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Repenser l’école grâce au Covid-19

8 septembre 2021, 14:14

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Il n’y a pas que du mauvais dans une crise sanitaire de l’ampleur du Covid-19. Positivons et soignons notre regard pour des lendemains et une société meilleurs, plus résilients.

Forcément avec les challenges, viennent aussi des opportunités. Comme celle de repenser cette école qui exclut au lieu d’inclure, que nous imposons à nos enfants. Les chiffres sont parlants : en raison du coronavirus et ses multiples variants, environ 1,5 milliard d’apprenants, soit 90 % de la population scolaire mondiale, ont été partiellement déscolarisés, avec des séquelles d’ordre communicationnel qui pourront impacter sur le vivre-ensemble d’ici quelques années.

Dans une large mesure, l’école est devenue virtuelle, confinant son rôle à celui d’un simple diffuseur de concepts académiques – avec les limites de cette méthode d’enseignement. Pourtant, au lieu de nous plaindre en permanence quand nous attendons que la cloche résonne, il est urgent de tirer les leçons de cette vie nouvelle et d’explorer d’autres méthodes d’enseigner l’école de la vie, afin que les écoliers puissent se retrouver et retrouver un digne accès au savoir, à la culture, et au dépassement de soi.

Un accès qui ne serait pas une adaptation à la va-vite de la donne sanitaire qui perdure, mais un accès qui aura été réfléchi en fonction de la vie qui va. Nous devons bien cela à nos enfants car il n’y a rien de plus déprimant pour eux que de voir l’extrême vulnérabilité des grands face au petit virus invisible, et d’être témoins de la fragilité des certitudes scientifiques, par exemple, sur les vaccins, autour desquels la société, et partant, les cours de récré, se fracturent…

Encore plus difficile de comprendre, ou d’accepter, quand on n’a pas encore ou tout juste dix ans, la précarisation économique de ses parents et du pays.

Au sortir de l’école ces jours-ci, il est difficile de trouver un large sourire sous les masques des élèves et des enseignants. Le sourire est voilé. Mais derrière leur bout de tissu, les élèves en quittant leur salle de classe ne savent plus s’ils peuvent jouer avec leurs camarades de classe comme avant. Ils se retiennent même s’ils savent, pour beaucoup, qu’ils ne vont pas les revoir le lendemain, comme c’était le cas avant que leur calendrier scolaire ne soit bousculé. Cela crée des fragmentations, des distances et plusieurs formes de frustration, de questionnement et d’incompréhension.

Les enseignants aussi sont frustrés. Les pédagogues expliquent que masquer le visage constitue, dans une salle de classe, un facteur «d’instabilité majeure dans la relation didactique». Car, au primaire surtout, la perception visuelle des informations qui se déclinent sur le visage à la fois de celui/celle «qui énonce la parole et de celui ou celle qui la reçoit», de même que leur traitement, sont «des processus déterminants pour la compréhension et la mémorisation des phrases échangées et du cours en général». Ces étapes, difficilement atteintes en ligne ou quand l’on porte un masque, ont alors un impact sur l’ensemble des paramètres de la relation d’enseignement et de communication. Si on poursuit la logique plus loin, l’oral est, lui-même, conditionné par un engagement corporel global, dans lequel le visage est central.

Je posais la question à un enseignant : quand l’on porte un masque, comment raconte-t-on une histoire aux enfants ? Réponse : il faut amplifier les autres gestes corporels, accentuer la voix, travailler davantage le regard. Il faut, en somme, mimer bien plus qu’avant le contenu des cours – qui datent de l’ère pré-Covid-19 et qui ne sont pas adaptables ou adaptés.

Comme gouverner ou éditorialiser, éduquer relève d’une mission civique et sociale. En interdisant à nos enfants du primaire de partager des ressources communes ou de travailler à plusieurs sur un projet en classe, on risque de pousser vers une fin du travail en groupe… En restant dans les schémas d’hier, oui.

Mais il est tout à fait possible que la crise sanitaire nous oblige aussi à tout revoir, en éliminant ce qui est obsolète et en utilisant efficacement la technologie. Élèves et enseignants ont besoin de développer de nouvelles compétences qui seront utiles, pour les décennies à venir, à l’école de demain, qui aura d’autres types de credits…