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Changer de paradigme

23 mars 2020, 10:18

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Ce n’est pas seulement dans les autres pays du monde que les manifestations sportives sont reportées et annulées. Même le huis clos n’est plus de mise. L’impact du coronavirus sur les rassemblements autour du théâtre spectaculaire des compétitions a aussi atteint l’île Maurice. Le Meeting international d’athlétisme, entre autres compétitions, initialement prévu les 17 et 18 avril, a été reporté à début juin.

Si jusqu’ici le pays a été épargné par le virus lui-même, il n’en demeure pas moins que la vague de déséquilibres qu’il crée dans l’économie mondiale, dans les échanges entre pays, dans les déplacements, dans les rassemblements, bref dans le mode de vie de l’humanité en général, a fini par atteindre l’île Maurice, un peu comme une onde de choc qui se diffuse irrémédiablement. Avec également son lot de rumeurs, de palabres, de théories du complot et de peurs exacerbées. La psychose s’installe comme en témoignent les rayons dévalisés des supermarchés.

Depuis fin décembre 2019, tout observateur assidu du monde ne peut s’empêcher de penser qu’une main invisible a augmenté le degré de difficulté d’un cran et rendu le «jeu» plus noir et meurtrier. Sur le plan local, le nombre d’accidents, de meurtres, de vols, de viols et de délits liés à la drogue fait part d’un niveau de violence extrêmement élevé. La violence, voilà ce qui caractérise les rapports humains de nos jours.

La pandémie de coronavirus est venue ajouter à ce scénario catastrophe en s’attaquant indirectement  à  l’économie  mondiale,  à  la  finance  et  à un modèle de société qui repose uniquement sur l’argent et le profit. Tout est mise en scène hédonique destinée à ceux qui ont les moyens de payer, de l’anarchie des voyages aux illusions du cinéma et des victoires sportives en passant par la spéculation financière et les démocratures du monde entier. L’Homme a mis un prix sur tout, il a même mis un prix... sur le prix, la taxe, et ne se sent bien qu’en emmagasinant des profits, comme si c’était une fin en soi et que lui-même devait vivre éternellement. Sans réaliser ou faisant mine de ne pas réaliser que ce faisant, il détruit son semblable et l’environnement dans lequel il vit. C’est le prix à payer à trop vouloir mettre un prix sur tout.

Il a fallu une épidémie de cette ampleur pour faire baisser le niveau de pollution de l’air en Chine. Les catastrophes en tous genres dénonceraient-elles la folie d’un monde qui a tout investi dans les illusions égoïstes en oubliant l’essentiel? La machine s’est grippée et la panique sur les marchés boursiers laisse planer l’ombre d’un krach.

Pendant combien de temps peut-on fermer des écoles? Pendant combien de temps peut-on fermer une ville entière? Pendant combien de temps peut-on empêcher les gens de faire leurs courses dans les centres commerciaux? La société est touchée au plus profond, dans son quotidien, impuissante face à un ennemi invisible de 0,1 micron.

Personne  ne  sait  encore  de  quoi  sera  fait l’après-coronavirus. Il faut espérer que cette épidémie ait pu provoquer un sursaut, un réveil de la vraie part d’humanité que nous avons en nous. Et qu’elle contribue à un nouveau modèle de société qui ne sera plus dirigé par l’argent et la bêtise.

Elle appelle en tout cas à une prise de conscience salutaire. Il est urgent de faire la différence entre le nécessaire, l’inutile et le superflu. Transposée sur le plan sportif, la chape de plomb qui pèse sur cette dimension publique du sport n’est-elle pas une invitation à faire la différence entre participer à la débauche financière et à la débauche d’énergie tonitruante des spectacles sportifs et faire du sport en toute simplicité?

Car même dans le champ sportif, les hommes se comportent en consommateurs passifs et surtout payeurs. Ils alimentent un système foncièrement vénal qui se nourrit insatiablement de l’argent, incapable de se satisfaire des profits obtenus. Il faut encore les maximiser, toujours les maximiser, au nom d’un dérèglement devenu principe de vie. Et participer là aussi à l’enrichissement rapide et illimité d’une poignée de jouisseurs. Partout dans ce monde, c’est la norme instaurée par le système: la majorité doit contribuer, d’une façon ou d’une autre, à faire en sorte que des jouisseurs puissent péter plus haut que leur cul. Le sage a beau hurler que la plus grande des richesses est l’absence de convoitises. Il a fini enroué. Gageons que le coronavirus puisse sonner le réveil des consciences.