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Quitte ou double !

13 janvier 2019, 11:27

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Quitte ou double !

 

S’il gagne, c’est le boulevard de tous les possibles, s’il perd, c’est un cataclysme personnel. Pravind Jugnauth joue gros, très gros ! Sa réputation, son avenir politique, le futur de son parti, toutes ces questions sont suspendues en attendant le verdict du Privy Council dont les plaidoiries seront entendues ce mardi 15 janvier. Si l’incroyable retournement de veste de l’ICAC qui, avec sa nouvelle position, se décrédibilise davantage, n’aura semble-t-il aucun effet sur les Law Lords, d’aucuns voient dans cette démarche, une dernière tentative (avortée ?) de sauver coûte que coûte la tête du leader du MSM. L’image renvoyée par cette singulière démarche de l’ICAC, aux frais des contribuables, fait penser à l’ultime sursaut de désespoir de l’entourage du Premier ministre. Qui, craignant un éventuel échec, met toutes les chances de son côté, et utilise les dernières cartes disponibles, quitte à ridiculiser davantage un organisme censé combattre la corruption.

 

Sommes-nous donc à la veille d’un séisme politique sous le soleil mauricien ? Bien malin serait celui qui émettrait avec certitude une opinion tranchée sur l’issue de cette affaire qui, faut-il le rappeler, a connu deux jugements différents, une cour de justice ayant trouvé le Premier ministre coupable, tandis qu’une autre l’a innocenté. C’est dire à quel point le recours au Privy Council représente l’ultime chance de Pravind Jugnauth soit de se laver de tout soupçon, soit de s’entacher à jamais d’une éclaboussure. Ainsi, en cas de victoire, le leader du MSM reviendra du combat, la tête haute, décrassé de la souillure de Medpoint, et pourra prétendre à une certaine légitimité pour se présenter comme futur candidat premier ministériel.

 

C’est lui qui conduira alors ses troupes dans la bataille électorale, en essayant d’engranger le maximum de dividende politique, récolté après l’utilisation à fond des leviers du pouvoir sur lesquels il a pour l’heure la haute main. La gratuité des études universitaires n’est qu’une première carotte brandie au nez des électeurs, en attendant d’autres. S’il gagne, Pravind Jugnauth continuera donc sa campagne déjà commencée et surfera également sur des projets que son camp juge positifs : la concrétisation du Metro Express, l’organisation des Jeux des îles, et l’on peut déjà deviner une prochaine présentation d’un dernier budget plus douce qu’amère. Bref, en vérité, si ce verdict lui est favorable, le leader du MSM entrera dans une nouvelle phase du duel avec son challenger Ramgoolam. Et Jugnauth fils pourra toujours garder des options d’alliances, qu’elles soient pré ou post-électorales avec le MMM, voire le PMSD, sachant qu’en politique rien n’est impossible dans ce pays.

En clair, s’il remporte ce procès, il pourra en toute sérénité affronter la guerre des législatives avec sa candidature comme chef de gouvernement et rien ne l’empêchera de  procéder à une dissolution du Parlement à une date qui conviendrait à ses intérêts. En revanche, si Pravind Jugnauth perd, ce serait alors un scénario-catastrophe – non seulement sur un plan personnel, mais aussi pour son parti – et nouveau sur le plan politique. Comment resterait-il à son poste après avoir été reconnu coupable de conflit d’intérêts ? On le voit mal s’accrocher à son costume de chef du gouvernement alors qu’il avait démissionné, par principe, en tant que ministre après le premier jugement de la cour intermédiaire qui l’avait condamné. Du reste, s’il ne démissionne pas de lui-même, comment tiendra-t-il la pression populaire (citoyens et partis de l’opposition crieront leur révolte) qui s’abattra sur lui et son alliance MSM-ML ? Nous entrerons alors dans une phase de gestion difficile de la dernière année de son mandat, avec au final une improbable future candidature premier ministérielle.

Dans 48 heures, avec le début des plaidoiries, et dans l’attente ensuite d’un verdict qui pourra changer – ou pas – le cours des événements politiques, nous n’avons que des théories, des options et nos réflexions remplies de si !