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Gorbatchev mi-Ukrainien, mi-Russe

3 septembre 2022, 08:59

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C’est aujourd’hui à Moscou qu’auront lieu les obsèques de Mikhaïl Gorbatchev, le dernier dirigeant de la défunte Union soviétique. En raison d’un calendrier trop chargé, probablement à cause de l’invasion en Ukraine, Vladimir Poutine ne sera pas présent aux funérailles de Gorbatchev, même s’il concède que ce dernier a marqué l’Histoire, mais pas forcément pour les bonnes raisons, selon la perspective expansionniste du Kremlin. 

Si Gorbatchev «était une figure valorisée en Occident», rappelle la presse internationale, «son héritage est plus compliqué en Russie», Poutine lui-même ayant souvent critiqué l’effondrement de l’URSS comme «la plus grande catastrophe géopolitique» du XXe siècle. Depuis l’histoire a été amendée plusieurs fois pour minimiser les avancées d’antan. 

Gorbatchev, né d’une mère ukrainienne et d’un père russe, a toujours évité un conflit entre les deux pays, issus d’un même peuple. Son engagement politique était principalement axé sur le rapprochement des peuples constituant l’humanité et la démolition des murs qui divisent. Il a travaillé, sans relâche, pendant sept ans pour tourner la page sur la guerre froide, qui avait coupé le monde en deux, à partir de 1945. 

Hasard du destin. Outre les six mois écoulés depuis l’éclatement de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, la disparition de Gorbatchev et les rappels de son apport comme géant politique coïncident avec l’inquiétude manifeste des experts de l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA) relative à la centrale de Zaporijjia, qui a subi des dégâts dus aux bombardements russes. Ainsi un des réacteurs en fonctionnement de la centrale a été arrêté en raison des frappes russes. Ce qui vient corser la crise énergétique en Europe. 

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La tendance historique – allant de l’oligarchie vers la démocratie – rajoute-t-elle un autre palier : la tyrannie ? Quand les Tsars, les monarques, les empereurs n’arrivent plus à satisfaire la populace et ne s’occupent que de leurs intérêts personnels / claniques / familiaux, on voit surgir la démocratie – qui revêt plusieurs formes et qui est servie à plusieurs sauces. Mais la démocratie, comme on l’a vu avec le Brexit ou l’élection de Trump, a ses propres limites. Des tyrans s’accaparent alors du système en donnant aux peuples les slogans qui les font rêver : «Let us make our country great again!» 

Alors que nous avons franchi les six premiers mois de la guerre en Ukraine, chaque pays doit prendre conscience de sa vulnérabilité par rapport à la menace nucléaire qui est brandie tant par l’Otan que par le Kremlin. Le hic dans l’histoire qui s’écrit, c’est qu’un membre permanent du conseil de sécurité de l’ONU peut facilement piétiner les principes cardinaux de la paix mondiale et bafouer le droit international en utilisant la force. Sans que l’on ne puisse l’arrêter sur le terrain. 

Depuis la fin de la Guerre froide, l’on croyait être rentré dans une période de paix durable. D’ailleurs, les dépenses de défense ont baissé de 8 % en Europe – et même de 21 % en Allemagne –, alors qu’elles sont en hausse continue en Russie, en Chine et aux États-Unis. Ce que l’on constate aujourd’hui : c’est que la Guerre froide n’est pas révolue. Poutine et l’Otan conçoivent toujours le monde sur le plan des sphères d’influence et des rapports de domination. En ce sens, ils prennent à contre-pied des décennies de politique internationale et de démocratie libérale. Ils bafouent aussi la mémoire de Gorbatchev qui n’avait pas hésité à découper son pays pour apaiser la tension mondiale… Mais son élan n’a pas été suivi. Une nouvelle guerre froide découpe notre monde et fragmente nos marchés.