Publicité

Enjeux 2019

9 janvier 2019, 07:22

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.

Que souhaiter à l’île Maurice pour 2019 ? De la croissance, bien sûr. C’est le voeu de tous les économistes et de tous les patrons. Sauf que, cette année, ce voeu semble fort compromis. De la MCB au Financial Intelligence Unit en passant par Fitch ratings ou l’ancien gouverneur de la Banque de Maurice, Ramesh Basant Roi, le constat est le même. L’objectif de 4 % est élusif. Il vaudrait mieux tabler sur moins.

Pour beaucoup de Mauriciens, en cette année électorale, il n’existe qu’une seule question : c’est la faute à qui ? Ping, pong, pong, ping, chacun se renverra la balle. Cette logique nous fera faire l’économie des vraies questions : Quelles sont les raisons fondamentales de ce ralentissement ? Dans quelle mesure nos politiciens sont-ils responsables de la situation ? Dans quelle mesure ont-ils du pouvoir sur la solution ?

Responsables, ils le sont. Si bien qu’on est en droit, comme Ramesh Basant Roi, de se poser la question de savoir si un modèle de croissance par la consommation est durable dans un pays qui ne produit quasiment rien de ce qu’il consomme. Peut-on durablement doper la croissance avec des grands projets réalisés par des étrangers et qui nous endettent ? Ce sont des questions de conjoncture, qui peuvent être réglées à travers le Budget annuel.

Reste une question plus radicale. Une question que la sphère politique et managériale préfère esquiver faute de véritable pouvoir sur la situation : Le modèle économique mauricien est-il durable ? Si effectivement nous ne produisons ni riz, ni farine, ni essence, ni viande, ni légumes, ni ordinateurs, ni téléphones, ni voitures, sommes-nous prêts à vivre dans un monde où le commerce international est lentement en train de se contracter ?

La Chine, pour sa part, s’y prépare. Dans une initiative pour recentrer son économie sur l’activité intérieure, elle annonce pour 2019 un plan de développement de son réseau ferroviaire de 125 milliards de dollars. Elle construira en une année autant d’infrastructures ferroviaires que n’en a un pays comme la France ! Ailleurs, la Grande-Bretagne se prépare à vivre une récession «choisie» afin de se réinventer un modèle qui lui convient le mieux. En France, Macron essaie de sauver ce qu’il reste du modèle ancien alors que son peuple qui sait manifester ne sait pas encore se réinventer. Et l’Amérique, alimentée par le pétrole de fracturation hydraulique, joue aux cigales.

Pour Maurice, plusieurs défis : des ressources naturelles insuffisantes par rapport à nos ambitions, la vulnérabilité de notre commerce extérieur et la chute de la démographie. Notre réponse : encore plus de commerce international pour plus de croissance…

Pourquoi pas ? Car s’il existe des niches, des solutions qui peuvent nous tirer d’affaire, nous ne serons que trop heureux de les exploiter. Il n’empêche que ce type de solutions ne marche que si le reste du monde demeure dans une logique d’ouverture et d’expansion du commerce international. Ce qui demeure un choix à contre-courant… Qui plus est, le commerce international est dominé par Amazon et Apple qui ne s’intéressent guère aux petits. Et l’intérêt que manifestent les étrangers pour notre pays semble se porter davantage sur les vacances à la plage, les éventuelles bases militaires et le poisson que pour le high-tech. Pour une vie dans des villas au soleil que dans nos villes chaotiques. Notre modèle reste classique : nous vendons extraordinairement bien le peu de ressources naturelles que nous avons. C’est tout à notre crédit.

Le hic est que, pour vendre ces ressources naturelles, nous dépendons aussi des ressources naturelles d’autres pays : notamment le pétrole essentiel au modèle d’import-export des marchandises, à la connectivité aérienne, quand ce n’est pas le charbon et le fioul pour produire de l’électricité afin d’alimenter ce mode de vie.

Ainsi organisés, nous sommes bien partis pour buter sur la première limite à la croissance : le stock limité de ressources naturelles de la planète et l’usage raisonné (ou pas) qu’en fait l’humanité. Ne serait-ce pas le temps de se poser des questions plus fondamentales ? Les experts nous donnent 12 ans pour nous réinventer posément. Ou pour courir après la croissance entre deux matchs de ping pong.