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Sawmynaden : les dessous de l’opération militaire

9 janvier 2021, 09:49

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Tireurs d’élite perchés sur des toits de bâtiments, voitures blindées, barricades : quels sont vraiment les dessous de la vaste opération militaire – et non pas policière – déployée lors de la comparution du ministre Yogida Sawmynaden à Port-Louis en raison d’une private prosecution

Pourquoi une opération militaire ? Qui veut prouver quoi ? En 1989, suivant l’arrestation de Gaëtan Duval répondant à une accusation d’assassinat relative à l’affaire Azor Adelaïde, des partisans du PMSD s’étaient révoltés à Curepipe contre le gouvernement Jugnauth. 

Lors de ces violentes émeutes à Curepipe, la police régulière ne put faire face à la situation. On fit alors appel à Raj Dayal, le commandant de la Special Mobile Force (SMF). Les hommes de Dayal se livrèrent aussitôt à une robuste et musclée opération de crowd control et bien vite les manifestants qui étaient loin d’être des poules mouillées s’enfuirent du centre de Curepipe. Dayal, bien que fort controversé, n’était pas un ‘n’importe’ qu’Anerood Jugnauth avait placé à la tête de la SMF. Lors de son entraînement à un jeune âge, l’enfant de Carreau-Laliane avait fait partie de l’armée britannique qui avait été déployée en Irlande du Nord au moment le plus meurtrier du conflit protestants/catholiques dans cette partie de la Grande-Bretagne. 

Mais pour revenir à Port-Louis en 2021, pourquoi une telle démonstration de puissance militaire ce jeudi 7 janvier alors que durant le week-end dernier, la police n’avait pas osé intervenir à Baie du Tombeau lors d’échanges entre deux gangs de trafiquants de drogue ? 

Pourquoi placer des tireurs sur des toits ? Craignait-on un attentat sur la personne de Sawmynaden ? Même si Pinocchio s’était recyclé en tueur professionnel, il n’aurait pas été aussi con que de tenter de tuer quelqu’un fortement protégé par des militaires et des policiers. Le fils de Geppetto aurait choisi un moment où sa cible bénéficiait du minimum de protection et non pas l’attaquer dans le centre de Port-Louis. 

Comme l’a expliqué Dev Jokhoo, l’ancien patron des renseignements, sur sa page Facebook, il aurait suffi de faire Sawmynaden prendre place dans une voiture blindée et le déposer tout près de la cour et le collecter par la suite pour éviter une mobilisation qui aura coûté plusieurs millions aux contribuables mauriciens. Mais non, on a voulu se livrer à une démonstration de force. 

Contrairement à la thèse de menace à la sécurité du ministre, il se pourrait qu’il y ait eu un raisonnement bien calculé derrière les manoeuvres de Port-Louis ce 7 janvier. Suivant la présence de plus d’une centaine de milliers de Mauriciens le 29 août 2020 à l’invitation de Bruneau Laurette et la forte présence de manifestants hostiles le 29 décembre lors de la comparution de Sawmynaden en cour, le gouvernement craint le potentiel de mobilisation physique des Mauriciens qui réalisent que la dictature s’installe inéluctablement dans le pays. Que même le Parlement a été muselé. On craint le déclenchement de violentes manifestations à Maurice. Il existe aussi une possibilité – sur papier – que certaines pétitions électorales et le carnet de campagne MSM au n° 8 ne produisent de profonds bouleversements. Cela viendrait s’ajouter au risque – sur papier encore – que l’affaire Angus Road, l’enquête sur le meurtre de Kistnen et la private prosecution contre Sawmynaden n’entrainent des dégâts cataclysmiques. 

Avec de tels risques planant à l’horizon, pourquoi ne pas donner un message haut et fort que le régime n’est pas prêt à ‘grené kuma zamalak kont-sezon’ et qu’il entend frapper bien fort s’il est acculé physiquement. 

On avance aussi l’hypothèse que cette mobilisation ait pu être recommandée par l’actuel commissaire de police qui atteint l’âge de la retraite le 3 mai 2021, soit dans moins de quatre mois. La réponse à cette explication dans moins de quatre mois quand il sera question de succession ou de contrat aux Casernes centrales.