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Turbulences à Air Mauritius

10 octobre 2018, 15:33

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L’auteure déplore la mauvaise gestion de la compagnie, notamment le planning inefficace des pilotes.

Qu’est-ce qui fait le succès d’une firme, d’un centre commercial, d’une entreprise ? Plusieurs conditions : un compte en banque suffisant pour les achats, dépenses, entretien… sans que l’on se trouve à découvert inopinément. Et sans doute plus important encore : une équipe de dirigeants pouvant faire preuve de compétences réelles (administratives, financières, etc.).

En plus, et beaucoup plus difficile à trouver, des personnes dotées de talents, c’est-à-dire ? Par talent, on entend une capacité naturelle à comprendre, prévoir vite et agir juste. On passe là à un autre niveau de la gestion : il y a quelque chose d’un peu génial dans cette manière de sentir ce qui se passe et du coup d’envisager l’avenir.

Il ne me semble pas qu’à l’heure actuelle, notre compagnie aérienne soit en mesure de répondre à ces critères, pourtant indispensables pour marcher vers la réussite. En effet, la lecture de quelques événements récents m’invite à le penser.

Sous-effectif de pilotes non anticipé

À la fin de l’année 2017, il y a eu une grève masquée des pilotes sous couvert de maladie qui a mis la compagnie en difficulté. Quelle en était la raison ? Tout d’abord, un refus de la direction d’Air Mauritius de répondre aux nombreuses demandes formulées par les pilotes relatives à l’amélioration de leurs conditions de travail.

Le planning d’emploi prévoit des pilotes de service, de réserve, et d’autres qui seront «off», donc pas censés être sollicités pour pallier les insuffisances d’un planning inefficace. Or, l’habitude a été prise par la compagnie de recourir aux pilotes «off» pour faire voler les avions. Alors, à quoi bon faire un planning qui ne permettrait pas aux pilotes d’organiser leur vie familiale lorsqu’ils ne sont pas censés être appelés ?

En réalité, cette humeur des pilotes a été déclenchée à la suite d’une faute de la compagnie à l’égard d’un pilote étranger qu’elle entendait recruter quelques mois avant que ne survienne cette grève. Les conditions qui avaient été présentées à ce pilote lors de la phase de son recrutement changèrent au moment de la signature de son contrat.

Cela n’est pas une bonne pratique dans le management des ressources humaines et traduit un manque de correction et de confiance entre la direction et son personnel. Choqué par de tels agissements, ce pilote finit par informer la compagnie qu’il n’accepte pas ce poste et en informe également le syndicat des pilotes.

Ce problème de prévision d’emploi des pilotes n’aurait pas eu ce retentissement si le recrutement avait été prévu et anticipé, et surtout mis en oeuvre. Or, le plan de recrutement qui a été initié au cours de l’année 2017 n’a été mis en oeuvre qu’à partir du mois d’avril 2018.

C’est un sous-effectif qui n’a pas été anticipé et de longs mois durant lesquels la compagnie a continué de maltraiter ses pilotes…

De la mauvaise gestion de ses moyens

La prétention de la compagnie à vouloir afficher de bonnes perspectives en continuant d’utiliser les A340 qui devaient être remplacés par des A350 flambant neuf n’est pas le fruit d’une bonne gestion. Comment faire voler une flotte augmentée de deux avions si le nombre de pilotes n’augmente pas lui aussi ? Il n’est nul besoin d’être diplômé d’une école de logistique pour le comprendre. Et voilà pourquoi la compagnie, qui avait cru bon de planifier davantage de vols, a dû les annuler faute de pilotes, générant ainsi la colère de nombreux passagers.

Pour sortir de ces turbulences, la compagnie n’a d’autre choix que de recruter au moins 10 % de pilotes supplémentaires en privilégiant la formation de pilotes mauriciens, moins coûteuse que l’emploi de pilotes étrangers qu’il faut rémunérer à la hauteur de leur éloignement familial.

Revenir à de bonnes pratiques

Et pourtant, un homme était là, intelligent, compétent, prévoyant, honnête, conduisant la compagnie au succès – Megh Pillay. Pour quelles raisons cet homme a-t-il été éjecté, c’est le mot, lors d’un conseil d’administration amputé de ses meilleurs membres ? Cela ressemble plus à une cuisine de petits copains qu’à un acte de bonne gouvernance.

Allez le chercher ! Lui seul peut sauver la compagnie Air Mauritius et l’empêcher de continuer à glisser dans le gouffre où elle se trouve. Ne serait-ce que par devoir, et mettant de côté une légitime exaspération, il acceptera de reprendre les commandes.