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En un mot: Confiance !

18 juin 2017, 07:56

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Le Budget qui vient d’être présenté n’est peut-être pas le numéro de haute voltige qu’y voit un secteur privé depuis trop longtemps et bien trop souvent dépourvu de sens critique, mais il n’est pas mal et aurait vraiment pu faire illusion avec ses Rs 2 milliards de promesses sous forme de tuyaux neufs, son idée d’income tax négative, sa promesse de réduction du déficit budgétaire de 3,5 % (2015-2016) à 3,3 % l’an prochain pour passer à… 1,6 % en 2018-2019, son rêve de Metro Express, ses logements sociaux, son incitation fiscale double pour l’air conditionné venant du fond de la mer ou une usine de dessalement d’eau de mer…

  
Et pourtant, on râle et on tempête beaucoup. Parfois, c’est avec raison. Comme par exemple quand le Budget est présenté avec l’entourloupe SBM Infrastructure Development Co. Proposée pour le prêt indien de $500 M ou sans les provisions de contingence pour SCBG ou Betamax. Parfois, cela manque singulièrement de mise en perspective et on critique ce qui nous affecte personnellement sans souffler mot de ce dont on profite ! Mais le véritable problème du gouvernement du jour c’est qu’il a presque épuisé son capital confiance et que quasiment tout est désormais vu de manière suspecte, peu importe la vérité. Ce qui n’est plus étonnant !

  
 

Dans un pays où l’on peut, froidement, tenter de modifier le résumé écrit des sessions parlementaires (le Hansard), alors même qu’il y en a maintenant un résumé vidéo, on tressaille ! Cela ne fait de bien à la confiance de personne de voir, il y a quelque temps, le leader de l’opposition révéler le rapport négatif de Kroll sur Sobrinho et quelques heures après, voir les compagnies offshore du même monsieur être… réactivées. Quelle confiance avoir dans votre gouvernement, quand votre Premier ministre dit au Parlement cette semaine qu’il était contre le remboursement des souscripteurs SCBG/ BAM avec de l’argent public, mais que l’on ne l’a pas écouté ! Vous vous posez d’autant plus de questions que c’est cette même personne qui affirmait ne «pas être un couillon, moi !» quand il retirait ses dépôts, comme d’autres d’ailleurs, de la banque Bramer qui allait bientôt être mise aux arrêts ! Comment blâmer ceux qui perdent confiance en voyant où en sont les promesses lénifiantes du manifeste électoral de Lepep de novembre 2014 ? On nous vendait alors la fin de «la fraude, la corruption et le copinage». On nous promettait «un pays où primera l’égalité des chances», «une démocratie consolidée», une nation où «tout citoyen sera libre de démontrer publiquement son appartenance politique, sans crainte de sanction, de discrimination ou de harcèlement de la part du gouvernement» – contrairement, disaient-ils, à la situation sous leurs prédécesseurs ! On nous promettait 2 000 logements par an, le «service volontaire» dans le cursus secondaire, la Freedom of Information Act, l’amélioration de l’efficience du port, encore plus de libéralisation des ondes, une loi anti-transfuges, le financement transparent des partis politiques, la Declaration of Assets rendue publique, une MBC réorganisée…


 

Il est bien vrai que la pension de vieillesse est passée à Rs 5 000, que divers PRB généreux ont été octroyés, que l’on a lancé un Plan Marshall, que ceux qui consomment moins de 6 m3 d’eau ne paient plus la note de la CWA, qu’il y a des bornes Wi-Fi un peu partout, mais le point est qu’à chaque fois que ce gouvernement a déçu, parfois en faisant le contraire de ce qu’il préconisait, il rupturait son contrat-confiance un peu plus, au point où, aujourd’hui, on doute de tout. Les décisions hors manifeste électoral, style ce qui a été fait à Megh Pillay à Air Mauritius, ou ce que l’on a tenté de faire au DPP à travers la Prosecution Act, ajoutés à la gloutonnerie de salaires super-sucrés, de berlines et de per diem n’ont, par ailleurs, vraiment pas aidé !

    
 

C’est ainsi que la très grande générosité de l’Inde vis-à-vis de Maurice fait sourciller peut-être plus que nécessaire, pas seulement à Agalega et dans l’offshore. C’est ainsi que l’extension, au-delà de la première acquisition, d’une exemption de la taxe sur les droits au bail sous l’Invest Hotel Scheme fait tiquer, comme cela se passerait aux États-Unis ces jours-ci, au vu des intérêts immobiliers de Trump. C’est ainsi que le projet de transférer la gestion des fonds «en surplus» de la NPF vers le PMO – sans détails aucuns – suscite des interrogations beaucoup plus vives qu’en temps normal. C’est ainsi que quand l’État s’attaque, avec raison, à la nation zougader, on y voit aussi le règlement de comptes. C’est ainsi qu’un projet a priori excitant comme le Metro Express est soupçonné de tous les maux, d’autant plus qu’il n’y a aucune transparence sur un investissement qui va, au moins, coûter très, très cher. C’est ainsi que les hypothèses les plus farfelues surgissent à la lecture de l’Annexe A8 (b) (i) du discours du Budget qui spécifie que : «The Income Tax Act will… empower MRA to request from banks, insurance companies and non-bank deposit taking institutions an Annual statement of Financial Transactions in cases where a transaction by any person (individual, company, societe, trust or succession) exceeds Rs 500,000 or if the aggregate amount of deposit in an income year exceeds Rs 4 million». Quoi ? Toutes les banques (y compris l’offshore ?) vont maintenant automatiquement dénoncer leurs clients selon ces critères, y compris les compagnies ? On espère se tromper, sinon ce serait la fin déclarée de la confidentialité des opérations bancaires et le remplacement de la transparence par la nudité totale – avec voyeurs à la clé – ceci, dans un pays ou l’indépendance d’action de la MRA peut déjà transformer sa cécité d’avant une élection en une enquête circonstanciée quand les maîtres changent…C’est ainsi que des citoyens contestataires ne font pas confiance au gouvernement sur la carte biométrique et craignent les amendements annoncés à la NIC Act, permettant aux compagnies étatiques et privées de lire les données qui s’y trouvent.

      
   

La confiance, c’est important ! C’est même vital ! C’est ce qui dynamise une équipe de foot plus qu’une autre et qui lui permet de remporter le match. C’est l’ingrédient principal chez un élève qui réussit dans ses études. C’est un des socles essentiels d’une alliance entre une épouse et son mari ou entre des partenaires en affaires. C’est le tabernacle sur lequel on construit la crédibilité des institutions libres, compétentes, indépendantes. Il faut, au départ, faire confiance, c’est sûr mais la confiance, cela demande évidemment des efforts, des gages, se mérite et se cultive. 

  Qui a encore confiance ?