, il s’agit de Rs 12 500 par famille et par an, soit une miette de plus que Rs 1 000 par… famille, par mois. Pas de quoi émerger de sa déchéance !

 

Voilà pourquoi, ce qui va importer en fin de compte, c’est la croissance, la création d’emplois, la productivité et donc le succès des « hubs » et « pillars » qu’on nous annonce (ocean economy, silver screen, africa strategy, green economy, aviation hub, bunkering hub, petroleum hub) et de la bonne santé des secteurs existants. Pour cela, le gouvernement - opérant pourtant dans un pays qui est 20eme au monde à l’index de « ease of doing business » - se sent l’obligation d’instituer un Fast Track Committee, sous la houlette du secrétaire financier, pour les « big impact projects », de centraliser l’octroi des « building and land use permits » au ministère de M. Aimée (avec obligation de réponse en 14 jours) et de proposer (une fois encore !) le « silent approval » faute d’une réaction au-delà de 7 jours, de la CWA, du CEB, des pompiers etc.

 

Pourquoi donc ? Il y a le feu ?