Publicité

Océan Indien, exploration minière et géopolitique

19 octobre 2018, 11:19

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

lexpress.mu | Toute l'actualité de l'île Maurice en temps réel.
Carte de l’océan Indien montrant notre zone économique exclusive entourée de zones allouées à des pays étrangers par l’Autorité internationale des fonds marins.

L’Express a récemment publié une analyse signée de Jean-Claude de l’Estrac sur la géopolitique dans l’océan Indien, axée surtout sur les avancées de la Chine dans l’océan qui nous entoure. Il est évident de constater les intentions de la Chine sur l’océan Indien et aussi sur l’Afrique. Nous observons chez nous, entre autres, le projet Jin Fei, l’aéroport financé par la Chine et les gros travaux en bâtiment et en infrastructure par des Chinois.

Je voudrais ici ajouter quelques observations méconnues des Mauriciens et de nos dirigeants. Venons-en au fond des océans. Les gouvernements successifs ont parlé de l’économie bleue et de son potentiel de développement. Nous en discutons beaucoup mais ne constatons pas vraiment du concret. Nous contrôlons donc une zone économique exclusive de 1 900 000 kilomètres carrés à laquelle il faut ajouter une surface de 400 000 kilomètres carrés cogérée avec les Seychelles. Donc un total immense de 2 300 000 kilomètres carrés.

Beaucoup a été dit et écrit sur le potentiel de ces zones. Tout cela est clairement établi sous la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (United Nations Convention on the Law of the Sea – UNCLOS) datant de 1982. Ce qui est moins connu est que, sous la même convention (Article XI), est établie l’Autorité internationale des fonds marins (International Seabed Authority – ISA), donc une institution internationale.

Cette Autorité de droit international public est autonome avec son propre budget, son Assemblée et son Conseil. Elle a un secrétaire général, des commissions, des bureaux et 166 États en sont membres. Le président actuel est un Polonais et notre collègue, Me Milan Meetarbhan, en a été le président en 2012. Il existe aussi, parmi d’autres, un Bureau des affaires juridiques au sein de l’Autorité.

La fonction principale de l’Autorité est de réglementer la recherche minière des grands fonds marins et de veiller à la protection de l’environnement de ce milieu en contrôlant l’exploration et l’exploitation minière. L’Autorité a le pouvoir de délivrer des permis d’exploration ou d’exploitation des fonds marins en dehors des juridictions nationales, mais dans une mission conforme au bien futur de l’humanité.

Nous savons aussi que les fonds marins regorgent de minerais dans certaines régions du monde. Ce qui se montre intéressant aux explorateurs pour le moment sont les nodules polymétalliques et les sources hydrothermales – on parle souvent de manganèse, cobalt, nickel, zinc, fer ou cuivre. Certains parlent aussi d’or et d’argent.

Les meilleures technologies sont encore au niveau de la recherche ou de l’exploration minière et ce n’est que dans quelques décennies que l’on pourra extraire des fonds marins des minéraux, tout comme aujourd’hui on extrait du pétrole et du gaz du fond des océans. Bref, une manne économique du futur.

Rapprochons nous maintenant de notre zone économique mauricienne. Il se trouve que cette fameuse Autorité des fonds marins (ISA) a délivré des permis tout près de chez nous et le plan ci-joint est surprenant à plus d’un titre.

Ainsi, au sud-est de Rodrigues, on trouve des zones délivrées à l’Inde et à… l’Allemagne ! Au grand Sud, se trouve un petit collier de perles réservé par la Chine. Puis au nord-est de Rodrigues, la Corée du Sud et encore l’Inde. Une grande zone a été réservée par l’Autorité elle-même, pour être délivrée subséquemment à des États ou à des opérateurs. La Chine lorgnerait une partie de cette zone et l’Inde a déjà réservé à côté.

La Chine a aussi annoncé en août dernier avoir découvert des gisements polymétalliques et des sources hydrothermales, grâce à un petit sous-marin autonome nommé le Qianlong 2. Le sous-marin opère à partir d’un navire de recherche, le Xiangyanghong. Nous constatons finalement que plusieurs puissances étrangères s’intéressent à notre région non seulement pour des raisons géopolitiques mais aussi et surtout économiques.

Ajoutons, en passant, les convoitises diverses sur l’Antarctique tellement plus au Sud mais si près de chez nous au niveau planétaire. L’île Maurice se doit de tout mettre en marche pour obtenir des concessions en Antarctique.

Beaucoup encore peut être dit, écrit ou débattu sur ces sujets. Ce qui m’inquiète, ou plutôt, qui me déçoit, c’est que notre petite île Maurice, au beau milieu géographique de toutes ces activités, transactions et tractations n’en reste qu’au chapitre préliminaire des discours, des séminaires ou des conférences. À quand l’action ?