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Assez !

15 mars 2020, 09:08

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Le soleil fait-il partie de l’opposition ?

Cette réflexion a priori saugrenue ne se refuse pas malheureusement au souvenir de récents bulletins météo qui prédisaient pluies, vents et marées, et qui furent suivis d’avertissements de cyclone de diverses classes et/ou de fermetures d’écoles mais qui finirent par engendrer des journées calmes, plutôt sèches, sinon ensoleillées ! Comme mercredi… Comme jeudi…

Quel est le problème ? Des employés de la météo qui doivent justifier leur existence en rappelant à leurs concitoyens leur «pouvoir» sur une nature occasionnellement dévergondée ? Le nouveau radar parle-t-il japonais ? Ou, au contraire, souffrons-nous, une fois encore, de ce qu’une institution qui devrait être, a priori, indépendante et professionnelle, ait été kidnappée par la bureaucratie ou le pouvoir central qui n’en fait qu’à sa tête ? S’il y a effectivement de l’eau à Bramsthan, comment peut-on ensuite justifier, avec une telle légèreté, un jour entier de scolarité de perdu ? À force d’être précautionneux, ne va-t-on pas finir par devenir une nation de poules mouillées ?

Le dernier communiqué du ministère de l’Éducation date de lundi et illustre une partie du problème. Un avis de fortes pluies avait été émis par la météo, annonçant «une détérioration des conditions climatiques dans les jours à venir» ! On ferme donc les écoles le mardi 10 et le mercredi 11, le jeudi 12 étant déjà férié et le vendredi 13 faisant des clins d’œil manifestes pour «les jours à venir» et assurant, par ailleurs, ancrage à une culture nationale de plus en plus typique du «pont» !

Si on peut comprendre la tendre attention du ministère pour les enfants du pré-primaire, des écoles SEN et même du primaire, est-ce que les jeunes adolescents du secondaire ou du secteur technique doivent être considérés comme étant aussi vulnérables, voire fragiles ? Les «institutions d’enseignement supérieur» qui s’occupent de jeunes adultes et dont les profs sont, du moins théoriquement, encore plus adultes doivent-elles aussi être protégées de la pluie ? Des parapluies peut-être ? Le communiqué va jusqu’à spécifiquement y inclure le MIE ! Pour l’exemple ? Ils ne sont pas tous adultes là-bas, non plus ? Si les élèves doivent être protégés d’eux-mêmes dans certains cas (jusqu’à quand paierons-nous le «péché» d’avoir perdu une élève plus téméraire que les autres, emportée par les flots, sur un pont qui débordait, à Mon-Goût, en 2008 ?), les professeurs ne devraient-ils pas être à leur poste, préparer les cours, corriger les devoirs, peut-être se mettre à la disposition «digitale» de leurs élèves ?

 Les écoles sont restées fermées, mardi et mercredi. Il a plu dru jeudi et vendredi. Avec le réchauffement de la planète, à quand des avis de «fort soleil» menant à des fermetures, mettons, d’hôtels ? On attend une insolation mortelle ? En attendant, une décoration nationale à Mr Météo et à Mme la ministre de l’Éducation me paraît «assez» raisonnable, au pays de la méritocratie !

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J’ai eu l’occasion d’aller au musée de l’Aapravasi Ghat il y a quelques jours et j’ai bien aimé car c’est du bien fait, du bien présenté, du travail de professionnel. On peut sans doute pinailler par moments. Par exemple, la cale ouverte du bateau-type qui transportait des coolies vers Maurice est bien trop propre, trop bien rabotée, bien trop vernie pour s’approcher de l’authenticité. Sans être prisonnier du passé, il est clairement nécessaire de rappeler d’où nous venons pour illustrer ce que nous avons fait comme chemin ensemble depuis. Les photos de l’époque, largement partagées, je le note, par la Chambre d’agriculture des patrons, nous rappelle l’époque des paillotes où le poisson du lagon était plus accessible, une époque de clivages sociaux plus nets, porteuse de moins de mobilité sociale, mais sans doute aussi moins mercantilisée, moins cynique, moins polluée. Il fallait choisir. Nous avons fait les bons choix. Au détour d’un présentoir, une copie du rapport de la Commission Royale de 1909 qui menait à la fin de l’engagisme. Au paragraphe 133, ce rapport nous indique, pour notre grand bonheur, le coût des licences d’opération dans le pays. La licence la plus chère ? Celle d’une banque ou d’une distillerie à Rs 1 100 l’an. Un tenancier d’une salle de billard payait Rs 660 ! Un hôtel Rs 400, un «money changer» Rs 20 et un «mussel bed owner» (un producteur d’huîtres ?) Rs 11. Si un avoué payait Rs 66 et qu’un notaire payait Rs 330 en ville et Rs 110 à la campagne, les avocats, les médecins, les dentistes, les planteurs s’étaient arrangés pour ne payer rien du tout. Un métier disparu depuis 1909, mais qui était positionné juste moins cher que celui du banquier ou du producteur de rhum : «wholesale seller of gandia», facturé Rs 1 000 l’an ! Autres temps, autres mœurs…

Deux bémols regrettables cependant. Un parking inadéquat – du moins tant que la chaîne en fonte garde l’automobiliste éloigné de l’espace disponible et l’entrée elle-même au niveau de la guérite de contrôle (ça contrôle quoi, puisque l’accès est gratuit ?), qui est vis-à-vis d’un espace typique de tant d’espaces publics à Maurice : raccordement rocambolesque au réseau CWA, morceaux cassés de tuyau PVC, bouteilles en plastique vides, restes de briques en ciment, dessous de robinet dégueulasses et… l’inévitable «mop» que l’on fait sécher !

 Qu’est-ce qui nous vaut cette civilisation du «mop» que l’on expose dans les endroits les plus inconvenants, comme autant de trophées de notre médiocrité, y compris à l’entrée d’un beau musée ? Assez ?

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 Il y avait cette année, jusqu’au 13 mars, 1 630 598 morts de cancer dans le monde. On vit avec. Il y avait, en même temps, 194 746 mortalités dues à la malaria. On vit avec. De plus, on comptait 333 761 morts de sida, 496 574 morts parce que trop imbibés d’alcool, 992 524 morts de tabagisme, 212 908 suicidés et 2 220 744 humains qui mouraient de faim ! On vit avec. Entre le 1er janvier et le 13 mars 2020, on comptabilisait 4 989 morts de coronavirus*. Voilà : c’est mis en perspective ! Il y aura bien plus de morts, c’est certain, mais comme le Covid-19 tuera surtout ceux qui sont déjà fragilisés médicalement parlant, il est probable que dans la plupart des cas, les morts changeront simplement de colonne. Au lieu d’être catalogué comme mort de diabète ou de pneumonie, on va mourir du Covid-19. Ça ne rassure personne, bien sûr, mais c’est la vérité.

Ce qui fait peur et qui différencie ce Covid-19 ? C’est nouveau ! C’est très contagieux ! Ça touche l’économie mondiale au point où les marchés boursiers dévissent et que le PQ disparaît des étagères ! Il est maintenant clair que la planète n’y échappera pas et que notre meilleur espoir est que cela ne dure pas trop. Ainsi les mesures drastiques pour tenter de contenir la propagation.

Les mesures prises localement jusqu’ici sont nécessaires et entre de bonnes mains. Il n’y a pas de cas identifié du Covid-19 dans le pays et il ne pourra, fatalement, qu’être importé. Le contrôle rigoureux aux frontières, avec quarantaine obligatoire en cas de soupçon, paraît capital jusqu’au moment où la quarantaine dépassera les capacités d’accueil…

 Une ironie : la Chine, exportatrice suprême, y compris du Covid-19, déclare moins de nouveaux cas par jour (8) que les États-Unis (65), le Canada (16), l’Autriche (67) *. On peut supposer que son problème désormais, c’est de ne pas réimporter la bestiole à travers ses aéroports internationaux et ainsi infecter la Chine, bien au-delà de Wuhan et de la province de Hubei ?

Une réflexion : le Covid-19 tue en affectant les poumons. Et si c’était la manière de la Nature de nous faire payer, pour avoir infecté (pollué !) son poumon à elle ? De CO2, de NO, de méthane et toutes sortes d’autres saletés. Si l’humanité était tout simplement le Covid-19 de la planète et que la planète avait dit «Assez !» ?

D’ailleurs, depuis janvier, le ralentissement commercial et industriel est réel. On achète moins de pétrole et de charbon parce que l’on en brûle moins. Moins de vols d’avions ou de mouvements de voitures à Hubei, en Italie ou ailleurs, ça aide. Gaia respire un peu mieux, nous ayant lâché du Covid-19 dans les poumons…

Et n’oublions pas son arme la plus redoutable : les mutations à venir !

 *http://worldometers.info/