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Si les «Avengers» n’existaient pas…

21 octobre 2021, 09:00

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Si les «Avengers» n’existaient pas…

Pour certains, ce sont des justiciers des temps modernes, pour d’autres, les «Avengers» locaux représentent une bande d’avocats qui instrumentalisent l’affaire Kistnen en jouant avec l’éthique juridique et en tournant indécemment un procès en spectacle après chaque séance.

Peu importe l’appréciation que chacun peut avoir des «Avengers», voire des personnalités qui dirigent ce groupe, toujours est-il qu’il faut reconnaître la justesse de leur démarche et leurs actions. C'est la veuve Kistnen qui, à chaque fois que l’occasion lui est donnée, nous rappelle comment on la traitait («fer boufon ar nou… riy nou») quand elle se rendait à la station de police pour émettre des doutes sur la mort de son époux, qualifiée hâtivement de suicide par la police.

Sans l’acharnement des avocats, sans leur recherche personnelle pour dénicher les preuves devant lesquelles la police s’était aveuglée volontairement, nous n’aurions pas eu droit à la nécessaire enquête judiciaire qui s’est révélée fructueuse au niveau des révélations : les images cruciales des caméras de surveillance disparues, la surprise du premier policier qui s’est rendu sur les lieux du drame quand il découvre que cette affaire sera traitée comme un suicide, les allégations de brutalités policières par deux amis de Kistnen. Et sans oublier, l’incroyable découverte de deux rapports, l’un sur l’examen du lieu et l’autre sur les traces d'ADN, qui n’avaient pas été présentés lors de l’enquête judiciaire et qui ont, du coup, provoqué une réouverture de l’enquête sur ordre du DPP.

Doit-on rappeler que ces rapports-là ont conclu – entre autres – à la présence d’une personne autre que Soopramanien Kistnen sur les lieux et sur une possibilité qu’il soit mort avant que son corps ne soit transporté dans le champ de cannes ? Pour toutes ces raisons, les «Avengers», qui travaillent gratuitement, demeurent admirables dans leur ténacité et leur quête de vérité. Car ils ont le mérite d’avoir ébranlé, dans l’affaire Kistnen, ce qui s’apparente à un vaste complot politico-criminel, provoquant des doutes sur certains politiciens et impliquant des hauts gradés de la police et d’autres responsables de quelques corps paraétatiques. D’où l’interrogation légitime du public : est-ce que la quantité de zones d’ombre doublées de coïncidences songeuses doivent laisser penser à un coup monté ? Est-ce que l’objectif était de maquiller un crime politique en un suicide ?

C’est dire à quel point ce coup de projecteur qui a lieu depuis le jeudi 14 octobre au travers de diverses mobilisations, pour commémorer le triste premier anniversaire du meurtre de Kistnen, est important et a sa raison d’être. Cela dit, fallait-il pour autant que les «Avengers» fassent appel aux partis politiques de l’opposition venus les soutenir dans les activités de cette fin de semaine ? Si Rezistans ek Alternativ et Bruneau Laurette ont décidé de ne pas participer aux manifestations – tout en affirmant qu’ils soutiennent l’action des avocats de la veuve Kistnen –, c’est principalement parce que Valayden et les siens ont fait appel aux partis de l’opposition.

Dans un communiqué de presse, Rezistans ek Alternativ, à travers Ashok Subron, salue le «bon travail» des avocats, tout en affirmant qu’il est «problematik ki zot pe alie zot avek bann parti politik mainstream ki finn amenn pouritir dan lespas politik nou repiblik». Une position cohérente pour Rezistans ek Alternativ qui avait également dit non à un regroupement des petits partis et des mouvements traditionnels en marge des prochaines élections municipales.

La question demeure donc : comment doit-on appréhender la démarche du groupe «Avengers» sous l’angle politique ? Avons-nous affaire à des politiciens frustrés qui, sous couvert d’idéaux nobles et d’un combat juste et salutaire, tenteront d’occuper des rôles majeurs sur l’échiquier ? Quand l’on sait que des deux principaux animateurs des «Avengers», l’un a fait le tour de presque tous les partis politiques et l’autre, après le baisemain légendaire à son ex-leader Pravind Jugnauth, a claqué la porte du MSM quand il a été laissé sur la touche par le Premier ministre, l’on pourrait s’interroger sur la démarche de s’associer aux autres partis. Parce que tout le monde le sait : rien n’est innocent en politique…