Publicité

Contrôle, contrôle, contrôle

18 septembre 2021, 10:27

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

 

Après quatre années de mandat premier-ministériel, Pravind Kumar Jugnauth démontre maintenant que son style de diriger le pays diffère grandement de celui de son père, feu sir Anerood Jugnauth (SAJ). En effet, la grande différence entre les deux porte essentiellement sur le contrôle et la gestion des institutions publiques et des compagnies privées de l’État.

PKJ privilégie le contrôle des institutions. Un contrôle total, incontesté et incontestable. Par contre, pour SAJ, ce qui comptait le plus pour lui, c’était la performance. Si un chatwa quelconque demandait à SAJ de remplacer un chef d’une compagnie d’Etat, l’ancien Premier ministre, connu pour ses répliques cinglantes ponctuées de ‘eoula’, lui demandait ceci : «Be ou kapav dirige ça, ou ?»

La gestion d’Air Mauritius par le père et le fils illustre parfaitement cette différence d’approche. Quand SAJ devint le Premier ministre incontesté après les élections générales de 1983, un lobby exerça des pressions sur lui pour qu’il se débarrasse du PD-G de la compagnie d’aviation nationale, sir Harry Tirvengadum. Il était connu de tous avant 1982 que sir Harry était proche de l’ancien Premier ministre, sir Seewoosagur Ramgoolam, et qu’il gérait un fonds à partir des ressources d’Air Mauritius pour financer une entreprise proche des Rouges qui publiait le journal Advance.

Il était aussi évident que sir Harry entretenait des liens étroits avec certains éléments au MMM, avec un dirigeant en particulier. Or, SAJ, convaincu que sir Harry était indispensable à la bonne gestion d’Air Mauritius, prit la ferme décision de ne pas le faire remplacer à la tête de cette grosse entreprise. Et SAJ ne permit à personne de venir «raconter des histoires» sur sir Harry ou sur la gestion d’Air Mauritius même. Après avoir été évincé d’Air Mauritius par le gouvernement travailliste en 1997, sir Harry revint à la tête de la compagnie après les élections de 2000, sous le primeministership de SAJ. Mais au bout de quelques mois, c’est l’histoire des fameux «carnets» de caisse noire qui devait mettre hors-circuit sir Harry.

SAJ avait vu juste en maintenant sir Harry à la tête d’Air Mauritius car sa performance fut vraiment remarquable. Il contribua à faire de MK un acteur indispensable qui contribua à rehausser l’image de marque du pays en offrant un service de qualité tant aux Mauriciens qu’aux nombreux touristes visitant l’île.

Dans la gestion d’autres institutions et d’entités, SAJ investit dans la performance plutôt que dans le bonheur des chatwas. Ainsi, la State Bank of Mauritius (SBM) fut elle aussi édifiée en vache sacrée décrétée off-limits pour les colleurs d’affiche.

Quand on compare la politique pratiquée par SAJ par rapport aux grandes institutions et entités et celle de PKJ, on comprend que ce dernier utilise le critère fondamental de contrôle. Ce qui explique les nominations des proches et des inconditionnels à la Banque de Maurice, à la SBM, à Air Mauritius et d’autres entités stratégiques encore.

Les nominations à l’Electoral Supervisory Commission (ESC) et l’Electoral Boundaries Commission (EBC) reflètent elles aussi une différence d’approche radicale entre le père et le fils Jugnauth. PKJ entend exercer un contrôle sans faille sur ces deux institutions d’une grande importance pour le maintien de la démocratie parlementaire type Westminster à Maurice. Et dans le contexte présent, jouant un rôle crucial dans le rejet des pétitions électorales. Ainsi, si SAJ laissait ces institutions aux mains des professionnels comme André Robert, avec PKJ c’est une démarche de mainmise. Ce qui explique pourquoi Oograssen Devpal Cowreea, un membre de la profession légale pas connu comme un activiste du MSM, a été remplacé à l’ESC et l’EBC par un nommé Yashvirsingh Roopun, favori de LaKwizinn.

Dans la même logique de contrôle absolu, la Senior Counsel Narghis Bundhun, loin d’être une inconditionnelle de quelque parti politique, a été débarquée de ces deux institutions en faveur de la néophyte Shadmeenee Mootien, apparemment une proche du cercle dirigeant. On ne badine pas avec Ton-Pravind.